Au moment où la Transition malienne est désormais confrontée à une guerre de reconquête du territoire (infesté par des hordes de terroristes), les autorités sont obligées de rassurer les forces vives sur l’agenda électoral…
Au lendemain du coup de force du 18 août 2020, les observateurs avaient vu en le Col Assimi Goïta, « un libérateur » ou un héros venu sauver son pays du bourbier terrorico-jihadiste dans lequel il était plongé. Ce qui suppose que celui qui est apparu comme le tombeur en chef du président IBK n’avait aucun agenda politique personnel, mais il était décidé à faire un travail d’assainissement de la maison Mali pour se retirer. Mais, avec les premières négociations avec la CEDEAO, le nouvel homme fort du Mali avait fini par afficher des intentions sur une transition plutôt longue ? D’où des interrogations. D’aucuns avaient relevé que si Assimi Goïta voulait nettoyer la maison et la redonner aux acteurs politiques, il n’avait pas besoin de souhaiter une transition de 5 ans, avant de se résigner à accepter la proposition de 18 mois émanant des dirigeants ouest-africains. La suite est connue…
Et, avec la ferme intention de refonder l’Etat malien, des militaires putschistes d’août 2020 (qui ont fini par s’approprier totalement du pouvoir en mai 2021, après l’épisode Bah N’Daw-Moctar Ouane, avaient définitivement semé le doute dans les consciences.
Et c’est à cette volonté de refondation que viendra se greffer la décision de remettre en cause l’Accord pour la paix de 2015 signé entre l’Etat malien et les ex-rebelles du septentrion du pays. C’était sous l’argument d’une application ou d’une relecture « intelligente » de ce document pour la paix.
Cette situation de dénonciation discrète de l’accord pour la paix a conduit à la reprise des hostilités entre l’Etat malien et les groupes armés rebelles alliés aux terroristes. Cette nouvelle phase de belligérance s’est trouvée dopée par la perspective de retrait ou de congédiement des forces internationales du G5 Sahel de Barkhane et de la MINUSMA.
La principale conséquence de cette reprise de la guerre est le report de l’élection présidentielle prévue pour février 2024. Cette décision annoncée récemment par le porte-parole du gouvernement de transition suscite des inquiétudes au sein des forces vives du pays. Car, plusieurs formations politiques estiment que ce report pour, à en croire le gouvernement, « des raisons techniques » n’a fait l’objet d’aucune consultation avec la classe politique. Et certains acteurs sociopolitiques menacent même de descendre dans la rue pour contraindre le pouvoir à un remodelage de la Transition à compter de février 2024. « Nous ferons en sorte qu’un civil soit placé à la tête de la Transition à partir de cette date…», confiait la semaine dernière, un haut cadre de la CMAS, un mouvement politique des proches de l’imam Mahmoud Dicko.
Avec cette suspicion croissante, le pouvoir du Col Assimi Goïta, qui fait face à une guerre de reconquête du territoire national, pourrait se voir fragiliser au sein de l’opinion. Que deviendra alors l’impératif de l’union sacrée qu’il faut pour gagner la guerre contre les terroristes et leurs alliés ex-rebelles et contre l’hostilité de certains « partenaires occidentaux » ?
Il appartient aux autorités de la Transition d’ouvrir des concertations avec les forces vives du pays, pour contribuer à lever tous les doutes, afin de rassurer davantage sur les objectifs actuels de la Transition.
Boubou SIDIBE/maliweb.net