Lentement, mais surement l’on s’achemine vers une prolongation du délai de la transition ou du moins vers l’adoption d’un nouveau chronogramme. Celui qui est en vigueur étant désormais désuet, il est désormais impossible de tenir le referendum. Pour preuve les démembrements de l’Autorité Indépendante de Gestion des Elections, AIGE qui aurait dû être terminé six mois avant les scrutins, ne sont pas mis en place, l’avant-projet de la nouvelle Constitution n’est toujours pas devenu un projet avant d’être soumis au peuple par un referendum qui serait organisé au mois de mars, l’insécurité galope et l’argent le nerf de la guerre se fait rare. Au regard de ce qui précède on pourrait affirmer sans risque de se tromper que tous les ingrédients sont réunis pour la non- tenue des élections au Mali d’ici février 2024. Dans ce cas de figure quelles pourraient être les conséquences ?
La tenue du referendum autour de la nouvelle Constitution est prévue pour le 19 mars 2023, selon le chronogramme établi par le gouvernement. Ce premier test électoral du Gouvernement Assimi Goïta devrait être précédé par la réunion des conditions matérielles, financières, techniques et humaines pour la réussite du premier scrutin sous la transition. Mais jusque-là le progrès constaté est en deçà de ce espéré, malgré la mise en place de la commission chargée de peaufiner l’avant-projet de la nouvelle constitution. Donc on tend vers un glissement pour ne pas dire une quasi impossibilité de tenir toutes les élections d’ici février 2024. En arrivant au mois de mars 2024 sans un nouveau président démocratiquement élu, les autorités de la transition plongeraient le Mali dans une impasse et l’équation à résoudre serait à mille inconnues que ni ce gouvernement incompétent, ni les soutiens factices, encore moins les partisans d’une transition prolongée ne pourraient résoudre. Le Mali subirait du coup trois grandes conséquences.
Les premières conséquences seraient celles relatives aux sanctions de la communauté internationale y compris la CEDEAO
Après s’être engagé à respecter un délai de 24 mois de transition, les autorités maliennes n’auront aucune excuse en remettant en cause ce temps pour quelque raison que ce soit. Donc par conséquent elles s’exposent à des nouvelles sanctions, qui peuvent être le gel des avoirs du Mali, la fermeture des frontières aériennes et terrestres, l’interdiction de voyager pour les autorités de la transition. Ces mesures pourraient avoir comme conséquences le renchérissement des prix des denrées de première nécessité, l’exacerbation de la crise sociale, l’isolement diplomatique dans la sous-région, et même pour le reste du monde, la tension sociopolitique.
La deuxième conséquence serait consécutive au jugement de l’opinion nationale
L’opinion nationale ne comprendra pas une énième prolongation de la transition, elle qui a pourtant soutenu sans ambages les autorités et avait fait sienne toutes les décisions prises par les gouvernants de la transition. Elle aurait du mal à comprendre que les autorités ne respecteraient pas encore leurs engagements vis-à-vis de la communauté internationale et nationale, concernant le délai de la transition. Par conséquent elle pourrait désobéir, voir organiser la résistance pour demander le départ sans délai des autorités pour incompétence notoire à répondre aux attentes du peuple qui souffre le martyre à cause de l’inflation, de l’isolement diplomatique et économique et surtout de mesures prises par la CEDEAO quin pourraient impacter négativement sur les populations.
La troisième conséquence du non-respect du délai de la transition serait le conflit d’intérêts entre les tenants actuels du pouvoir
Il n’est nullement à exclure que plus la transition dure et que plus les problèmes se multiplient sans solution que les tenants actuels du pouvoir se jettent la responsabilité et s’accusent mutuellement. Une telle situation pourrait engendrer une sorte de front comme nous l’avions vu sous IBK, lequel front pourrait réunir tous les blasés de la République. Donc l’unité de façade que l’on voit au sommet de l’Etat risque de voler en éclats pour laisser place à une lutte fratricide surtout quand les intérêts sont menacés, voire divergents. Le Mali ne serait pas à l’abri du scénario du 18 Août 2020, car les mêmes causes pourraient produire les mêmes effets. Une insurrection populaire pourrait donner des idées à un autre groupe des militaires, la suite est à deviner.
En somme, les autorités de la transition ont tout à gagner en respectant le délai imparti pour la fin de la transition. Elles pourront revoir le chronogramme en se limitant à l’organisation de deux élections, la présidentielle et les législatives.
Youssouf Sissoko