Démarrée sur fond de boycott de certaines formations politiques, la phase communale du Dialogue inter-Maliens a pris fin le dimanche 14 avril 2024. Tenue dans presque toutes les communes du Mali elle a été assortie un peu partout d’une kyrielle de recommandations. En attendant d’en savoir un plus sur les conclusions de la phase régionale entamée ce week-end dans l’ensemble des capitales régionales et le District de Bamako, le processus à l’échelle des communes, après 3 jours de discussions, a accouché de centaines de recommandations, souvent au mépris des thématiques. Celles-ci ont notamment ayant trait entre autres à la paix, la réconciliation nationale et la cohésion sociale, la politique institutionnelle, l’économie et le développement durable, aux questions sécuritaires et de défense, la géopolitique et l’environnement international, selon les propositions du Comité dirigé par l’ancien premier ministre Ousmane Issoufi Maiga.
En effet, alors que le retour à l’ordre constitutionnel alimente les débats, les participants se sont prononcés en faveur d’une nouvelle prorogation jusqu’à la sécurisation totale du pays pour certaines communes (Ségou et Nioro du Sahel) ou encore de 6 mois à 10 ans pour d’autres comme Gao.
Ça n’est pas tout. Alors que des formations politiques réclament le payement intégral de l’aide aux partis politiques, il a été demandé par communes, non pas la suspension mais l’arrêt pur et simple du financement des partis politiques dont la réduction du nombre pléthoriques figure parmi les recommandations les plus fortes.
La question de la candidature du président de la Transition à la prochaine présidentielle a été également au cœur des intérêts au niveau communal et s’est invitée au débat. Et les participants l’ont adoubée avec, cerise sur le gâteau, la possibilité de le faire sans être obligé de démissionner de son poste de Chef d’Etat et de chef suprême des armées. Et si c’est la charte qui en est l’obstacle, ils demandent sa relecture.
Pratiquement toutes les communes du septentrion ont réclamé le retour des déplacés et le renforcement de la sécurité. Dans les communes du Centre comme à Bandiagara, les préoccupations ont porté sur la dissolution des milices, l’intégration des combattants des groupes armés d’autodéfense dans les rangs des forces armées, le retour effectif de tous les déplacés et réfugiés dans leurs localités respectives, la reconstruction des villages endommagés, etc.
Aux nombres des recommandations dominantes figurent aussi le renforcement des capacités opérationnelles des forces de défense et de sécurité, la moralisation des recrutements au sein des Forces armées maliennes, la militarisation des services des Eaux et Forêts et la promotion des Colonels putschistes au rang de Général. Les réclamations de gouvernance ne sont pas en reste avec notamment des recommandations en rapport avec la lutte contre la corruption et l’impunité, le renforcement des pouvoirs des chefs de villages et l’amélioration du processus de décentralisation. Seule la commune III, du moins des recommandations dont nous avons eu échos, s’est singularisée par la réclamation d’un délai raisonnable pour l’organisation des élections.
Amidou Keita
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Boycott du dialogue inter-maliens
Les états-majors politiques désavoués à la base
Accusé à tort ou à raison d’être responsables de l’effritement de la République, les partis politiques continuent d’en payer lourdement le tribut depuis le brusque avènement des militaires au sommet de l’Etat. Après la suspension de leurs activités par décret présidentiel, pour raison d’ordre public, les états-majors de plusieurs formations politiques avaient, par des lettres circulaires, demandé à leurs militants de ne pas prendre part à la phase communale du dialogue inter-Maliens, expliquant par ailleurs qu’une participation au Dialogue n’est pas dissociable de leurs activités politiques. Était-ce leur façon de désobéir à un décret qu’ils avaient jugé liberticide et attentatoire à la démocratie ? Quoi qu’il en soit, leur mot d’ordre n’aura pas été respecté au niveau des structures de base. En effet, ramant en eau trouble dans les vagues du processus inter-Maliens, les sections et sous-sections ne jouaient pas en symphonie harmonieuse avec la fronde des leaders politiques. Pour beaucoup, cette décision au sommet de leurs formations respectives n’a engagé que les dirigeants. C’est le cas, par exemple, de l’Adema et du RPM où plusieurs cadres du parti ont refusé de suivre les consignes données par le directoire du parti, selon nos sources. Et pour cause, ont-ils soutenu, ses directoires avaient apporté leur soutien aux autorités de la Transition aux lendemains du coup d’Etat de 2020. Et, jusqu’à preuve du contraire, aucune nouvelle décision collective n’a été prise. Conséquence : contre vents et marées, ils ont opté pour une participation à la phase communale du dialogue inter-Maliens avec en sus une caution aux recommandations qui sonnent comme un pied-de-nez à leurs responsables. En effet, les participants du DIM, par endroits, ont donné carte blanche à la Transition en réclamant une nouvelle prorogation de 6 mois à 10 ans en plus d’adouber une éligibilité d’Assimi Goita qui ne l’oblige pas à démissionner de la présidence de la Transition. Pire, les participants ont également demandé la suppression de l’aide aux partis politiques qui, selon eux, est un gâchis économique.
Amidou Keita
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