15e édition de la Journée des Communes : Un espace de partage, d’inclusion des élus et d’expression

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Après 5 années de rupture, le train de la traditionnelle Journée des Communes a redémarré avec sa 15e édition, qui s’est tenue les 11, 12 et 13 mai 2023, au Centre international de conférence de Bamako, sous le thème «décentralisation et réformes de l’État».

Venus de l’ensemble des régions du Mali, des centaines d’élus locaux ont pris d’assaut la capitale, à l’appel de l’Association des municipalités du Mali (AMM), pour étancher leur soif d’échange et de partage due à la crise. Et le moins qu’on dire c’est que la 15 eme édition leur en a offert l’espace avec le copieux menu constitué d’une large gamme de panels en rapport avec la vie des communes. On dénombre l’évaluation des acquis, l’identification des défis auxquels sont confrontés les collectivités et la définition des perspectives d’avenir en vue de renforcer la gouvernance locale.

Sous la houlette d’experts à toute épreuve, les échanges ont notamment porté, entre autres, sur les réformes politiques, institutionnelles et administratives en cours ( projet de constitution, nouvelle loi électorale), le processus de la décentralisation dans son ensemble, les questions de développement et de gouvernance territoriale (régionalisation, la fonction publique des collectivités et l’état civil), le financement de la décentralisation, les nouvelles technologies au services du développement des collectivités territoriales ou encore la sécurité, la paix et la réconciliation.

Pour le coup d’envoi des trois journées d’échanges et de partage, il est revenu au Premier ministre, Choguel Kokalla Maïga, d’en présidé la cérémonie solennelle, en présence du président du Haut conseil des collectivités (HCC), Mamadou Satigui Diakité, ainsi que d’une impressionnante brochette de membres du gouvernement dont le ministre d’état, ministre de l’Administration territoriale et de la Décentralisation, le Col Abdoulaye Maïga.

Dans son allocution d’ouverture, le chef du Gouvernement a laissé entendre que depuis Août 2020 les autorités sont à pied d’œuvre dans un processus de refondation de l’État entreprise dans une démarche participative et inclusive. Allusion est faite dans la foulée aux Assises nationales de la refondation (ANR) assorties de recommandations sur la base desquelles le gouvernement a retenu ses priorités en termes de réformes politiques et institutionnelles, à savoir : le parachèvement du processus de réorganisation territoriale, l’élaboration et l’adoption d’une nouvelle Constitution, la réforme du système électoral et la poursuite du chantier de la régionalisation.

À la suite du Premier ministre, le Colonel Abdoulaye Maïga a décrit et présenté la Journée des communes comme un espace de partage d’expériences sur la dynamique de la décentralisation. Le ministre d’État chargé de l’Administration territoriale et de la Décentralisation a ainsi assuré de l’attachement des autorités à l’édification du grand chantier institutionnel, politique et social qu’est la décentralisation. Et c’est dans le but d’en impulser la dynamique par le transfert des compétences et des ressources que le gouvernement s’est engagé à transférer aux collectivités territoriales 30% de recettes budgétaires, a indiqué le chef du département chargé de l’Administration territoriale en affirmant que le transfert financier l’ordre de 26,4% actuellement le taux excède de loin le cap des 15% fixé par l’Uemoa.

Quant au président de l’AMM, il a indiqué que l’heure n’est pas à l’abandon et au découragement. Yacouba Traoré a ainsi exhorté au resserrement des rangs et invité chaque acteur à jouer pleinement sa partition pour le parachèvement des réformes, au regard de leurs impact et implications sur les élus et leurs collectivités respectives. Par la voix de son président, l’AMM a plaidé par ailleurs pour la revalorisation du statut des maires ainsi que pour la reconnaissance comme association d’utilité publique.

Un mémorandum au chef de l’Etat…

En tant que représentants des populations, les participants aux Journées des Communes ont été reçus au Palais de Koulouba par le président de la transition, Col Assimi Goita. L’occasion pour le chef de l’Etat de leur faire le point des grands chantiers de la refondation, notamment la mise en place de l’AIGE, l’élaboration d’une nouvelle loi électorale et d’un nouveau projet de constitution qui sera soumis à l’approbation du peuple le 18 juin prochain. Le président de la Transition a mis à profit la présence exceptionnelle et massive d’élus locaux dans la capitale pour mieux les associer au chantier de vulgarisation du projet de constitution. Chaque visiteur a reçu pour ce faire sa copie dudit projet en signe d’appel à l’accompagnement de la réforme constitutionnelle, avant que les élus locaux, regroupés au sein de l’AMM, n’en profitent à leur tour pour défendre leur chapelle auprès de leur hôte à travers l’exhibition de doléances consignées dans un mémorandum.

En matière de renforcement institutionnel du processus de la décentralisation, l’Association des Maires et Municipalités met l’accent sur le respect par l’Etat de la libre administration des collectivités territoriales qui ne saurait s’accommoder, en tant que principe sacro-saint de la décentralisation, de la prise de décisions unilatérales par les représentants de l’Etat et du retrait aux collectivités des prérogatives conférées par la loi. Toutes choses, déplore-t-elle, qui décrédibilisent et fragilisent la fonction d’élu local qui mérite d’être valorisée et juridiquement protégée, aux yeux de l’AMM, à travers un nouveau statut. Et pour cause, soutient-elle, le statut en vigueur ne prend en compte que les questions de prime et d’indemnités dont l’application est loin d’être à la hauteur des souhaits par collectivités. Tenant compte, dans la même veine, du traitement des élus locaux de la sous-region, des députés et membres du Haut conseil des collectivités, les municipalités maliennes estiment qu’ «il est temps de se départir de l’idée de bénévolat et d’instituer une forme de rémunération pour les élus locaux”. En plus de participer d’une culture de la bonne gouvernance et de la lutte contre la corruption, une telle mesure contribuerait à leurs yeux à améliorer nettement la gestion des ressources des collectivités et à réduire les risques de dérapages.

L’AMM réclame en outre l’opérationnalisation et l’effectivité des décrets sur le transfert de compétences assorties de calendrier précis de leur mise en œuvre ainsi que la mise à la disposition des collectivités des ressources financières nécessaires pour l’exercice et l’effectivité du transfert de 30% de ressources budgétaire de l’Etat aux collectivités.

Avec l’annonce du référendum pour le 18 juin prochain, l’association des maires estime par ailleurs que la sécurisation de l’ensemble du territoire et l’opérationnalisation des nouvelles entités doivent précéder l’organisation de toute élection.

Parfois victimes d’humiliations par certains représentants de l’Etat, les forces de l’ordre, la justice et même les services de contrôle de l’Etat, les élus locaux, à défaut d’immunité, aspirent par ailleurs au respect des procédures d’interpellations en vigueur.

Leur cri du cœur n’est pas tombé dans une oreille de sourd puisque le ministre de tutelle a rassuré l’AMM d’un examen objectif de son mémorandum, en invitant les élus locaux à l’accompagnement des réformes initiées par les plus hautes autorités, notamment le projet de constitution qui sera soumis prochainement en référendum,

Amidou Keita

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