Le parquet général de la cour d’appel de Paris a demandé jeudi que le prédicateur suisse Tariq Ramadan, figure déchue de l’islam européen, soit jugé pour viol aggravé concernant l’une de ses quatre accusatrices et requis l’abandon des poursuites pour les trois autres, a appris l’AFP de source proche du dossier.
Le ministère public demande à la cour d’appel de Paris, qui étudiera le dossier le 29 mars, un procès devant la cour criminelle départementale de Paris, juridiction composée uniquement de juges professionnels, pour un viol aggravé qui se serait produit à Lyon en octobre 2009 sur une femme surnommée « Christelle », selon ses réquisitions, une information donnée tout d’abord par la chaîne BFMTV.
Les faits dont le parquet demande l’abandon courent jusqu’en 2016 et concernent d’autres femmes dénonçant parfois plusieurs viols.
Ces trois femmes sont Henda Ayari, une ex-salafiste devenue militante laïque qui avait déclenché l’affaire en portant plainte en octobre 2017 pour un viol qui aurait eu lieu en 2012 à Paris; Mounia Rabbouj, une ex-escort girl qui avait accusé Tariq Ramadan de neuf viols entre 2013 et 2014 ; une troisième personne, identifiée par la police sur des photos et des messages retrouvés dans son ordinateur, pour des faits remontant à 2016.
En juillet, deux juges d’instruction parisiennes avaient ordonné ce procès pour le conférencier, petit-fils du fondateur des Frères musulmans – ce dont il avait fait immédiatement appel – et abandonné toute charge concernant deux autres femmes.
Dans ce dossier emblématique de l’ère #MeToo, les plaignantes ont décrit des relations sexuelles particulièrement brutales: selon l’ordonnance, certaines ont relaté « la main qui tient et force la tête, le bras qui empêche de bouger ou de se retourner, le poids du corps, le regard de fou, les paroles de domination et de soumission, les ordres, les gestes, cette attitude pour imposer les pénétrations ».
M. Ramadan, 60 ans, a pour sa part d’abord nié avoir eu des relations sexuelles extraconjugales avant d’être contraint de reconnaître, face aux preuves accumulées par la justice, des « relations de domination », rudes mais « consenties ».
Les charges contre M. Ramadan reposaient notamment sur l' »emprise » qui aurait été exercée sur ces femmes qui l’admiraient.
Mais dans ses réquisitions signées jeudi, l’avocat général conteste la réalité d’une telle emprise concernant « Christelle », Henda Ayari, Mounia Rabbouj et la troisième femme.
Pour « Christelle », toutefois, le parquet estime que les éléments sont réunis pour caractériser un viol avec violence sur personne vulnérable.
Fin mai, M. Ramadan avait obtenu une victoire judiciaire en Suisse où une femme l’accusait de viol et de contrainte sexuelle. Un tribunal genevois l’a acquitté, estimant qu’il n’y avait pas de preuve contre lui.
Les avocats de la plaignante avaient alors annoncé faire appel d’une décision « profondément injuste ».
AFP