Refonder avec de nouvelles fondations aussi fébriles que Tartuffes. Est-ce à cela que se résume le Mali Koura de nos rêves ? En tout cas, en plus de ne pas valoir la chandelle, le jeu pourrait conduire cette fois le pays sur un sable mouvant, au risque de l’engloutir devant des fils qui s’érigent en prophètes n’ayant cependant que des prophéties erronées et anachroniques.
De la violation de l’Etat de droit à la déstructuration à dessein de la sphère sociopolitique et religieuse en passant par la volonté d’un retour aux sources biaisé et instrumentalisé, on s’achemine inexorablement, par un débat cacophonique entre patriotes autoproclamés « Force du changement » et soi-disant apatrides « Force du mal », vers une refondation n’ayant d’ennemi que son propre reflet. Faute d’une once de symbiose nationale puisque manifestement au Mali le temps du dialogue franc et sincère est enterré six pieds sous terre, tandis que celui de se dire la vérité se retrouve dans une infernale captivité avec comme geôlier ces faux prophètes qui ne règnent que par le musèlement des plus avisés et l’obnubilation de la conscience de plus crédules qui, rongés par un profond désespoir, retrouvent un espoir frivole dans toutes sortes de promesses démagogiques. S’en trouvera-t-il une voix assez audacieuse pour dire à ces faux prophètes qu’un retour propagandiste aux sources est juste jactance et chimérique quand l’assimilation et l’acculturation ont atteint le summum, qu’à force de faire parler l’arme sur un terrain réservé à l’intelligentsia on risque de se retrouver dans un cycle interminable de ce que notre loi suprême appelle crime imprescriptible, que l’art de gérer la cité n’est nullement l’art de l’endormir pour la piller, que la quête céleste ne s’accoquine pas avec un malheureux et pervers concours de berner la foi des âmes charitables.
La vérité est qu’au pays de Modibo Keita on veut tous s’illustrer pour l’éternité, oubliant très souvent que l’histoire, faute d’ouvrir sa porte à tout le monde, piège ceux qui veulent par ruse et cupidité sauter par le mur pour se retrouver par la suite dans l’arrière-cour réservée aux médiocres.