Près de six mois après l’imbroglio politico-judiciaire autour de la rocambolesque affaire des 49 soldats ivoiriens, on tend vers un dénouement heureux au grand bonheur des deux peuples frères maliens et ivoiriens. Cette affaire qui n’a que trop duré a empoisonné les relations fraternelles et séculaires entre deux pays liés par la géographie, l’histoire, l’économie, la culture et la sociologie. Un mémorandum qui servira de base pour la libération des 46 soldats ivoiriens a été signé le jeudi 22 décembre 2022 entre la délégation ivoiro- togolaise conduite par le ministre d’Etat, ministre de la Défense Téné Birahima Ouattara et les autorités maliennes. Les deux pays n’ont-ils pas perdu suffisamment de temps avant d’accorder leurs violons dans une affaire où ils avaient tout à perdre ? Est-ce le début d’un nouveau raffermissement des relations diplomatiques entre Abidjan et Bamako ?
Enfin la fumée blanche va jaillir si ce n’est déjà fait, annonçant la libération des 46 soldats ivoiriens, considérés comme des mercenaires par les autorités maliennes et détenus depuis plus de 5 mois à Bamako. En effet, une délégation ivoiro-togolaise conduite par le ministre ivoirien de la Défense a été reçue en audience le jeudi par le Président de la Transition, le colonel Assimi Goïta. Ce dernier avait à ses côtés le ministre des Affaires étrangères et de la coopération internationale, Abdoulaye Diop, ainsi que le ministre d’Etat, ministre de l’Administration Territoriale et de la Décentralisation, le Colonel Abdoulaye Maiga.
Si aucun communiqué n’a sanctionné la rencontre la délégation ivoirienne avait le sourire aux lèvres et son chef a lâché quelques mots à sa sortie d’audience : « Comme vous le savez, il y a eu un malentendu entre la République du Mali et celle de la Côte d’Ivoire, il y a de cela quelques mois. Il était bon que nous puissions nous rencontrer pour en parler. C’est ce que nous avons fait avec nos frères maliens et le Président Assimi Goïta nous a fait l’honneur de nous recevoir pour que je puisse lui transmettre le message du Président Alassane Ouattara », a déclaré à la presse, Téné Birahima Ouattara ministre d’Etat, ministre de la défense ivoirienne. Il a même ajouté que la rencontre s’est passée dans un esprit fraternel et de compréhension mutuelle ». Pour rappel les propos tenus par le chef de la délégation, tout comme l’atmosphère bon enfant qui a été celle du ministre d’Etat ministre de la défense ivoirienne contrastent non seulement avec l’attitude de la précédente délégation qui était venue négocier la libération des soldats, mais aussi et surtout présagent d’un dénouement heureux, surtout qu’un mémorandum a couronné la rencontre entre les deux délégations.
Les deux pays n’ont-ils pas perdu suffisamment de temps avant d’accorder leurs violons dans une affaire où ils avaient tout à perdre ?
Cette question mériterait d’être posée quand on sait les liens séculaires et fraternels qui unissent les deux pays et de surcroit les deux peuples. Une mauvaise lecture de toutes les deux parties à contribuer à l’exacerbation de la crise. Le Président Ivoirien Alassane Ouattara qui aurait dû parler à ses enfants que sont les cinq colonels dans un ton empreint de courtoisie parentale qui sied en cette circonstance, a plutôt cédé à la passion en menaçant les autorités maliennes. Ce qui a, semble-t-il, poussé les autorités maliennes dans leur orgueil et ont opposé un niet catégorique à toutes les sollicitations de la CEDEAO, bien sûr en mesurant toutes les conséquences. Car fortes de leur soutien populaire, les autorités maliennes, ont voulu jouer jusqu’au bout en brandissant la fibre patriotique, un slogan qui a véritablement fait ces effets, car en dépit de l’embargo financier le peuple semble rester derrière ses autorités. Mais puisse qu’un peuple ne vit pas que de slogan, acculé par la crise socio-financière, elles ont fini par mettre beaucoup d’eau dans leur Gnamakou Dji quand elles se sont rendu compte qu’elles ne peuvent plus tenir la baraque. Donc Alassane Ouattara, sous la pression de l’opinion ivoirienne et Assimi Goïta asphyxié financièrement en avaient tous assez de la situation. C’est pourquoi ils sont parvenus à ce compromis sans compromission.
Est-ce le début d’un nouveau raffermissement des relations diplomatiques entre Abidjan et Bamako ?
Nous osons espérer que ce serait le début d’une nouvelle ère dans les relations diplomatiques entre le Mali et la Côte d’Ivoire au grand bonheur de deux peuples. Il est à parier qu’après cet heureux dénouement, les lignes vont bouger dans d’autres domaines. En tous les cas tous les experts s’accordent à dire que les deux pays ont beaucoup plus à perdre en se brouillant, car en plus du port d’Abidjan qui de par sa capacité sert les commerçants maliens, le pays accueille plus de 5 millions de maliens dont la contribution aux budgets de deux pays est énorme. Doit-on cracher sur ces avantages pour un oui ou un non ? C’est pourquoi nombreux étaient les observateurs de la scène politique sous régionale, à se poser la question de savoir, à qui profite cette crise ivoiro-malienne ? Les deux pays doivent panser la plaie rapidement afin de reconstruire, sinon reprendre la coopération bilatérale rompue, surtout qu’au-delà de nos relations de voisinage, nos deux pays appartiennent au même ensemble économique qu’est la CEDEAO.
Youssouf Sissoko