Un parfum de bois coupé flotte autour du camp récemment bâti à Tsel, au Bélarus, qui pourrait loger des combattants de la milice privée Wagner après leur rébellion avortée en Russie et l’accord négocié par le président bélarusse Alexandre Loukachenko prévoyant de les accueillir.
Mais le président Loukachenko a assuré jeudi que le sulfureux patron du groupe paramilitaire Wagner, Evguéni Prigojine, se trouvait en Russie et non « pas sur le territoire bélarusse ». Selon lui, les combattants de Wagner sont, eux, « dans leurs camps permanents » en Ukraine et non au Bélarus, « pour le moment ».
Or, Evguéni Prigojine devait, d’après l’accord passé avec le Kremlin via la médiation de M. Loukachenko qui a mis fin à la mutinerie de Wagner le 24 juin, s’exiler au Bélarus, un pays allié et voisin de la Russie.
Interrogé, le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a répondu de son côté que Moscou « ne suit pas les mouvements » du patron de Wagner.
« Si vous les cherchez, vous ne les trouverez pas ici », a lâché Leonid Kasinsky, un officier du ministère bélarusse de la Défense, recevant des journalistes au camp récemment bâti à Tsel, dans la commune de Asipovichi, dans la région de Mogilev (centre).
Leonid Kasinsky montrait le nouveau camp à un groupe de journalistes étrangers qui ont été également conviés à participer à une rare interview « tour de table » avec le président Loukachenko.
Autour de lui, les 300 tentes, qui pourraient accueillir quelque 5.000 hommes, étaient vides. Dans une seule, on pouvait voir quelques gardes au repos.
M. Kasinsky a précisé que ces tentes avaient été montées en prévision de manoeuvres d’entraînement qui doivent avoir lieu à l’automne.
« Etant donné que le camp est prêt, il pourrait être proposé » à Wagner, a seulement convenu l’officier du ministère.
Des médias ont publié des photos satellite de ce camp en construction immédiatement après la mutinerie, spéculant sur une arrivée de combattants de Wagner dans le cadre de l’accord négocié par le président bélarusse.
M. Loukachenko avait annoncé le 27 juin qu’Evguéni Prigojine était arrivé au Bélarus.
Mais jeudi, il a reconnu que la question de la « relocalisation » de Wagner au Bélarus n’était « pas réglée ».
– « Si cela doit être fait… » –
Après sa mutinerie de 24 heures qui a fait trembler le Kremlin, Evguéni Prigojine a assuré ne pas avoir voulu s’emparer du pouvoir, mais simplement protéger Wagner d’un démantèlement par l’état-major russe qu’il accuse d’incompétence.
Or, ses hommes, des mercenaires financés par le pouvoir russe, ont été accusés d’avoir commis des atrocités dans de nombreux pays, dont l’Ukraine, la République Centrafricaine et la Syrie.
« J’ai peur, je voudrais vivre en paix, voir mes enfants grandir, c’est tout ce que je peux dire », a déclaré une femme bélarusse sous couvert d’anonymat près du camp à propos d’une possible arrivée de combattants de Wagner.
D’autres habitants assurent toutefois ne rien craindre. « Cela ne m’inquiète pas du tout. Si cela doit être fait, cela doit être fait », a dit Yelena Vinglinskaya, 45 ans, travaillant dans une école maternelle.
C’est aussi l’avis de l’officier du ministère bélarusse de la Défense. « Je ne vois pas pourquoi nous aurions des problèmes avec le groupe Wagner », a dit Leonid Kasinsky aux journalistes étrangers.
« Nous n’allons entrer en concurrence avec personne. Nous allons recevoir leur expérience unique du combat », a-t-il assuré, ajoutant: « Le dernier mot sur le lieu où ils s’établiront reviendra à Wagner et à ses commandants ».
AFP