Le « Parti démocratique de Côte d’Ivoire – Rassemblement démocratique africain (PDCI-RDA) a la profonde douleur » d’annoncer « le décès subit » d’Henri Konan Bédié, survenu « mardi (…) à Abidjan », indique le document.
« Il est décédé à la Polyclinique internationale Sainte Anne-Marie (PISAM) », avait déclaré plus tôt un membre de la communication de son parti.
La famille politique de l’ancien président salue dans le communiqué un « grand homme d’Etat, qui n’a épargné aucun sacrifice pour la paix en Côte d’Ivoire ».
Mardi soir, une foule commençait à se former devant sa résidence à Abidjan, a constaté une journaliste de l’AFP.
Chef de l’Etat de 1993 à 1999, Henri Konan Bédié n’avait pas exclu d’être candidat à la prochaine élection présidentielle en Côte d’Ivoire en 2025.
Il avait été désigné fin mars candidat unique à sa succession à la présidence du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI) – principal mouvement d’opposition et parti du premier président ivoirien, Félix Houphouët-Boigny -, dont l’élection est prévue lors du prochain congrès du parti en juin.
Henri Konan Bédié avait également été désigné candidat lors de la dernière élection présidentielle en 2020.
L’octogénaire avait su décourager toutes les tentatives de jeunes générations de le remplacer au sein de son parti.
Le « Sphinx »
Il était surnommé le « Sphinx », peut-être pour prendre une revanche contre le putsch qui l’a renversé en 1999, ou contre ceux qui l’accusent de ne pas avoir su gérer l’héritage du « père de l’indépendance » Félix Houphouët-Boigny.
Né le 5 mai 1934 dans le village de Dadiékro (centre) au sein d’une famille de planteurs de cacao, « HKB » se voulait l’héritier et le successeur d’Houphouët-Boigny, d’ethnie baoulé comme lui.
Ambassadeur à 26 ans, ministre de l’Economie à 32 ans, M. Bédié, dont la carrière avait connu un coup d’arrêt à cause d’accusations de corruption, avait su surmonter ces problèmes pour s’imposer comme le dauphin naturel d’Houphouët-Boigny et contrôler sans partage le mouvement fondé par son aîné, le PDCI.
Il lance à ce moment le concept de l’ivoirité pour écarter de la course à la présidence un certain Alassane Ouattara, dit « ADO » -l’actuel président ivoirien – accusé d’être Burkinabè. HKB s’était régulièrement aventuré sur ce terrain en fustigeant « les étrangers ».
Elu président en 1995 sans grande concurrence, il surfe sur le nationalisme mais sa présidence, minée par la corruption, s’effondre en quelques heures à Noël 1999 face à une mutinerie de soldats qui se transforme en putsch, le premier de l’histoire du pays.
Il voulait « sa revanche sur ce putsch mal géré. Et sur Ouattara, qu’il a soutenu (en 2010 et 2015) mais qui n’a pas selon lui respecté son engagement de lui redonner le pouvoir (en 2020) », estimait un observateur.
« Mais surtout », il ne voulait pas « rester dans l’Histoire comme celui qui a perdu le pouvoir du PDCI d’Houphouët », ajoutait-il.
« Fin tacticien »
« Il est responsable de tous les maux de ce pays », avait assuré sous couvert de l’anonymat un spécialiste de la communication. « C’est lui qui a introduit le ver de +l’ivoirité+ dans le fruit », déplorait-il, mentionnant « des violences intercommunautaires fréquentes.
Amateurs de cigares et de bons vins, HKB, que beaucoup décrivaient comme « très près de ses sous », s’était rapproché de son ancien ennemi Alassane Dramane Ouattara en 2005 pour créer le Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP), alliance électorale entre le parti de Ouattara et le PDCI.
Après une lune de miel avec le chef de l’Etat, qui avait fait baptiser le troisième pont d’Abidjan du nom de Bédié, HKB s’était à nouveau brouillé avec ADO en 2018, à cause de la présidentielle.
Un cadre du parti voyait en HKB « un fin tacticien qui a traversé toutes les tempêtes » et a su convaincre « les jeunes loups » du PDCI de le soutenir à nouveau