Partie pour 18 mois avec le Colonel à la retraite Bah N’Daou, ensuite pour 24 mois après la rectification, entendez par là le deuxième coup d’Etat perpétré par les mêmes auteurs avec à leur tête le Colonel Assimi Goita, nul ne saurait aujourd’hui pronostiquer sur la fin de la transition malienne. Pour preuve c’est à quelques encablures de la fin de ce deuxième délai que l’opinion nationale et internationale a été informée d’un léger report par les autorités de la transition, plongeant du coup le pays dans une impasse politique et une incertitude totale. Le Mali, à travers cette transition, est en train d’écrire une nouvelle page de l’histoire des transitions en Afrique et même à travers le monde, tant par sa longueur que par son contenu qui ne présagent nullement d’un lendemain meilleur pour le pays. Pour rappel, si une nouvelle Constitution a été adoptée par le peuple à travers un référendum, cette nouvelle loi fondamentale est loin de recueillir l’assentiment d’une frange importante du peuple. Elle aurait dû faire l’objet d’un large consensus, comme ce fut le cas en 1992. Parlant de son contenu, cette constitution porte en elle les germes de la monarchie car concentrant tous les pouvoirs entre les mains du prince du jour. Les autres réformes tant ventées et censées donner naissance au Mali-Koura tardent à venir tout comme la relance économique qui aurait dû être le cheval de bataille des autorités de la transition a été reléguée au second plan.
En effet, hormis la montée en puissance des Forces de défense et de sécurité, aucun autre domaine ne se porte mieux au Mali. La situation est gravissime tant sur le plan économique que socio financier. Le Mali, sous embargo financier des organisations sous régionales est sevré d’argent. Les bailleurs de fonds qui d’ordinaire volaient au secours du Mali ont tous été mis à la porte, la Russie notre partenaire privilégiée traîne les pieds. La fragilité de l’économie, la rareté des ressources financières et les conditions sécuritaires précaires ont mis en difficultés les entreprises, qui si elles ne ferment pas les portes à cause de la pression fiscale, le font à cause du manque de fonds. Comme si ces difficultés ne suffisaient pas l’énergie du Mali en rajoute à la crise en sevrant les citoyens et les industries du courant ce qui aggrave la précaire situation. La crise énergétique est la parfaite illustration du malaise général dans le pays, car elle touche toutes les couches socioprofessionnelles. Cette société a été incapable d’assurer la fourniture de courant aux usagers. Parlant de l’EDM, il est impensable qu’au 21ième siècle le courant est devenu un luxe et une denrée rare au Mali. Ce qui plombe l’économie informelle, les industries et paralyse l’administration et le secteur privé. La cause principale des délestages intempestifs est le manque de ressources financières permettant d’acheter des hydrocarbures, pour faire tourner les centrales thermiques. Au manque de ressources s’ajouterait la mauvaise gouvernance de la société, qui a été et qui demeure encore une vache laitière ou un bureau de placement pour tous les régimes qui se sont succédé au pouvoir. Du reste il n y a pas que l’EDM, c’est toute la gouvernance qu’il faut revoir et la transition avec son slogan Mali Koura, nouveau Mali, était censée être cette période exceptionnelle pour jeter les bases d’un Mali émergent débarrassé des pratiques malsaines. Mais c’est le contraire que l’on constate dans la gestion des affaires publiques. Ni la vague d’arrestations des anciens dignitaires du régime IBK, encore moins la pression sur les cadres n’ont entamé la volonté des agents à détourner les deniers publics. Le Rapport 2022 du Vérificateur Général est le témoignage éloquent de l’incurie dans la gouvernance sous la transition. La question que l’on est en droit de se poser est celle de savoir à quoi la transition a finalement servi ? Les partisans invétérés de la transition parleront de la montée en puissance, sauf qu’il n y a pas de sécurité sans développement et que les deux vont de pairs, or aujourd’hui les maliens dans leur écrasante majorité souffrent dans leur chair et leur âme.
En somme, l’histoire des théories politiques nous enseigne que plus une transition dure plus elle devient inefficace. Donc les autorités sont désormais entre le marteau et l’enclume. Le marteau de la CEDEAO qui n’exclut rien après l’expiration du délai imparti pour la fin de la transition. Donc des probables sanctions à l’image de celles du Niger et l’enclume du peuple, qui de plus en plus est agacé, voir révolté ca victime d’une paupérisation rampante quand les autorités se la coulent douce. Le peuple en manque de ressources est sur le qui-vive et prêt à battre le macadam si la situation continuait à se détériorer.
Youssouf Sissoko