Si l’on a coutume de voir des rapports dressés par les experts des droits de l’Homme sur des États sans que nul ne broche, le Mali n’entend pas se laisser faire.
Ainsi, après la publication, le 12 mai 2023, de son rapport sur «les évènements de Moura du 27 au 31 mars 2022», rapport accablant, incriminant les soldats maliens et leurs instructeurs étrangers de massacres d’environ cinq cents (500) personnes dont des femmes et des enfants, l’Organisation des Nations unies (ONU) vient de déclencher la colère des autorités de la transition malienne qui n’ont pas tardé à réagir vigoureusement en rappelant à l’institution onusienne les règles élémentaires de droit.
Ainsi, dans un communiqué n°052 rendu public sur les antennes nationales le 13 mai 2023, les autorités de la transition malienne n’ont pas manqué d’exprimer leur indignation et leur colère face à un tel rapport qu’elle trouve biaisé, partial et inopportun. Selon les autorités, ce rapport biaisé, partial et inopportun ne vise qu’à démoraliser nos Forces armées de défense et de sécurité (FDS) après leur brillante victoire contre les groupes terroristes à Moura l’an dernier. Et qu’il n’a d’autre dessein que de perturber la tranquillité des Maliens à l’approche d’un scrutin référendaire d’une importance capitale pour le processus de refondation en cours.
Le gouvernement du Mali, indique le communiqué, condamne avec véhémence ce rapport biaisé reposant sur un récit fictif et ne répondant pas aux normes internationales établies.
Dans le même communiqué, le gouvernement du Mali fait savoir, qu’après avoir examiné la méthodologie ayant guidé la rédaction dudit rapport, que c’est avec stupeur qu’il a appris que la mission d’établissement des faits de l’ONU avait utilisé des satellites au-dessus de Moura pour obtenir des images sans qu’aucune demande ne lui soit adressée au préalable ni par la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA), ni par le Haut-Commissariat aux droits de l’homme de l’ONU. Le gouvernement du rappelle que cet acte de la mission d’établissement des faits ressemble à de cas d’espionnage. C’est ainsi qu’il se réserve le droit d’ouvrir immédiatement une enquête judiciaire contre la mission d’établissement des faits et ses complices pour espionnage, atteinte à la sûreté extérieure de l’État ainsi que de complot militaire, des crimes réprimés respectivement par le code pénal ( art.33 et 35) et code de justice militaire (art 130), sans préjudice de la qualification des autorités judiciaires.
Le communiqué rappelle que le gouvernement de transition avait mis en garde en maintes reprises contre l’instrumentation de la MINUSMA et le Haut-Commissariat aux droits de l’Homme dans le dessein de briser la dynamique de la montée en puissance des forces armées et de sécurité du Mali et s’opposer aux choix stratégiques du Mali.
Selon les autorités de la transition, toujours dans le communiqué, il est contradictoire et paradoxal de noter la célérité avec laquelle la mission d’établissement des faits a été mis en place au moment où le Mali portait plainte devant le Conseil de sécurité des Nations unies, le 15 août 2022, sur les actes d’agression contre la souveraineté et l’intégrité territoriale d’un État, membre des Nations unies par la junte française avec des preuves de violations flagrantes et répétées de son espace aérien et d’espionnage pour avoir collecté des renseignements au profit des groupes terroristes opérant dans le Sahel, tout en leur larguant des armes et des munitions. Suite à cette plainte, aucune commission d’établissement des faits n’a été mise en place.
À ce jour, selon le gouvernement, la réunion spéciale demandée par le Mali pour présenter les preuves de la duplicité de la junte française n’a connu aucune suite. Dès lors, poursuit-il dans le communiqué , dans un souci de cohérence et d’éviter la politique de deux poids deux mesures, le gouvernement de la transition estime que la suite donnée au présent rapport de la Mission d’établissement des faits ne saurait être examiné séparément de la plainte portée par le Mali devant le Conseil de sécurité contre la junte française.
À travers cette réaction prompte et vigoureuse contre ce rapport de l’Organisation des Nations unies (ONU) et l’ouverture d’une enquête judiciaire contre la mission d’établissement des faits de l’ONU, les autorités de la transition du Mali montre ici combien elle tient à ses principes qui sont le respect de la souveraineté et de l’intégrité du Mali et le respect de ses choix stratégiques.
Le gouvernement du Mali se trouve conforté dans ses positions par le soutien de l’Organisation néo-panafricaniste de souveraineté (ONS).
En effet, dans un communiqué, n°30 mai2023, rendu public le 15 mai 2023 à Addis-Abeba, l’ONS déplore le caractère illégal des conditions qui ont permis l’élaboration de ce rapport de l’ONU sur les évènements de Moura, rapport aux entournures biaisées, fondé sur des faits totalement imaginaires puisque n’ayant pas été vérifié ni recoupé sur le terrain, selon elle. Elle s’interroge sur le crédit à accorder à un rapport de cette importance dans la mesure où il s’est fait en totale violation de la souveraineté d’un État que garantit la charte fondatrice des Nations unies de San- Francisco de 1948. Dans le même communiqué, l’ONS contre ce qu’elle considère comme une énième tentative de déstabilisation du Mali qui se prépare activement à l’organisation du référendum censé aboutir à l’adoption de la nouvelle Constitution que les ennemis des peuples africains du Mali veulent voir échouer dans le but de maintenir le statu quo de l’instabilité.
L’Organisation néo-panafricaniste de souveraineté, poursuit le communiqué, salue la clairvoyance des autorités maliennes, les encourage à maintenir le cap et à ne pas se laisser distraire par des agitations et des basses manœuvres qui cachent mal le dépit de ceux qui veulent voir le Mali sous le joug du bloc occidental dont il est en train de se dégager.
Enfin, l’ONS appelle les puissances occidentales au respect des principes qui sous-tendent l’action des autorités maliennes de transition que sont : respect de la souveraineté et de l’intégrité du Mali, respect du choix stratégiques du Mali et stricte prise en compte des intérêts du peuple malien. De même, elle exprime son soutien de la plainte du Mali auprès du Conseil de sécurité contre la France.
Au regard de ces soutiens venant d’une organisation qui regroupe trente- huit (38) entités en Afrique et dans le reste du monde (Brésil- France ) en plus d’une pluie de critiques de rapport venant de toute part et surtout l’imposition par la Russie et la Chine de leur droit de veto exprimant du coup leur rejet systématique dudit rapport, nous nous permettons de nous interroger sur ce qui reste de la crédibilité des Nations unies.
Daouda DOUMBIA