L’eco, la monnaie unique africaine, peu utile si calquée sur le fonctionnement du franc CFA?

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La monnaie eco sera-t-elle la panacée pour les pays de la Cedeao, contrairement à ce qu’a été le franc CFA pour les pays de l’Uemoa? Pour analyser cette question, L’Afrique en marche reçoit Prince Jérémie Yadoungou, expert centrafricain en politique et en géopolitique, et Ferhat Ait Ali, ex-ministre algérien de l’Industrie.
Le 29 juin 2019, les chefs d’État de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest ont signé le texte entérinant la création de la monnaie unique eco dès 2020. Six mois plus tard, la France et les États membres de l’Union économique et monétaire ouest-africaine signent un nouvel accord de coopération monétaire qui met fin au franc CFA au profit de l’eco. Cependant, ce projet tarde à se concrétiser à cause du refus notamment du Nigeria d’adopter un mode de fonctionnement de l’eco calqué sur celui du franc CFA.
“Passer du franc CFA à l’eco sans changement radical dans le mode de fonctionnement de cette monnaie, c’est tout simplement changer de prison, en y intégrant d’autres détenus, mais tout en restant sous l’emprise et le contrôle du même geôlier”, affirme à Sputnik Ferhat Ait Ali, spécialiste en économie et ex-ministre algérien de l’Industrie. Pour lui, “dans l’état actuel des économies africaines concernées par cette monnaie, il est beaucoup plus judicieux pour elles de collaborer sur des projets communs et intégrants de développement et laisser de côté, pour plus tard, les discussions sur l’utilité d’une monnaie commune, en laquelle je ne crois pas du tout. Ce qui se passe actuellement au sein de l’Union européenne, sur fond de la crise en Ukraine, en est un exemple édifiant”.
Les pays utilisant le franc CFA forment une vaste zone géographique, allant de l’Afrique de l’Ouest à l’Afrique centrale et les Comores. La plupart sont des producteurs de pétrole situés dans le golfe de Guinée où se trouvent de grandes réserves. D’autres pays ont des produits stratégiques, comme de l’uranium au Niger, avec lequel Orano (ex-Areva) fournit le parc électronucléaire français.
“C’est aux Africains d’utiliser leurs ressources à bon escient et au profit de leurs peuples. S’ils font le choix de créer une monnaie commune dans cette zone, ils doivent mettre en commun leurs richesses en hydrocarbures et en minerais stratégiques pour garantir eux-mêmes cette monnaie par leurs propres moyens. Et sans recourir à une quelconque puissance étrangère au continent, qui est en plus un ancien colonisateur et qui a maintenu ses intérêts au détriment des Africains par le franc CFA”, estime, pour sa part, Prince Jérémie Yadoungou, enseignant-chercheur centrafricain, expert et consultant en géopolitique.

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