Acteur incontournable de la diplomatie mondiale pendant la guerre froide, M. Kissinger « est mort aujourd’hui dans sa maison du Connecticut », a indiqué son cabinet de conseil Kissinger Associates dans un communiqué, sans préciser la raison du décès.
Initiant le rapprochement avec Moscou et Pékin dans les années 70, il a vu son image ternie par des pages sombres de l’histoire des Etats-Unis, comme le soutien au coup d’Etat de 1973 au Chili ou l’invasion du Timor oriental en 1975 et, bien sûr, la guerre du Vietnam.
Diplomate aussi écouté que controversé, l’homme à la voix rocailleuse et à la corpulence croissant avec les années aimait distiller ses pensées aux journalistes et dans les colloques internationaux. Fascinant ses publics par sa longévité et sa vaste expérience, il était admiré par les uns comme un grand sage, détesté par les autres qui voyaient en lui un criminel de guerre.
L’homme, qui avait fêté ses 100 ans en mai, avait conservé l’oreille des grands de ce monde, bien des décennies après après avoir quitté ses responsabilités dans les affaires internationales. Il s’était par exemple rendu à Pékin en juillet pour s’entretenir avec le président chinois Xi Jinping.
Juif allemand né en 1923 en Bavière, Heinz Alfred Kissinger a été naturalisé américain à l’âge de 20 ans. Fils d’instituteur, il a intégré le contre-espionnage militaire et l’armée américaine avant de poursuivre de brillantes études à Harvard, où il a également enseigné.
Reconnaissable à sa grosse monture de lunettes, il s’est imposé comme le visage de la diplomatie mondiale lorsque le républicain Richard Nixon l’a appellé à la Maison Blanche en 1969 comme conseiller à la sécurité nationale, puis comme secrétaire d’Etat — il cumula les deux postes de 1973 à 1975, et reste maîtra de la diplomatie sous Gerald Ford jusqu’en 1977.
C’est alors qu’il lança la détente avec l’Union soviétique et le dégel des relations avec la Chine de Mao, lors de voyages secrets pour organiser la visite historique de Nixon à Pékin en 1972.
Il mena aussi, toujours dans le plus grand secret et parallèlement aux bombardements de Hanoï, des négociations avec Le Duc Tho pour mettre fin à la guerre du Vietnam. La signature d’un cessez-le-feu lui a valu le prix Nobel de la paix avec le Nord-Vietnamien en 1973, l’un des plus controversés dans l’histoire du Nobel.