Pour la rue africaine, surtout celle francophone, la France est la puissance prédatrice. Bien que celle-ci y a, sans doute, des intérêts financiers loin d’être négligeables, il serait temps de prendre connaissance avec la réalité du terrain. L’hégémonie française dans ce qui est toujours considéré comme son pré-carré est surtout d’ordre culturel et diplomatique, non sans négliger des bénéfices sur le plan des investissements qui se font dépasser par de redoutables concurrents.
Aborder cet épineux sujet au sein de la masse populaire est un exercice périlleux. Pourtant, il n’est pas inexact de dire que la part économique de la France en Afrique n’est pas ce que l’on veut bien croire. Elle est loin d’être une puissance prédatrice et, sur un marché hautement concurrentiel, elle se fait dépasser par des pays dont des « alliés occidentaux » qui ne joueraient pas franc jeu avec elle. Dans les détails, depuis une vingtaine d’années, la France voit sa part de marché se réduire fortement en Afrique, singulièrement en celle francophone. Elle en a perdu près de la moitié passant de 12% à 7%. Un déclin qui se poursuit. Et c’est un ancien ministre français de l’Économie qui le dit en la personne de Hervé Gaymard dans un compte rendu de rapport : « Les exportations françaises ont doublé sur un marché qui a quadruplé, d’où une division par deux de nos parts de marché ». Dans les faits, il explique que les exportations françaises vers l’Afrique ont doublé dans un marché global qui a quadruplé.
Aujourd’hui, le recul économique français est encore plus prononcé en Afrique francophone. Elle perd des parts de marché au profit de l’Inde et de la Chine, et est en train de perdre la place de premier partenaire occidental économique du continent. Cette place sera très bientôt conquise par l’Allemagne. En réalité, la part de marché de la France en Afrique représente 7,35% loin derrière la Chine (27,75%) et très talonnée par l’Allemagne (6,57%) et les États-Unis (6,5%). Il s’agit là de chiffres donnés par l’Observatoire de la complexité économique.
Fait encore plus intéressant, c’est que ces pays mènent ce qui s’apparente à une guerre informationnelle cachée contre la France. L’idée que cette dernière soit toujours présentée comme l’ex puissance colonisatrice qui ne veut point laisser ses ex colonies jouir du fruit de leur économie comme elles l’entendent, arrangent grandement nombres de pays. Même si des données économiques démentent une telle réalité, les pays n’ont pas d’état d’âmes à profiter d’un tel discrédit. Les affaires sont les affaires !
Cependant, il semblerait que là où la France a le plus à perdre c’est sur son aura diplomatique sur le continent, et son image de grande puissance à l’international. La gestion calamiteuse des dossiers sahéliens pourrait être le coup de grâce d’une diplomatie qui n’aura jamais su garder une position de juste distance avec ses ex colonies. Entre double jeu, double langage, engagement militaire parfois non justifié, et une politique de deux poids deux mesures, la France saura-t-elle redorer son blason en Afrique, et au-delà dans le monde ?
Une étude sérieuse réalisée par l’institut IMMAR sous le nom de « baromètre des leaders d’opinions en Afrique » prouve que l’image de la France sur le continent se porte très mal. D’après cette étude, les États-Unis sont le pays qui jouit de la meilleure réputation, l’Allemagne dépasse de loin la France et arrive en deuxième position.