Éditorial : la montagne de la coopération Russo-malienne risque d’accoucher d’une petite souris.

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Après avoir rompu avec la France et ses alliés occidentaux, la junte militaire au pouvoir à Bamako s’est tournée vers la Russie pour trouver des solutions à ses multiples et complexes problèmes. Vieille amie du Mali indépendant, l’ancienne Union des Républiques socialistes Soviétiques, URSS, devenue la Fédération de Russie, a toujours entretenu des bonnes relations avec le  Mali avant la désagrégation de l’Union. L’actuelle fédération née des cendres de l’URSS, aux antipodes de la vision occidentale du monde,  est à la recherche des nouveaux partenariats gagnant- gagnant. Le régime transitoire malien semble mordre à l’hameçon de cette nouvelle offre politique de Vladimir Poutine. La bonne question que le citoyen lambda malien se pose aujourd’hui est celle de savoir si  Assimi Goïta, le Président de la Transition, en se tournant vers la Russie au détriment de l’occident  a été  le meilleur choix  au regard de l’exacerbation de la crise socio-sécuritaire voire politique et surtout au manque de perspectives.

En effet, hormis les armements, qui ont été acquis au frais du contribuable malien, les populations attendent encore et toujours  les retombées positives de la collaboration de leur pays avec la Russie. Près de deux ans de collaboration, à part le ballet diplomatique et les promesses mirobolantes, rien de concret n’est visible, en tout cas sur le plan économique et financier, et les maliens commencent à s’agacer des discours et des promesses. Dans un pays en guerre et  où plus de 8 millions sont dans une situation de précarité alimentaire, il est plus que nécessaire de voler au secours de ce pays, mais aujourd’hui notre nouveau partenaire semble se contenter des discours. En tous les cas  les maliens  n’ont jusque-là pas vu ni la couleur du blé, ni celle des engrais, encore moins la couleur des produits pétroliers. Et pourtant ces produits pourraient atténuer substantiellement l’ampleur de la crise sociale et permettre de booster un peu l’économie. L’inflation a atteint des proportions inquiétantes, à cause de l’asphyxie financière, de l’effondrement de notre économie et de la mauvaise campagne agricole. Des langues commencent à se délier, certains citoyens n’hésitent plus à critiquer certaines décisions des autorités y compris d’ailleurs le choix de la Russie. S’ils saluent l’acquisition des armes par le biais de la Russie, ils sont nombreux à s’inquiéter de l’inaction du pays de Poutine sur le plan économique et financier.

La visite éclair  du ministre des affaires étrangères de la Russie, Serguei Lavrov, a laissé plus d’un malien dubitatif quant à la capacité du pays de Poutine a donné une suite favorable aux nombreuses attentes d’un peuple confronté à tous les périls, sécuritaire, social, économique et financier qu’est le Mali. Au lieu de mettre à profit sa visite pour apporter quelques tonnes de blé et d’engrais, le Ministre des Affaires étrangères de la Russie n’a fait qu’un rappel historique des bonnes relations d’amitié et de coopération entre la Russie et le Mali avant de promettre l’envoi des produits pétroliers, des engrais et autres produits céréaliers, dans un avenir proche. Ventre vide n’ayant point d’oreille, l’avenir proche pour l’envoi des produits, c’est quand ? Depuis plus d’un an, nous n’assistons qu’à ce genre de discours assortis des promesses ragoûtantes, mais pour l’instant  jamais tenues. Aux problèmes africains, ne faudrait-il pas des solutions africaines ?

En somme, 11ième puissance économique du monde, pays confronté à une guerre, la question que l’on doit se poser est celle de savoir si la Russie a les moyens de sa politique aujourd’hui. En attendant la réponse, l’on pourrait en déduire que la montagne de la coopération Russo-malienne risque d’accoucher d’une petite souris.

Youssouf Sissoko

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