La situation dans laquelle se démêle le football malien depuis plusieurs années nous conduit à un constat amer : le manque de leadership dans le management de notre sport, le football notamment. Ceux qui aspirent à le ménager s’apparentent beaucoup plus à des mécènes, à des hommes providentiels qu’à de véritables leaders dotés d’une vision pour sortir des sentiers battus.
Pendant la campagne, nous avons entendu le soutien de l’un des candidats justifier son alliance par le fait que c’est «un homme providentiel» dont «l’expérience dans la gestion et le management doit profiter au football malien» ! Une déclaration qui prouve que nous avons réellement du chemin à faire pour un management efficace de notre sport, singulièrement du football.
Dans la phase actuelle de son développement, le football malien n’a pas besoin d’un homme providentiel (qui est plus un mécène qu’un manager), mais d’un vrai leader. Oui, d’un leader qui a une vision claire de sa mission comme Augustin Senghor (qui a supervisé l’assemblée générale de jeudi dernier au compte de la CAF) qui préside la Fédération sénégalaise de football depuis 2009 avec le résultat qui suscite aujourd’hui des envies sur tout notre continent. Un leader comme Samuel Eto’o Fils, l’ancien international camerounais qui dirige aujourd’hui la fédération de son pays et dont la volonté de l’assainir suscite beaucoup de crainte.
Quelle est la différence entre un leader et un homme providentiel ? Les spécialistes vous diront qu’il est «parfois difficile de faire la différence entre les deux». Selon la définition de différents dictionnaires, «un homme providentiel ou une femme providentielle est une personne considérée par un groupe ou une population ayant la capacité de les sauver d’une crise majeure. Cette crise peut être militaire, institutionnelle, politique, économique, sociale, sportive, morale».
«Un homme providentiel est un personnage qui apparaît dans les périodes de crises et qui se présente comme le sauveur ultime chargé d’une sorte de mission historique ou divine», a aussi défini l’historien Jean Garrigues, auteur de «Les hommes providentiels : histoire d’une fascination française» (Seuil, 2012). Malheureusement, les différents candidats à la présidence de notre fédération pouvaient se reconnaître dans cette définition.
Quant au leader, il est généralement défini comme un être «visionnaire». Selon nos maigres connaissances, «un bon leader est une personne qui vise grand et voit haut». Selon de nombreuses expertises, «le leader bénéficie d’une grandeur qui est due à une double confiance ; il a confiance dans la capacité de son entourage à l’aider dans ses missions et à lui fournir des contacts qui peuvent agir en tant que des hommes et des femmes de situation…». Sans compter qu’il est lui-même «convaincu de sa capacité de remonter les obstacles qui se présentent éventuellement et de réussir…».
Les leaders, les vrais, sont des gens qui ont une vision large et «une ouverture d’esprit essentiellement centrée sur une sensibilité et une générosité ; une sensibilité à l’environnement, car ils savent bien juger les ressources du milieu pour arriver à se modifier et à s’adapter, et aussi une sensibilité aux besoins de leur environnement et de leurs collaborateurs». Le leader n’a pas besoin d’argent ou de mauvaises pratiques qui jurent avec l’éthique et les valeurs du sport pour rassembler autour de lui ou pour neutraliser ses adversaires. Mais privilégie les idées, la force et la pertinence de sa vision… D’après ce qui nous a été enseigné lors des cours du MEMOS (Master en management des organisations sportives) et notre maigre expérience professionnelle, la rigueur, le sens de l’organisation, le leadership et le sens de l’écoute sont des qualités essentielles pour devenir manager sportif compétent.
La question du leadership dans le management du sport doit être étroitement liée à celle de l’éthique et de la moralité. Et cela d’autant plus que, au fond, le leader doit s’illustrer par ses référents éthique et moraux. Ce leadership affirmé et assumé aura incontestablement un effet stimulant et déclencheur sur la confiance qui un facteur important dans le management d’une fédération nationale sportive. Même si la liste ne pourrait pas être éventuellement longue, certains responsables de clubs maliens peuvent être de vrais leaders. A condition bien sûr qu’ils acceptent de s’affranchir des hommes providentiels et de se battre pour leur vision du développement de notre football.
Tout comme certains anciens internationaux peuvent incarner ce leadership dont notre football a plus que jamais besoin aujourd’hui. Nous ne parlons pas de ces girouettes qui ont récemment prouvé que leur soutien se monnaye, donc ne repose sur aucune conviction ou aucune valeur. Hier, ils étaient de fervents défenseurs du président de la Femafoot et réclamaient la tête du sélectionneur en place. Sans doute dans l’espoir de se faire une place dans le staff des Aigles du Mali. Et aujourd’hui, ils figurent parmi ceux qui détestent le plus l’homme pour ne pas avoir eu gain de cause. Le leadership c’est aussi la constance dans ses convictions, donc la fidélité et la loyauté !
Moussa Bolly