Protection des Filles : Harmoniser les lois sur le mariage des filles

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La Constitution de 1992 prône l’égalité des droits, et le Code de la famille et des personnes permet le mariage des filles à 16 ans voire 15 ans avec l’autorisation des parents. Pour les défenseurs des droits humains, il est nécessaire d’harmoniser les lois pour pallier les mariages d’enfants qui demeurent problématiques.

Le mariage d’enfants au Mali constitue un réel problème juridique, socio-économique et sanitaire. Car en plus d’être une violation des droits humains, la pratique constitue une réelle menace sur la santé, le bien –être de l’enfant.

Selon la dernière enquête démographique et de santé au Mali (2018),  le taux de mariage d’enfants est de 52% dans des localités comme Kayes, Koulikoro et le district de Bamako. En 2021, les filles occupent le haut du tableau pour ce qui concerne les mariages, 61% des filles étaient mariées avant 17 ans.

L’Unicef définit le mariage d’enfants comme toute union officielle ou non officialisée entre un enfant de moins de 18 ans et un adulte. Au Mali, la Constitution de 1992, en cours, ainsi que le Projet de nouvelle Constitution de la République en négociation, adhèrent à la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme du 19 Décembre 1948, à la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples du 27 Juin 1981 ;  s’engagent à défendre et garantir les droits de la Femme et de l’Enfant  et s’alignent derrière les principes de l’égalité des droits entre les sexes.

Le Code des personnes et de la famille du Mali autorise le mariage des filles à 16 ans ou 15 ans avec l’autorisation des parents.  Notre pays a ratifié et adopté la Charte Africaine des Droits et du Bien-Etre de l’Enfant qui définit l’Enfant dans Article 2 » tout être humain âgé de moins de 18 ans ». De façon explicite, l’ Article 21 de cette Charte, interdit le mariage d’enfants en termes « les mariages d’enfants et la promesse de jeunes filles et garçons en mariage sont interdits et des mesures effectives,  y compris les lois, sont prises pour spécifier que l’âge minimal requis pour le mariage est de 18ans et pour rendre obligatoire l’enregistrement de tous les mariages dans un registre officiel ». Par conséquent, il existe une contradiction entre les lois nationales et les engagements internationaux ratifiés par le Mali. Un paradoxe auquel les défenseurs des droits humains comptent remédier en multipliant les plaidoyers pour l’harmonisation des lois, outils indispensables, selon eux, pour lutter contre les mariages d’enfants.

« Malgré que le Mali ait signé et ratifié les traités relatifs aux droits des femmes et des enfants, le nouveau Code des personnes et de la famille, autorise les mariages d’enfants. C’est ce qui nous pose réellement problème », déclare Bréhima Ballo, Chargé de programme à AMSOPT- Mali (Association Malienne pour le Suivi et l’Orientation des Pratiques Traditionnelles). Il est soutenu par Mme Traoré Fatoumata Dicko en charge des programmes VBG de Wildaf Mali. Et pour éradiquer le mariage des enfants (ME), les acteurs de la société multiplient les campagnes de sensibilisation et de plaidoyer en soutenant différents argumentaires qui tournent autour des conséquences des mariages d’enfants sur la scolarisation des filles, les dangers liés à la Santé sexuelle et reproductive telle que la fistule.

Dans ce cadre, Wildaf-Mali pilote un mouvement fort et inclusif de plaidoyer porté par les réseaux de la société civile pour sensibiliser et amener les populations à abandonner le ME. Cette campagne vise également à amener les autorités à légiférer une loi uniformisée sur l’âge de mariage à 18 ans et plus, explique M. Ballo.

Selon Mme Sanogo Fatoumata Kéïta, même si le Code des personnes et de la famille qui régit l’âge du mariage, ne fait actuellement pas objet de modification, il reste quand même un sujet de plaidoyer pour l’ensemble des acteurs de la promotion et protection des droits des enfants en particulier et des droits de l’homme en général.

Selon eux, la modification de l’âge légal de mariage des filles est surtout d’ordre socio-culturel voire religieux. Ce qui rend la question complexe et sensible. « Nous menons beaucoup d’actions de sensibilisation pour harmoniser les lois, pour ce faire, nous avons une Politique nationale de protection de l’enfant, une stratégie nationale multisectorielle en plus d’autres actions qui visent tous à uniformiser l’âge légal de mariage des enfants à 18 ans », soutient le Directeur National de la Promotion de l’Enfant et de la Famille, M. Youssouf Bagayogo.

Pour  la présidente du Conseil Consultatif  National des Enfants et Jeunes du Mali Mme Aïssata Amadou Boucoum, il faut continuer à sensibiliser les opposants à la modification du Code des personnes et de la famille pour lever les réticences et harmoniser les lois nationales.

Khadydiatou SANOGO, Ce reportage est publié avec le soutien de JDH, Journalistes pour les Droits Humains et National Endowment for Democracy-NED

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