Décidément le pays de la Teranga ne finit jamais de surprendre tant dans le bon comme dans le mauvais sens. Connu pour être ce pays stable et un bon modèle de démocratie et de l’Etat de droit, le Sénégal a failli être atteint par le syndrome des coups d’Etat qui a pignon sur rue dans trois des pays partageant le même espace sous régional que lui. L’affaire de l’opposant Ousmane Sonko a failli ébranler tous les fondements de la démocratie et l’état de droit au Sénégal. En effet, ce téméraire homme politique sénégalais qui avait été donné pour mort, politiquement parlant, après la dissolution de son parti, son emprisonnement et sa radiation de la liste électorale, vient d’être réhabilité par la justice au grand dam de son ennemi juré Macky Sall. Cette victoire a été rendue possible grâce à la maturité du peuple sénégalais, à l’indépendance de sa justice et au sens républicain de son armée. Est-ce la fin sans gloire du règne du président sortant Macky Sall qui a voulu instrumentaliser l’appareil judiciaire et qui vient d’être désavoué par cette même justice ? Le Sénégal ne vient-il pas de donner une leçon de démocratie, d’indépendance de la justice et de l’état droit à certains pays de la sous-région ouest africaine en proie à la rupture constitutionnelle ? La justice sénégalaise va-t-elle se dédire avec le probable pourvoit en cassation ?
Comme un coup de tonnerre à Dakar, la nouvelle de la réintégration sur la liste électorale de l’opposant politique sénégalais Ousmane Sonko par la justice a été accueillie avec soulagement, mais aussi avec prudence par ses nombreux partisans. C’est, certes une précieuse victoire d’étape, mais pas la fin du feuilleton judiciaire, car l’Etat peut encore décider de se pourvoir en cassation. En effet, le tribunal d’instance de Dakar a ordonné le jeudi 14 décembre 2023, la réintégration de l’opposant Sonko dans les listes électorales. En prison depuis le mois de juillet pour atteinte à la sécurité de l’Etat, association de malfaiteurs et radié de la liste électorale, ce qui allait faire de lui un non partant officiel à la course pour la présidentielle, Ousmane Sonko vient de franchir un obstacle crucial sur sa route pour le palais présidentiel. Macky Sall a tout tenté pour éliminer le plus virulent et le plus téméraire de ses opposants. Non seulement par le truchement de la justice, mais aussi et surtout par une tentative d’empoisonnement. Comme si cela ne suffisait pas il a vu son parti les PASTEF rayer des registres des partis politiques au Sénégal. Ce dernier acte était considéré par Macky Sall et ses partisans comme le dernier coup fatal qu’ils viennent de donner à un homme politique agonisant et qui mettrait fin à tout espoir et à toute velléité présidentielle. C’est grâce à la détermination de ses partisans, à son opiniâtreté, à l’indépendance de la justice que Ousmane Sonko vient d’arracher une précieuse victoire qui le met non seulement en scelle, mais aussi et surtout fait de lui l’un des plus grands favoris de la prochaine présidentielle sénégalaise prévue en 2024 et de surcroit le probable successeur de Macky Sall.
La justice sénégalaise, après cette prouesse va-t-elle se dédire après le probable pourvoit en cassation de l’Etat sénégalais? La réponse est certainement non surtout quand on sait et mesure l’impact que sa décision a fait en termes de soulagement et la réputation de justice indépendante qu’elle a engendrée dans une sous-région où la justice est aux ordres du prince régnant. Par cette décision la justice sénégalaise a redoré son blason, donc elle doit éviter de ternir son image en se contredisant.
Est-ce la fin sans gloire du règne du président sortant Macky Sall qui a voulu instrumentaliser l’appareil judiciaire et qui vient d’être désavoué par cette même justice ?
Le ¨Président sénégalais en fin de mandat aura cette tache noire sur ses glorieuses pages, celle d’avoir occasionné la mort des dizaines de sénégalais à cause de ses ambitions personnelles. Le pêché d’Israël de Sonko a été sans nul doute de s’opposer à un troisième mandat du président sortant. Ce dernier a fini par céder sous la pression de la rue avec le leadership de Sonko. Ainsi pour faire payer à Sonko son opposition à la réalisation de cette prétention du Président sortant, Macky Sall a instrumentalisé la justice sénégalaise à qui il avait intimé l’ordre et assigné la mission commandée de barrer la route de la présidentielle à Sonko. Après avoir cédé dans un premier temps aux caprices de Macky Sall, la justice sénégalaise a fini par prendre ses responsabilités face au peuple sénégalais et face à l’histoire en réhabilitant Sonko. Le Président Macky Sall est désormais devenu un lion sans griffes, ni dents surtout qu’il ne lui reste plus que quelques mois au pouvoir. Si son bilan, en termes d’infrastructures, est nettement appréciable, il semble pécher dans la construction et la promotion de la démocratie et de l’état de droits. Sa main est tachée de sang des innocents et il aura sur sa conscience la mort de nombreux manifestants. La question qui taraude tous les esprits est celle qui consiste à dire est si Sonko devenait président va-t-il se venger de son prédécesseur comme on en a vu ailleurs?
Le Sénégal ne vient-il pas de donner une leçon de démocratie, d’indépendance de la justice et de l’état droit à certains pays de la sous-région ouest africaine en proie à la rupture constitutionnelle ?
Tard vaut mieux que jamais. Après avoir trébuché à plusieurs reprises en rendant des verdicts scélérats, la justice sénégalaise a fini par se ressaisir en écoutant la voix du peuple, pour qui d’ailleurs la justice est rendue. Elle vient pour l’instant, sous réserve d’un retournement spectaculaire de situation, de donner une leçon de morale et d’indépendance aux autres justices inféodées aux princes régnants. Elle vient d’écrire une autre page glorieuse de l’histoire de la justice sénégalaise. Si pour beaucoup d’observateurs la justice semble faire sa propre introspection en se projetant vers l’avenir, pour d’autres elle a fait preuve de maturité et d’objectivité. Dans tous les cas de figure c’est la démocratie et l’état de droit sénégalais qui gagnent.
En somme, le peuple sénégalais vient encore de prouver sa grandeur. Qu’il soit dit en passant la stabilité et la solidité de ses institutions feront sans nul doute des émules. Le Sénégal garde son statut de pays en peloton de tête tant en termes de bonne destination qu’en termes d’encrage de la démocratie et surtout de l’état de droit.
Youssouf Sissoko