Mali : Assimi, maître du jeu

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Après deux parenthèses douloureuses ouvertes par le coup d’Etat militaire de novembre 1968 et la révolution galvaudée de mars 1991, le vote référendaire du 18 juin 2023 ouvre la voie à l’avènement de la 4ème République.

Les multiples bégaiements de l’histoire sont l’œuvre de dirigeants politiques à la cécité avérée et la démocratie frelatée instaurée en 1992 a fini par casser tous les ressorts du pays qui, tel le phénix est en train de renaître de ses cendres, confirmant un adage fétiche qui proclame que le Mandé peut tanguer, vaciller mais ne sombrera pas. Le duo Assimi – Choguel par sa complémentarité, sa pugnacité et son sérieux apporte au peuple malien et à toute l’Afrique un réel motif d’espoir, grâce à une démarche de rupture à la fois audacieuse, rigoureuse et imparable.

Les coups gagnants d’Assimi Goïta

Depuis que Soundjata Kéita a réuni les rois à Kurukanfuga pour établir la Charte du Mandé et jeter les bases de l’empire, le vivre ensemble est devenu une réalité qui résiste à l’épreuve du temps. Chaque peuple du Mali a une histoire glorieuse écrite par de grands hommes et les exemples les plus poignants viennent de la résistance à la pénétration coloniale qui a été un combat de tous les jours pendant plus d’un demi-siècle. Les faits d’armes ne manquent pas de Sabouciré à Gao en passant par le Bélédougou, Sikasso et Ségou. Les dirigeants de la Transition ne sont pas moins méritants, d’autant plus que les adversaires sont puissants et redoutables : la France, la Cedeao et la Minusma pour les plus connus. Quand les méthodes de la Cedeao et de l’Union Africaine ont montré leurs limites, on a vu le grand ordonnateur français se jeter sans réserve dans la bataille mais il a dû lui aussi jeter l’éponge au pied du grand maître et géant américain. Le Mali est resté débout et encore plus fort. Qui l’eût cru ? Au plan national, les principaux acteurs du mouvement dit démocratique et leurs affidés ont été contraints à une retraite sabbatique face à la détermination des forces du changement. Comment ne pas saluer le choix par les autorités d’un partenaire aussi stratégique et déterminant que la Russie de Poutine ? Ce partenariat a permis d’équiper les forces de défense et de sécurité pour répondre efficacement au défi sécuritaire sur l’ensemble du territoire et même au-delà, comme il permet dans un contexte de crise aussi grave, de soutenir la diplomatie malienne qui se hisse à un niveau rarement atteint par un pays africain.  En vérité, c’est de l’intérieur que le monde occidental est en train de s’effondrer et ce déclin est d’abord moral avant d’être économique et militaire, à un moment où les Russes et les Chinois sont suffisamment forts pour ne pas plier l’échine. L’Ukraine est le test qui a mis à nu les limites du système occidental des sanctions car 80% du monde refuse de les appliquer contre la Russie. L’Occident est victime du complexe de supériorité et de son instinct de prédation. Comment peut-il s’entêter à faire la guerre avec une armée qu’il n’a pas ? L’orgueil précède toujours la chute.

L’occident ou l’arroseur arrosé

En temps de paix, la démocratie fonctionne suivant le système majoritaire alors qu’en période de guerre, seul le chef sur la base de pouvoirs exceptionnels doit décider et bénéficier du soutien de la population et de toutes les institutions. Le visage de la démocratie est différent d’un pays à l’autre. Ainsi, les USA, la France, l’Allemagne, l’Italie ont des systèmes différents les uns des autres pendant qu’il existe en Europe des monarchies. Pour autant, cherche-t-ils à les uniformiser comme on voudrait le faire pour les pays d’Afrique ? Non. C’est la preuve que l’intrusion de l’Occident guidé par la France dans la vie politique des Etats cache une volonté de déstabilisation pour faire main basse sur les richesses. Cela est d’autant plus exact que les responsables politiques africains dociles ne sont jamais inquiétés pour des questions de droits de l’homme ou de violation de la Constitution, pendant que la propagande est entretenue par leur presse pour vouer aux gémonies les dirigeants privilégiant les intérêts de leurs pays. En effet, l’auteur d’un putsch militaire sanglant peut être félicité et investi au Tchad par le président français pendant qu’un putsch survenant à la suite d’une révolution sociale au Mali n’ayant fait aucune victime peut s’avérer un cas pendable. Les maliens et une bonne partie des africains ont compris le jeu malsain de l’Occident qui est le seul vrai maître des terroristes qui écument le Sahel. En réussissant à les contrarier, Poutine apparaît plus que jamais comme la solution face aux appétits gloutons des présidents Biden et Macron. Si la demande malienne du retrait sans délai de la Minusma a provoqué l’étonnement et la colère dans le monde occidental, elle a plutôt suscité l’incrédulité puis l’admiration chez de nombreux peuples opprimés d’Afrique. Tous les observateurs sont d’accord que le positionnement actuel du Mali est prometteur sur l’échiquier africain et même mondial, après sa double victoire au plan sécuritaire et diplomatique. Avec un potentiel minier et énergétique énorme, place désormais au redressement de l’économie nationale plombée par plusieurs décennies de gabegie et de corruption.

Les recommandations pertinentes des Assises Nationales de la Refondation ont été transcrites dans la nouvelle Constitution, offrant au Gouvernement un programme cohérent et une grande marge de manœuvre. La diplomatie et la défense du pays ayant été largement améliorées, le choix des hommes pour le changement devient la priorité. Le réaménagement du gouvernement semble répondre à cette préoccupation. Toutefois, il est indispensable de mettre fin au désordre social interne qui n’est rien d’autre qu’une survivance du libertinage entretenu depuis trente ans. L’espoir est permis à condition de se débarrasser des partenaires étrangers arrogants et encombrants, sans oublier les politiciens sclérosés et accapareurs qui n’ont plus rien à offrir.

Mahamadou Camara                   

Email : mahacam55mc@gmail.com

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