En lisant et relisant, l’entretien accordé par le Président de la République, Macky Sall, au média américain Associated Press, je ne puis m’empêcher de songer à cette phrase de Bossuet :”“Dieu se rit des hommes qui se plaignent des conséquences alors qu’ils en chérissent les causes.” Macky Sall, dans cet entretien, dit vouloir éviter que le pays ne sombre dans de grandes difficultés après son départ. “Je dis maintenant que je vais travailler pour l’apaisement, pour des conditions qui permettront au pays d’être paisible”, déclare-t-il.
Pourtant le chaos est déjà là, et il est entièrement la conséquence du discours du 3 février, jour où le chef de l’État a décidé unilatéralement de reporter sine die l’élection présidentielle, avant que quelques jours plus tard, le Parlement ne valide le 15 décembre 2024 comme date du prochain scrutin présidentiel.
Avant ces deux coups de théâtre, les Sénégalais se préparaient tranquillement à vivre au rythme de la campagne pour cette élection qui s’annonçait la plus indécise de l’histoire, en l’absence du candidat sortant et de l’homme politique le plus populaire de l’opposition. Le discours du 3 février a mis le feu aux poudres et les éléments de langage du camp présidentiel – “l’initiative est venue du Parlement” – ne peuvent pas occulter cette réalité. Le Parlement a toujours été godillot au Sénégal, obéissant au doigt et à l’œil du chef de l’État.
En prenant l’initiative lourde et inédite de reporter l’élection présidentielle, Macky Sall a ouvert une boîte de Pandore et le Sénégal déplore déjà trois morts.
Que faire maintenant ?
Il est clair que la présidentielle ne peut plus se tenir le 25 février, ce qui est la principale revendication de l’opposition et de la société civile. Nous voilà donc dans une impasse.
Pour sortir de ce cul-de-sac, celui qui nous y a mené a trouvé deux expressions magiques qui, soit dit en passant, sonnent comme une victoire pour Alioune Tine : “dialogue inclusif” et “élection inclusive”.
On comprend bien que derrière cette novlangue, se cache en réalité – les développements d’hier en sont l’illustration- l’éventuelle libération de Ousmane Sonko. Là encore le Président de la République doit sans doute dérouter le plus convaincu de ses partisans. Car, il n’y a même pas trois mois, voilà ce qu’il disait, dans les colonnes de Jeune Afrique, de celui dont il ne voulait même pas prononcer le nom : “Ceux qui veulent l’anarchie et le chaos pour assouvir leurs ambitions me trouveront sur leur chemin. De soi-disant militants de son parti (PASTEF) ont tué des femmes innocentes en lançant des cocktails Molotov contre un bus de transport public dont ils avaient bloqué la porte. Et on va manifester pour la libération de personnes qui ont commis ces atrocités ? Vraiment, je n’ai aucun regret : tout ce qui a été fait l’a été selon les normes démocratiques les plus élevées. Force doit rester à la loi”.
Décidément, les voies de Macky Sall sont impénétrables…