Parti en Algérie à l’invitation des autorités de ce pays afin d’assister à l’inauguration d’une mosquée, d’un centre de formation et pour des soins de santé, l’Imam de Badalabougou, poussé à l’exil, est persona non grata au Mali, alors que l’Algérie le vénère et le fait passer pour un homme de paix et de dialogue. Toutes ses sorties publiques en Algérie, sous haute sécurité, est scrutée à la loupe tant par ses sympathisants que par ses adversaires politiques que sont les autorités de la transition. C’est pourquoi il a fait l’objet d’une cabale médiatique de la part des autorités qui le font passer pour une personnalité subversive et personnage clivant. Ce jugement est aux antipodes de celui des autorités algériennes qui trouvent l’imam Dicko sage et homme de paix et de dialogue et comptent sur lui pour ramener la paix entre l’Algérie et le Mali. Qui de Tebboune ou d’Assimi a-t-il un jugement erroné sur l’Imam Dicko ?
C’est à Alger que l’Imam Dicko observe à distance le développement de l’actualité politico-sociale de son pays, le Mali. Il est à coup sûr inquiet de la tournure que les événements sont en train de prendre. La Coordination des Mouvements Associations et Sympathisants de l’Imam Dicko, CMAS dont il est le parrain et l’autorité morale, a été dissoute. Avant ce mouvement c’est d’autres qui ont été dissouts à l’image du PSDA, de l’observatoire des élections et de la bonne gouvernance, du Mouvement Kaoural International. La dernière dissolution en date est celle de l’Association des Elèves et Etudiants du Mali, AEEM. Tous ces événements se passent sous le regard attentif, impuissant et méditatif de l’Imam et prouvent à suffisance que la situation est délétère, c’est pourquoi, il est fort à parier que ses partisans lui auraient conseillé de prolonger son séjour algérien en attendant que la situation se normalise. A en juger par les propos qui sont tenus en longueur de journée contre l’Imam, il semble être dans l’œil du cyclone des autorités qui n’hésiteraient pas à l’arrêter dès qu’il mettra pied au Mali. Pourquoi les autorités maliennes persécutent tant l’Imam alors même qu’il était la pièce maitresse du Mouvement qui est arrivé à bout du régime IBK ? La réponse se trouverait certainement dans cette affirmation selon laquelle la lutte unit, mais le pouvoir divise. En tous les cas les observateurs éloignés de la scène politique malienne ont du mal à comprendre cette profonde dissension entre les autorités de la transition et l’Imam Dicko.
Quant aux autorités algériennes, elles ne semblent pas avoir la même grille de lecture que celles du Mali sur l’Imam Dicko. Pour Tebboune l’Imam Dicko est un personnage charismatique et capable de jouer un rôle important dans le rapprochement de deux peuples et pour une paix durable. Les autorités algériennes se disent convaincues qu’en impliquant Mahmoud Dicko dans les conflits qui opposent les autorités maliennes aux ex rebelles Touaregs, l’on trouvera une issue heureuse. C’est certainement fort de cette conviction que les autorités algériennes n’ont pas hésité à dérouler le tapis rouge devant l’Imam Dicko. Il a été vu à la grande mosquée d’Alger pour la prière du vendredi. Chose curieuse au sortir de la mosquée, comme une méga star, ce sont de dizaines d’algériens tous âges confondus qui ont accepté de s’afficher avec la personnalité controversée au Mali, mais adulé en Algérie et n’ont pas hésité à prendre des photos avec lui.
En somme, qu’on l’aime ou qu’on le déteste, l’imam Dicko est et demeure une grande figure de l’histoire récente du Mali. Son apport dans la chute du régime corrompu d’IBK a été d’autant plus grand que les observateurs avisés de la scène politique n’ont pas manqué d’affirmer que sans son implication que le régime IBK n’allait jamais tomber. Puis que la révolution a toujours mangé ses dignes fils, l’Imam en est certainement victime.
Youssouf Sissoko