Dauphin : Et si Macky Sall nous réservait une nouvelle surprise de taille

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Après l’annonce du chef de l’Etat, Macky Sall, de ne pas briguer un troisième mandat, la bataille de la succession a débuté dans le camp de la majorité. Même si trois noms émergent, dont le Premier ministre, Amadou Ba, le patron de l’Apr et Benno bokk yaakaar (Bby) peut bel et bien nous réserver une surprise. Comme à son habitude!
 
«On n’a pas trop de temps», a admis, ce mercredi, le président sortant, Macky Sall, au cours d’une réunion de son parti l’Apr faisant ainsi allusion au choix d’un candidat consensuel pour la prochaine élection présidentielle. Toujours dans une logique de consultations, il a, dans la foulée, annoncé une rencontre avec les leaders de la coalition au pouvoir Benno bokk yaakaar (Bby). Une démarche « inclusive » qui risque de ne pas aboutir si l’on sait qu’on est à un peu plus de sept mois de ces échéances électorales. D’ailleurs, des noms circulent déjà : Amadou Ba, Aly Ngouille Ndiaye et Abdoulaye Daouda Diallo…. Mais Macky Sall, adepte des surprises, peut toujours se faire encore du plaisir à prendre de court ses militants de l’Apr et alliés de Benno en choisissant un profil hors la short-list déjà disponible.
 
Amadou Mame Diop, rééditer le coup du 12 septembre ?

 
Le premier, c’est Amadou Mame Diop, actuel président de l’Assemblée nationale, donc deuxième personnalité de la République. Choisi à la surprise générale à quelques minutes du démarrage de la cérémonie d’installation des membres de la XIVe Législature, le 12 septembre dernier, ce pharmacien d’officine de profession peut bel et bien devenir encore le ‘’chouchou’’ du chef. Pur produit de l’école sénégalaise, ce natif de Saint-Louis a soutenu sa thèse de doctorat en 1994 portant sur la « Contribution à l’utilisation rationnelle du médicament : analyse de la prescription et de la dispensation du médicament à Nouakchott (Mauritanie) ». 
 
Une consécration à l’issue de laquelle, il a fait un bref séjour en France avant de revenir s’installer définitivement à Richard-Toll.
 
L’homme politique de 58 ans (il est né le 18 juillet 1965) réputé très discret et effacé, est dépeint comme l’un des plus fidèles compagnons du président Macky Sall. Il a intégré le parti Alliance pour la République (Apr) depuis sa création en 2008.
 
Mais, le Dr Diop n’est pas un novice à l’Hémicycle, il en est à sa troisième Législature. Le responsable de l’Apr a intégré le parlement sénégalais, en juillet 2012, sur la liste départementale de Dagana de la coalition Bby.
 
Dans sa mission parlementaire, il a été assigné à pas mal de mandats d’envergure internationale. C’est le cas, par exemple, du Comité interparlementaire de l’Union économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Uemoa), dont il était membre lors de la dernière Législature.
 
Véritable bête politique, Amadou Mame Diop n’a jamais perdu d’élection depuis son entrée dans la scène politique (2008) aux côtés du chef de l’Etat. Il est maire de la commune de Richard-Toll depuis 2014.
 
Boun Dionne, retour du « Baay Faal » ?

 
L’ancien Premier ministre Boun Abdallah Dionne est un « Baye Faal » et « homme de confiance » de Macky Sall, dont la première collaboration remonte en 2005. Nommé Premier ministre par Abdoulaye Wade, Macky Sall avait choisi comme directeur de cabinet Mahammed Boun Abdallah Dionne, ingénieur de formation, ayant fait carrière à la Banque centrale des États de l’Afrique de l’Ouest (Bceao) avant d’être détaché auprès de l’administration sénégalaise. En 2007, ce dernier suit son patron à la présidence de l’Assemblée nationale, toujours en tant que directeur de cabinet.
 
En 2008, après que Sall a rompu avec Wade, son collaborateur quitte le Sénégal pour rejoindre l’Organisation des Nations unies pour le développement industriel (Onudi). Il revient à Dakar au début de 2014 pour travailler à ses côtés en tant que ministre chargé de la mise en œuvre du Plan Sénégal émergent (Pse), qui constitue la clé de voûte du programme présidentiel de Macky Sall. Quelques mois plus tard, il est choisi pour remplacer « Mimi » Touré au poste de Premier ministre.
 
