La problématique foncière est devenue très cruciale de nos jours. Qui d’entre nous n’a pas été au moins une fois confronté à un problème foncier ? Les tribunaux sont débordés par des dossiers relatifs aux conflits fonciers. Face à cette situation à l’allure de bombe à retardement, l’État est incapable de trouver des solutions pérennes. Toutefois, il a pris, récemment, des mesures. Des mesures qui pourraient-elles susciter de l’espoir ?
Depuis une trentaine d’années, la question foncière a pris des proportions inimaginables au Mali. Aucune ville ou campagne n’est épargnée. Les nantis comme les pauvres aspirent tous à obtenir un lopin de terre pour des fins de logements ou de réalisation de champs. En ville, une parcelle de terrain est vendue simultanément à trois voire quatre personnes, ou encore des pauvres citoyens se voient déposséder de leurs habitations acquises depuis des décennies. En campagne, ce sont des villages entiers qui sont achetés par des nantis, etc. Ainsi, avec la croissance de la population et le développement des villes, nous constatons de plus en plus des besoins d’accès au foncier et nous faisons face depuis des années à des problèmes fonciers : les litiges, doublons, titres illégaux. En 2018, les services du médiateur de la République ont reçu 454 plaintes, contre 290 en 2017. Donc, la réforme du secteur s’avère plus que nécessaire. Une réforme qui a débuté par la digitalisation des parcelles.
A quoi sert cette digitalisation ?
Un million de parcelles a été numérisé dans le district de Bamako, dans le cadre de la réforme domaniale et foncière du Mali, a déclaré le Secrétaire permanent de la réforme domaniale et foncière du Mali, le colonel-major Checkiné Mamadou Dieffaga. C’était le jeudi, 21 mars 2024, lors d’une rencontre du Conseil national du patronat du Mali (CNPM) sur le thème : « La digitalisation du foncier au Mali ».
Selon le colonel-major Dieffaga, cette rencontre avait pour objectif « de montrer à l’équipe du CNPM, la nouvelle digitalisation du foncier au Mali qui est très avancée au niveau du District de Bamako. »
Pour lui, l’objectif de la réforme domaniale et foncière est de refonder les rapports sociaux, mettre la terre au service du développement et appuyer la bonne gouvernance de l’État. Et de préciser que la digitalisation permet de savoir l’existence d’une parcelle, son Numéro d’identification national unique cadastral (NINACAD), son propriétaire et ses documents mais, aussi, de créer un référentiel.
Pour le président du CNPM, Mossadeck Bally, la digitalisation du foncier est aujourd’hui indispensable pour améliorer la transparence, l’efficacité et la sécurité dans la gestion du foncier. Elle permettra, selon Bally «d’enregistrer les transactions foncières et de demander des titres de propriété en ligne, ce qui simplifie les processus administratifs et réduit les risques de corruption et de fraude. » La digitalisation du foncier permettra aussi de représenter de manière précise les limites des parcelles et les caractéristiques géographiques des terres, d’assurer les investisseurs et les propriétaires terriens contre les risques de conflits mais également de contribuer à protéger les droits fonciers des populations locales. Sur le plan privé, les investisseurs font face à ce problème d’accès au foncier qui est non seulement cher mais qui n’est pas sécurisé. « Cela réduit les décisions d’investissement d’un grand nombre d’investisseurs », a déploré le président du CNPM. Et de souligner que ce problème des litiges foncier est très fréquent en milieu urbain entre les investisseurs (immobiliers, industriels et particuliers), tout comme en milieu rural entre les exploitants agricoles. Le foncier n’étant pas fiscalisé, un des avantages de cette digitalisation, est qu’elle sera un moyen pour l’État de créer de la richesse sur le foncier bâti et non bâti.
Toujours dans la même dynamique de la bonne gestion du foncier, l’ordre des Géomètres experts en collaboration avec l’Agence de cessions immobilières (ACI) tiendra une rencontre sur le thème : « la sécurisation des droits fonciers est essentielle pour stimuler l’investissement et la croissance économique ». Cet évènement sera organisé à partir de la semaine du 18 au 20 avril 2024. L’information a été donnée, lors du conseil des ministres du 20 mars 2024, par le ministre de l’Urbanisme, de l’Habitat, des Domaines, de l’Aménagement du Territoire et de la Population.
A noter que l’Ordre des Géomètres-Experts a pour mission de veiller à la stricte observation par ses membres de leurs devoirs professionnels et du code de déontologie et d’assister les pouvoirs publics et les populations en cas de nécessité. La semaine vise à promouvoir les dispositifs de sécurisation foncière respectant la diversité des droits et des sources de légitimité au service d’un développement équitable.
La tenue de cette semaine permettra, entre autres, de sensibiliser les acteurs de la gouvernance foncière et les usagers pour une bonne gestion foncière ; d’adopter une approche intégrée pour stimuler l’investissement et la croissance économique ; de contribuer au renforcement des capacités des Géomètres-Experts.
La Semaine enregistrera la participation des acteurs publics et privés du secteur du foncier du Burkina Faso, de la Côte d’Ivoire, de la Guinée, du Bénin, du Niger, du Sénégal, du Togo et du Royaume du Maroc en qualité de pays invité d’honneur.
Mariam Konaré