Faire profiter le pays de ses richesses ! Telle est l’ambition des autorités de la Transition de notre pays. C’est ce qui a justifié l’audit du secteur minier malien et aussi de l’adoption d’un nouveau code minier qui était aussi une recommandation des Assises nationales de la refondation (ANR).
Pour que l’or brille pour les maliens, pensent de nombreux observateurs, il faudra «une réforme et une refonte en profondeur» qui fera de l’Etat un véritable acteur par le biais de joint venture/contrat d’entreprise et un modèle de régulation viable. Nous pensons que cela n’est possible qu’à deux conditions : que le Mali se donne les moyens de réellement contrôler la quantité d’or extraite de notre sous-sol, y compris au niveau de l’orpaillage, et que, secundo, l’Etat puisse juguler le trafic d’or à partir de notre pays.
Par rapport à la première condition, c’est presque une utopie compte tenu de l’opacité entretenue en partie par le manque de moyens techniques de contrôle et par la corruption. Détenues majoritairement par les multinationales, les sociétés minières profitent confortablement de l’absence de tout «mécanisme fiable» pour «contrôler avec exactitude» la quantité d’or extraite de notre sous-sol. Les chiffres officiels sont ainsi ceux qu’elles communiquent au gouvernement. «Tant que l’Etat lui-même n’aura pas les moyens de faire des recherches aurifères et exploiter les ressources, difficile que l’or brille demain pour nos compatriotes dans cet état», souligne un analyste économique.
Pour ce qui est du trafic, c’est un fléau récurrent. En témoignent les fréquentes saisies des douaniers maliens. En décembre 2020, nos douaniers ont par exemple saisi à la frontière avec la République de Guinée une cargaison de 143 kilos d’or d’une valeur estimée à plus de 7 millions d’euros (plus de 4 579 218 823 F CFA). Selon certaines de nos sources, notre pays perd chaque année des centaines de milliards de francs CFA à cause du trafic d’or à destination de Dubaï (Emirat Arabe Unis) via généralement l’Afrique du Sud. Et encore que les chiffres sont disparates. Si officiellement la quantité d’or qui quitte le Mali pour la capitale des Emirats est évaluée 500 kg par an, il est question de 80 tonnes sur des documents officiels des Émiratis.
On se rappelle aussi que, en décembre 2020, 73,5 kg de lingots d’or brut en provenance du Mali ont été trouvés dans le bagage à main de trois ressortissants malgaches en Afrique du Sud. Ces derniers avaient tenté de rejoindre Dubaï depuis Madagascar via Johannesburg et Addis-Abeba (Ethiopie). Les autorités sud-africaines les avaient arrêtés pour tentative de contrebande et avaient confisqué l’or en plus de quelque 20 000 dollars US en espèces.
La société «Parpia Gold and Jewels Trading», immatriculée à Dubaï, avait affirmé être le propriétaire légal de l’or. Elle a déclaré que le métal précieux avait été acheté au Mali et que les passeurs le transportaient légalement du Mali à Dubaï en passant par Madagascar, l’Afrique du Sud et Addis-Abeba. Ainsi, notre pays s’impose peu à peu comme le principal centre d’achat d’or des pays sahéliens, tandis que Dubaï est devenu la principale destination de la production artisanale d’or.
Des fonderies discrètes de Bamako au marché de l’or de Dubaï, quelle est la quantité du précieux métal qui est ainsi exportée aux dépens de notre pays ? Difficile d’y répondre ! Mais, en attendant les retombées du nouveau code minier, résoudre ces deux équations permettrait à notre pays d’améliorer considérablement ses revenus aurifères !
Moussa Bolly