Un accord pour réapprovisionner en farine le circuit des boulangeries non étatiques tunisiennes a été trouvé, ce qui constitue un début de solution face à une pénurie de pain à bas prix qui s’était aggravée ces deux dernières semaines, a-t-on appris dimanche de sources du secteur. Il existe deux circuits pour le pain en Tunisie : le premier, formé de 3 737 magasins, bénéficie de farine subventionnée fournie par l’État ; le second est celui des 1 500 à 2 000 « boulangeries modernes » qui avaient droit depuis une dizaine d’années et jusqu’à début août à un quota limité de ce type de farine.
Après un sit-in de protestation le 7 août qui faisait suite à l’adoption le 1er août d’un décret privant les « boulangeries modernes » de la farine subventionnée pour la dévier vers les semi-étatiques, celles-ci ne recevaient plus aucune farine ni semoule de l’État, qui centralise tous les approvisionnements de base.
Quelque « 90 % des 1 443 affiliés » du groupement, employant près de 20 000 salariés, avaient dû fermer leurs portes, selon Salem Badri, président de l’antenne régionale de Sfax, entraînant un allongement des files d’attente devant les boulangeries semi-étatiques, devenues les seules à vendre la fameuse « baguette subventionnée » à 190 millimes (6 centimes d’euros).
« Il a été décidé de reprendre l’approvisionnement des boulangeries non subventionnées en farine et semoule à compter du 19 août » à la suite de leur engagement à « respecter les lois relatives à la production et à la vente du pain », a indiqué le ministère du Commerce.
Le ministère du Commerce va aussi procéder à une remise à plat du système de production et de distribution du pain. À côté du pain subventionné, les boulangeries modernes vendent d’autres types de pain et des pâtisseries.
Sit-in annulé
Après cette décision, Salem Badri a annoncé à l’AFP « l’annulation d’un sit-in prévu lundi » devant le ministère du Commerce à Tunis. Des discussions vont aussi reprendre pour permettre aux boulangeries modernes de recommencer la production de pain subventionné, mais sur « la base des critères fixés par le président Kaïs Saïed », selon lui.
Fin juillet, Saïed avait préconisé « un pain unique pour les Tunisiens », déplorant de la spéculation et l’existence d’un « pain pour les riches » et un « pain pour les pauvres ». Le sujet est très sensible dans un pays qui a connu de violentes émeutes du pain qui avaient fait 150 morts en 1983 et 1984.
Le président, qui détient tous les pouvoirs depuis son coup de force de l’été 2021, a limogé la semaine passée le directeur de l’Office des céréales, et le président de la Fédération des boulangeries subventionnées a été arrêté pour « spéculation ». Certaines sont soupçonnées d’avoir vendu sous le manteau leur farine à bas prix aux boulangeries modernes.
Selon divers économistes, la pénurie de pain provient avant tout d’un manque de céréales, la Tunisie ne parvenant pas à en acheter suffisamment sur le marché international en raison de son endettement et du manque de liquidités.
Ces difficultés ont été accentuées par une sécheresse inédite au printemps qui a décimé les récoltes de blé, ce qui va obliger l’État à importer 100 % de ses besoins en blé tendre dans les prochains mois (80 % en temps normal)
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