Alors que tous les observateurs plaident pour une limitation du nombre des partis politiques, l’on assiste chaque semaine qui passe à l’émiettement de la classe politique. A qui profite cet éparpillement de l’engagement politique ?
-maliweb.net -Ces derniers mois, c’est presque hebdomadairement que des partis politiques se créent sur la scène publique nationale. Et c’est à partir des scissions ou de l’éclatement de formations politiques existantes.
En effet, après les cassures des « grands » partis politiques de l’ère démocratique, comme l’ADEMA-PASJ, le CNID Faso Yiriwa Ton, pour générer d’autres formations comme le RPM, l’URD, SADI, le PARENA, BARA, BARICA, le PDES, etc, voici le temps de nouvelles gestations politiciennes.
C’est ainsi qu’avec la soif de renouveau suite au discrédit qui s’est emparé des anciens partis découlant du pluralisme intégral acquis à partir de mars 1991, les Maliens tentent de se repositionner dans la perspective des prochaines élections. Si hier, l’ADEMA-PASJ a encore enregistré des défections de leaders pour créer de modestes entités politiques comme l’ARDEMA de Dramane Dembélé, c’est autour du RPM, aujourd’hui, de se retrouver dans le creux de la vague.
C’est ainsi que le parti du Tisserand, ébranlé par le coup d’Etat du 18 août 2020, puis orphelin de son « président fondateur » est aujourd’hui atteint du virus de l’implosion en plusieurs morceaux. Il en découle le parti Convergence 2023 avec à sa tête l’éphémère président de l’Assemblée Nationale, Moussa Timbiné, qui s’est emparé d’un bon lot de la section commune V du parti, au détriment du président, Dr Bokary Tréta et du Secrétaire général intérimaire de la section, le maire Amadou Ouattara.
Selon certaines confidences, le nouveau parti de l’ancien député RPM de la commune V devrait batailler pour se positionner comme un allié politique du richissime Seydou Mamadou Coulibaly, parrain du mouvement Benkan, potentiel candidat à la prochaine élection présidentielle. De même, l’ancien ministre d’IBK, Moulaye Ahmed Boubacar, auparavant membre du Bureau politique national du RPM, vient de claquer la porte du parti du tisserand pour lancer le sien propre, le Parti malien pour le travail et la refondation (PMTR). Or, Moulaye Ahmed Boubacar était aussi récemment un des métronomes politique du staff du même Seydou Mamadou Coulibaly, qui ne cessait de débaucher au sein de différents états-majors-politiques.
Donc, le parrain du mouvement Benkan semble jeter son dévolu sur les principaux partis politiques du landernau pour constituer son appareil politique en vue de se lancer dans la course pour la conquête du palais de Koulouba. Mais, il semble que d’autres poids lourds du monde politico-associatifs ne cessent de faire des pieds et des mains pour affaiblir les partis politiques traditionnels en vue de se positionner lors de la prochaine élection présidentielle. Quid des militaires au pouvoir auxquels les observateurs prêtent des ambitions de vouloir se faire à la tête du pays ?
Il n’est pas exclu que le chef de la Transition nourrisse un discret désir de se lancer dans la course pour l’élection présidentielle de 2024. Tant le colonel Assimi Goïta ne cache pas sa détermination à faire prévaloir ses « idées et orientations stratégiques », pour un long temps, en vue de refonder l’Etat malien. Comment peut-il imprimer, impulser ces convictions sans diriger le pays ou y positionner l’un de ses hommes de confiances ? Lequel homme de confiance aura tout l’intérêt de voir les appareils politiques existants sérieusement affaiblis ou divisés. Car, comme un homme nouveau pourrait-il émerger à la tête de l’Etat quand des formations politiques comme l’ADEMA, le RPM, l’URD, la CODEM, le PARENA pourraient garder intactes leurs forces ?
En clair, le virus de la division ou de l’émiettement va devoir poursuivre son travail de destruction en mettant à dos les « camarades d’aujourd’hui». N’est-ce pas le fléau qui guette l’URD de feu Soumaïla Cissé, déjà fractionné entre deux tendances ? Même le M5-RFP, qui a contribué au renversement d’IBK, n’est-il pas touché par ce bicéphalisme ? Ce phénomène ne guette-t-il pas aussi l’ADEMA-PASJ, dont certains hauts cadres n’ont plus la conviction politique enracinée dans les idéaux des abeilles. Ces poids lourds comme Assarid Ag Imbarcaouane, l’actuel 1er vice-président du CNT (organe parlementaire de Transition) ne lorgnent-ils pas ailleurs pour préserver leurs « intérêts stratégiques » proches de ceux du pouvoir de Transition ?
Par ailleurs, lorsque la gouvernance de Transition ne se hâte que très lentement pour payer le financement public de l’Etat aux partis politiques, l’on comprend aisément que l’émiettement de ceux-ci ne dérange point. Au contraire… Surtout que cela peut aider à assouvir certaines…ambitions.
Boubou SIDIBE