Tous les regards étaient rivés sur Kidal, reléguant souvent au second plan tous les déboires que les maliens dans leur écrasante majorité subissent au quotidien. De la coupure intempestive d’électricité, à la pauvreté ambiante en passant par la paralysie de l’économie, les maliens ont été on ne peut plus résilients à tous égards. Ils se sont privés de leurs droits les plus élémentaires pourvu que Kidal revienne dans le giron de l’Etat malien, ce qui est une réalité depuis le mardi 14 novembre 2023. L’euphorie, voire l’hystérie populaire a atteint son comble de Kayes à Kidal en passant par Koulikoro, Sikasso, Ségou, Mopti, Tombouctou et Gao. Jamais une nouvelle n’a été accueillie dans la plus grande ferveur que la reprise de Kidal, faisant ainsi du Président de la Transition un héros. Les autorités de la transition vont-elles faire face aux énormes défis qui assaillent le Mali et son résilient peuple ? Quelle pourrait être la suite de la reprise de Kidal par les autorités de la transition ?
Pendant plus de 72 heures les maliens dans leur écrasante majorité ont fêté avec enthousiasme et fierté la reprise que d’aucuns qualifient de libération de la ville de Kidal. Cette précieuse victoire qui a été pendant plus de 11 ans un rêve, voire une illusion, est- à l’actif du résilient peuple d’abord, qui dans un élan patriotique a consenti d’énormes sacrifices pour soutenir les autorités, ensuite aux autorités elles-mêmes qui y ont cru et enfin à la vaillance des forces de défense et de sécurité qui ont tenu en dépit d’un environnement hostile. L’affaire est désormais dans le sac, sans triomphalisme, le Mali a retrouvé une partie de son territoire, place maintenant à la gestion du difficile quotidien. Les maliens attendent qu’on leur fasse des propositions de solutions à leurs nombreuses difficultés, bref à leur train-train quotidien qui commence à être insupportable. L’euphorie de la victoire du 14 novembre est, sans nul doute, en train de s’éteindre à petit feu dans l’angoisse du quotidien des citoyens qui ne savent plus où mettre la tête. Les autorités de la transition vont-elles rapidement comprendre que derrière cette accalmie apparente se cache une tempête ? Elles doivent prendre le taureau par ses cornes en parant au plus pressé
Les autorités de la transition vont-elles faire face aux énormes défis qui assaillent le Mali et son résilient peuple ?
En effet, le Colonel Assimi Goita, le héros du 14 novembre doit également comprendre que le soutien du peuple malien n’aura de sens que lorsque ce résilient peuple verra ses conditions sociales et économiques s’améliorer, or la situation socioéconomique va de mal en pire. Les autorités doivent faire face au difficile combat pour l’amélioration des conditions sociales et économiques afin de consolider les acquis militaires sur le terrain. La reprise de Kidal, loin d’être une fin en soi, ne doit être que le début d’un long processus d’unification, de pacification et de cohésion donc elle ne saurait être ni un fonds de commerce politique, encore moins la victoire d’un malien sur une autre. Il urge aujourd’hui pour les autorités de trouver des solutions idoines aux énormes défis qui plombent la vie socioéconomique des citoyens. L’électricité, sources de revenus de la majeure partie des populations, est devenue une denrée rare, annihilant tous les efforts que fournissent les citoyens pour la résolution du quotidien. Tous ceux dont l’activité est liée à l’électricité ont vu leurs revenus chuter drastiquement, aggravant la pauvreté. Que dire du secteur industriel, qui vivote faute d’électricité et même ceux qui ont acquis des groupes électrogènes ont vu leurs chiffres d’affaires chuté à cause des charges liées au carburant. Il n y a malheureusement pas le secteur énergétique seul qui fait souffrir les maliens, mais c’est la situation économique de façon générale qui est chaotique. Aucune perspective, aucune alternative, car l’argent qui est le nerf de la guerre est devenu une denrée rare. Il y a comme un embargo financier qui continue de s’abattre sur le Mali. Le constat est que les partenaires financiers se méfient du Mali à cause de sa situation politico-sécuritaire, voire des choix des partenaires que les autorités ont faits. Les finances ne tiennent que par les impôts et les douanes. Ces deux vaches laitières pour renflouer les caisses de l’Etat procèdent souvent par harcèlement et pression fiscale, poussant souvent certaines entreprises à mettre la clé sous le paillasson
Quelle pourrait être la suite de la reprise de Kidal par les autorités de la transition ?
La suite après la reprise de Kidal, c’est d’abord la consolidation des acquis, ensuite l’amélioration des conditions de vie des maliens et cela de Kayes à Kidal et enfin le rassemblement des maliens afin de convenir d’un minimum de programme qui indiquera la voix à suivre pour sortir de cet imbroglio qu’est la transition. Les autorités doivent rapidement prendre conscience de l’énormité, voire de la gravité de la crise multidimensionnelle à laquelle le Mali est confronté et parer au plus pressé pour non seulement éviter que la crise ne s’aggrave, mais aussi et surtout que le réveil du peuple ne soit pas brutal.
Youssouf Sissoko