La fête du football continental, en cours en Côte d’Ivoire, dope le sentiment d’appartenir à une nation, au point de provoquer des…dégâts. Ceci, dans un contexte sociopolitique africain marqué par les questions de souveraineté.
Même si nul n’a choisi son lieu de naissance, les prestations footballistiques de certains pays, ces dernières semaines, ont ravivé les fibres patriotiques. C’est au point que le Sénégal, le Mali, le Cap-Vert, le Maroc, la Guinée-Conakry ont fini par avoir de nombreux supporters arborant les couleurs nationales de ces pays.
En effet, dépités par les matchs de leurs joueurs, des Camerounais, Ivoiriens et d’autres supporters de la CAN 2023 ont fini crier leur ras-le-bol et vociférer contre les dirigeants non seulement du football, mais aussi leurs dirigeants politiques. « Quelle honte, quelle humiliation nos joueurs nous ont mise ! », se lamentent les supporters des Lions indomptables du Cameroun, que certains observateurs qualifient désormais de « Lions insupportables » ou de « chatons domptés ».
Certains citoyens camerounais vont jusqu’à menacer les dirigeants du football d’émeutes, appelant les autorités du pays à faire quelque chose, avant qu’il ne soit trop tard. C’est la preuve que le football est facteur de cohésion et d’unité nationale, mais constitue un ciment du vivre-ensemble et de l’engagement patriotique. Comme le démontrent aussi les Ivoiriens qui n’hésitent pas à appeler le président Alassane Ouattara à prendre des mesures fortes contre les joueurs, Les Eléphants, en cas de contre-performance humiliante pour la Nation ivoirienne. L’Etat ivoirien n’a-t-il mis les bouchées doubles, avec des investissements de plusieurs centaines de milliards F CFA pour accueillir cette fête du football ?
Que dire de ces Lions de la Terranga du Sénégal, dont bien de spectateurs sont fiers pour la détermination et le sérieux des joueurs ? Sans oublier les joueurs des Aigles du Mali, dont la célébration de la victoire lors de leur premier match, contre l’Afrique du Sud, traduit l’hommage aux militaires au pouvoir à Bamako. Ces joueurs et les supporters, comme du reste ceux des Etalons du Burkina Faso, démontrent à souhait la fierté d’appartenir à leur nation respective, qui traverse actuellement des moments difficiles. Et il semble que ce contexte dope le moral et la rage de vaincre chez les compétiteurs, surtout en ces moments où les peuples veulent donner un sens plus concret et plus patriotique de la souveraineté.
Par ailleurs, ces différentes prestations et manifestations prouvent à suffisance que le football devient un instrument politique de rayonnement pouvant impacter le destin des Nations. N’est-il pas le ciment unificateur et de réconciliation entre les communautés ? Rien n’est moins sûr. Mais, il est aussi un élément susceptible de déstabiliser un Etat ou de perturber sérieusement les relations de coopération entre des Etats. Que dire de la supportrice algérienne expulsée du territoire ivoirien lors de cette CAN pour un activisme dangereux ? Quid de l’influenceuse camerounaise, qui a failli subir le même sort, pour avoir diffusé sur les réseaux sociaux des images portant atteinte à l’honneur des Ivoiriens ?
Heureusement que le football demeure aussi et surtout un jeu, où le fair-play doit prévaloir. Même si les enjeux du moment l’emportent sur le jeu !
Boubou SIDIBE/maliweb.net