Au fil des ans, ce fils de commissaire, réputé gros travailleur, qui aime jouer au golf lorsqu’il s’accorde un peu de temps libre, s’est ouvert. Le technocrate courtois s’est mué en politicien affable et chaleureux, qui n’a pas hésité à esquisser quelques pas de danse lors des derniers meetings qu’il a tenus aux quatre coins du pays. Après avoir mené la coalition présidentielle à la victoire aux Législatives de 2017 (avec 125 députés sur 165), Dionne est reconduit en tant que Premier ministre le 8 avril 2019, par Macky Sall, réélu Président en février de la même année. Ce dernier a ensuite nommé le natif de Gossas au poste de Secrétaire général à la Présidence, suite à la suppression de la primature en mai 2019.
 
Racine Sy, nouvel homme fort de Podor

 
Parmi les personnalités qui pourraient être la surprise du chef, il y a bien Mamadou Racine Sy, directeur général de l’hôtel King Fahd Palace. L’homme est réputé discret, mais également très influent. 
 
Président de la Fédération des organisations patronales de l’industrie touristique du Sénégal (FOPITS), après un passage à la tête du Conseil d’administration de de l’Institution de prévoyance retraite du Sénégal (Ipres), Mamadou Racine Sy est devenu incontournable dans ce secteur du tourisme dont il n’a cessé de porter la voix. 
 
Sur le plan politique, il a déjà fait ses preuves à Podor. Faut-il rappeler que c’est lui, affectueusement appelé « Baba Racine »dans le Fouta, qui a « chipé » la mairie de Podor des mains de la socialiste Me Aïssata Tall Sall « l’obligeant » à désormais « oser l’avenir » chez Macky Sall. Tout a commencé en 2014 quand les deux challengers s’étaient départagés par une voix après un long feuilleton judiciaire. M. Sy, qui a continué à mettre la pédale sur l’accélérateur, est finalement parvenu à s’imposer en maître dans cette partie nord du pays. 
 
Car, après douze années à la tête de la commune, Aïssata Tall Sall a décidé de ne pas se présenter à l’élection municipale de janvier 2022. Laissant ainsi un grand boulevard à son rival, qui a d’ailleurs déjà été investi par Macky Sall pour porter les couleurs de Benno Bokk Yakaar (Bby) dans cette commune. 
 
Makhtar Cissé, Fofana, Diome…, pour parler le langage jeune ?
 
Tous ces profils expérimentés ne font pas pour autant l’unanimité au sein de l’APR. Alors qu’une frange du parti demande un rajeunissement des cadres, une fracture générationnelle menace d’apparaître dans la lutte pour la succession. « Le parti ne peut pas présenter un candidat en 2024 qui ne parle pas le langage des jeunes. Ousmane Sonko [maire de Ziguinchor], Barthélémy Dias [maire de Dakar] le font avec succès. Macky Sall sait que pour pérenniser son legs et son camp, il doit miser sur la génération montante », avertit un proche du président dans les colonnes du journal français « Le Monde ». Celui-ci écrit que le temps des nouveaux ambitieux est arrivé, porteur de promesses de renouvellement comme du risque de voir la coalition au pouvoir se disloquer par des tentations personnelles.
 
Quoi qu’il en soit, au sein du pouvoir, certaines voix auraient demandé de désigner un candidat loin des tintamarres. C’est dire que ceux qui s’agitent à sa propre succession et le manifestent aussi bien de façon ouverte, mais d’une façon inconsidérée et qui se trouvent dans le camp du chef de l’Etat sont en train de scier les branches sur lesquelles, ils se trouvent assis.
 
C’est pourquoi, l’on souffle également le nom d’une personnalité qui n’a jamais affiché des ambitions, mais qui pourrait rassembler une large convergence autour de sa personne. Il s’agit de l’ancien ministre des Energies et du Pétrole, Makhtar Cissé. Bien que très effacé depuis sa sortie du Gouvernement, il reste bien aux faits politiques, même s’il n’a jamais voulu se dévoiler.

 
Interrogé sur le sujet par le journaliste Mamoudou Ibra Kane, le 6 octobre 2019, alors qu’il était encore dans le Gouvernement, le Daganois a été catégorique dans sa réponse. « Non, ce débat ne m’inspire pas. Et, il ne peut pas m’inspirer », a-t-il répondu avant de poursuivre : « La question de la succession du Président Macky Sall ne doit pas se poser, en tout cas, pas au sein du gouvernement. Elle ne doit pas aussi se poser au sein de la majorité qui gouverne », a-t-il déclaré.
 
