Comme il est coutume, les juges du Conseil constitutionnel ont motivé leur décision. Ce, suite à la requête introduite par les députés Mouhamed Ayib Salim Daffé et Cie aux fins de faire «déclarer contraire à la Constitution la loi n° 4/2024 adoptée par l’Assemblée nationale en sa séance du 5 février 2024 portant dérogation aux dispositions de l’article 31 de la Constitution», d’ordonner la poursuite du processus électoral et « d’ajuster, si besoin, la date de l’élection présidentielle pour tenir compte des jours de campagne perdus».
Rendant leur jugement, le président Mamadou Badio Camara et les autres membres de cette juridiction, ont fait savoir que les requérants ont soutenu que la loi attaquée est contraire à la Constitution en ce qu’elle prolonge le mandat du Président de la République de l0 mois (Ndlr : 15 décembre 2024, nouvelle date fixée par l’Assemblée nationale). Ils ont ajouté que considérant que l’article 103 de la Constitution dispose que la durée du mandat du Président de la République ne peut faire l’objet de révision. «Que ce texte consacre l’intangibilité de la durée de 5 ans du mandat prévue à l’article 27 de la Constitution », mentionnent-ils.
Ce faisant, les sages ont retenu, ce jeudi 15 février : «la juridiction constitutionnelle a déjà décidé, d’une part, que la durée du mandat du Président de la République ne peut être réduite ou allongée au gré des circonstances politiques, quel que soit l’objectif poursuivi ; que le mandat du Président de la République ne peut être prorogé en vertu des dispositions de l’article 103 précité ; que la date de l’élection ne peut être reportée au-delà de la durée du mandat ; que d’autre part, la loi attaquée introduite dans la constitution des dispositions dont le caractère temporaire et personnel est incompatible avec le caractère permanent et général d’une disposition constitution ».
Ils ont rappelé ainsi que le Président de la République ne dispose pas du pouvoir de reporter ou d’annuler le scrutin. Arguant que la loi portant dérogation aux dispositions de l’article 31 de la Constitution, adoptée sous le n° 4/2024 par l’Assemblée nationale en sa séance du 5 février 2024, est déclarée contraire à la Constitution. En conséquence, ont-ils prononcé, le décret attaqué n° 2024-106 du 03 février 2024 portant abrogation du décret convoquant le corps électoral, pris sur le fondement de la proposition de loi notifiée au Chef de l’État, manque de base légale et encourt l’annulation.
Le 3 février dernier, Macky Sall avait déclaré : «Alors que s’annonce l’élection présidentielle du 25 février 2024, notre pays est confronté, depuis quelques jours, à un différend entre l’Assemblée nationale et le Conseil constitutionnel, en conflit ouvert sur fond d’une supposée affaire de corruption de juges. En conséquence, compte tenu des délibérations en cours à l’Assemblée nationale réunie en procédure d’urgence, et sans préjuger du vote des députés, j’ai signé le décret n° 2024-106 du 3 février 2024 abrogeant le décret n° 2023-2283 du 29 novembre 2023 portant convocation du corps électoral ».
Finalement, le Conseil constitutionnel a décidé autrement.