Le décret présidentiel signé par le colonel Assimi Goïta, il y a deux ans, le 6 juin 2022, allongeait la durée de la transition de 24 mois, à compter du 26 mars 2022. Cet engagement n’aura donc pas été respecté et l’élection présidentielle qui devait avoir lieu le mois dernier a été reportée. Il y a six mois, lors de l’annonce, Bamako évoquait un « léger report », mais à ce jour, aucune nouvelle date n’a été fixée.
La durée de la transition avait fait l’objet de difficiles négociations avec la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (Cédéao), mais depuis lors, le Mali a quitté l’organisation régionale et la tenue d’élections n’a fait l’objet d’aucune déclaration concrète récente de la part de Bamako. Et à vrai dire, plus personne ne s’y attend vraiment, du moins dans un court terme.
Les opposants qui souhaitent un retour à l’ordre constitutionnel démocratique, perçoivent cette situation comme une prise d’otages du pays par les colonels au pouvoir depuis maintenant près de quatre ans.
Les soutiens des autorités de transition plaident, quant à eux, pour le maintien du régime en place. Certains refusent même ouvertement la tenue d’élections qui seraient, à leurs yeux, « imposées ». Reste à voir si les autorités maliennes de transition prendront la peine de « formaliser » cette situation, si la Cour constitutionnelle réagira d’elle-même ou si la transition se poursuivra comme si de rien n’était.
« On leur a confié une mission »
Hamman Touré est le président du Msat, une organisation qui soutient les autorités maliennes de transition et, tout particulièrement, le colonel Assimi Goïta. Pour lui, le maintien au pouvoir de ces autorités et la prolongation, de fait, de la période de transition, ne le gênent absolument pas.
Au contraire, Hamman Touré y voit une forme de nécessité du fait de la menace terroriste qui pèse toujours sur le Mali. « Moi, ça ne me gêne pas du tout parce qu’on leur a confié une mission. Ils n’ont pas terminé, donc donnons-leur le temps de terminer ! Nous voulons la transition dans ce pays parce que nous voulons la tranquillité. Ceux qui sont là n’ont pas failli, ils sont en train de bien gouverner. Dès que le territoire sera libéré, pourquoi pas les élections ? Mais chaque jour, on entend qu’il y a eu des tueries, des attaques. Les élections [sont importantes, NDLR], c’est vrai, mais ce qui se passe sur le terrain, tout le monde en est témoin ! Vous pensez que si nous partons aux élections, ceux qui vont venir [qui seront élus, NDLR] ne vont pas rencontrer les mêmes problèmes ? Qui est plus apte qu’un militaire pour la sécurité, qui ? Est-ce qu’il y a mieux ? Soyons tranquilles, ayons confiance en nos autorités. Lorsque le territoire sera libre et que la sécurité de nos populations sera en ordre, c’est à ce moment qu’il y aura la fin de la transition. »
« Les Maliens veulent élire leur président »
Un avis que ne partage pas Hamza Bechir Sow, de la coalition Jiguiya Koura. Il est l’un des porte-parole de la Synergie d’action pour le Mali, qui rassemble les partis politiques et organisations de la société civile opposés aux actuelles autorités de transition.
« Cette situation devient de plus en plus intenable. Beaucoup de voix commencent à se lever, déjà. On espère que, à l’instar de ce qui s’est passé au Sénégal avec le Conseil constitutionnel qui a imposé à Macky Sall d’organiser les élections, nos chevronnés magistrats vont tout faire pour que ces élections se tiennent et qu’on puisse avoir une transition civile au-delà du 26 mars. Cela ne peut pas continuer ! Il y a les délestages qui deviennent chroniques, l’insécurité, la cherté de la vie… On a tellement de problèmes ! Cette équipe a montré ses limites. Cela fait déjà presque quatre ans qu’elle est au pouvoir. Les Maliens n’aspirent qu’à aller choisir leur président, les Maliens veulent élire démocratiquement leur président pour entamer un nouveau départ pour ce pays. »