Selon lui, les enjeux du moment se trouvent ailleurs. « On veut en permanence amener les Sénégalais à des débats de carrière, de personne, alors qu’il faudrait avoir la perspective du pays et de son avenir », a-t-il déclaré sur le plateau de l’émission Jury Du Dimanche de i-Radio.
 
Va-t-il revenir en force ? Travaillait-il en cachette avec le Président Macky Sall ? Les prochaines semaines nous édifieront.

 
Parmi ces potentiels profils jeunes, il y a Antoine Félix Abdoulaye Diome et Abdou Karim Fofana, respectivement ministre de l’Intérieur et du Commerce. Si leurs noms sont aussi cités, c’est parce qu’ils font partie des membres du gouvernement qui ont le plus communiqué, ces derniers mois, l’un en tant que porte-parole du gouvernement, l’autre pour sa qualité de garant de la sécurité intérieure.

 
Même si Diome et Fofana sont toujours au-devant de la scène médiatique, leur principal obstacle, s’ils seraient intéressés, ce serait leur manque de base politique si l’on sait qu’aucun des deux ministres n’a, aujourd’hui, de fonction élective.
 
Interpellé sur cette question autour d’une « génération montante », Moussa Diaw admet à Seneweb qu’il existe bien cette possibilité de renouveler l’élite politique en misant sur une candidature jeune et dynamique sur le terrain politique. Mais, d’après lui, la difficulté risque d’être « le manque d’expérience et la capacité d’adaptation aux aspirations des populations plus exigeantes en matières de gestion, de prospectives et de résilience ». En définitive, l’analyste politique explique qu’une personnalité non expérimentée pourrait rencontrer d’énormes difficultés relatives aux nombreux défis à relever.
 
Oulimata Sarr, Moustapha Ba… : Macky jouera-t-il la carte de la technocratie ?
 
Toutefois, le chef de l’Etat pourrait également miser sur les technocrates à l’image de Mouhamadou Moustapha Ba, ministre des Finances et du Budget, et de sa collègue chargée de l’Economie, du Plan et de la Coopération, Oulimata Sarr. Cette dernière a été d’ailleurs l’une des surprises du nouveau gouvernement Amadou Ba 1 formé le 17 septembre 2022. C’est la première fois qu’une femme occupe ce poste dans le pays. Un portefeuille très stratégique, sur fond de crise économique mondiale, et un défi pour celle qui était jusqu’ici directrice régionale d’ONU Femmes pour l’Afrique de l’Ouest et du Centre, sans ancrage politique.

 
Après un début de carrière dans l’audit, chez Ernst & Young, puis un poste de directrice financière d’une compagnie aérienne en Afrique du Sud, Oulimata Sarr a passé dix ans à la Société financière internationale, au sein du groupe de la Banque mondiale, avant de rejoindre les Nations unies.  
 
De 1993 à 2005, elle travaille comme Directrice Administrative et Financière de la compagnie aérienne Interair South Africa basée à Johannesburg en Afrique du Sud.
Elle a également participé à plusieurs initiatives d’autonomisation des femmes à travers le monde comme Africa 2.0, African Leadership Network, Vital Voices, Cartier Women’s Initiative, UnitLife entre autres.
 
Tout comme Mme Sarr, Mamadou Moustapha Ba est aussi un « génie » des questions financières. Avant d’être argentier de l’Etat, il était précédemment directeur général du Budget depuis 2014. Entre 1992 et 2000, il a occupé le poste de chargé de programmes à la Direction de la coopération économique et financière (Dcef). Puis chef du bureau primaire de la Dcef, de 2001 à 2006. Un an plus tard, il devient le directeur-adjoint de la coopération économique et financière, avant de prendre la tête de cette direction en mai 2012, jusqu’en octobre 2014.

 
Diplômé de l’Ecole nationale d’économie appliquée de Dakar en 1991, M. Ba est également titulaire d’un diplôme de politique de développement et un Master en gestion et administration publique à l’Institut de politique et de gestion du développement de l’Université d’Anvers, d’où il est sorti major de sa promotion en 1998 et 1999. Il est très adulé dans son Nioro natal, sa base politique, dont son frère Djim Momath Ba est maire.

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