Contrairement à tout ce qu’on a pu entendre depuis le début de la transition, le défunt régime a aussi connu des hommes de valeur dotés d’une intégrité sans faille à la tâche. Le récent rapport du vérificateur général sur la gestion des subventions allouées par l’État aux établissements privés est particulièrement une victoire pour un homme qui a payé cher son audace à fouiller dans la chasse gardée de certains caciques de l’époque.
Quatre petits mois, c’est la durée que le ministre Housseini Amion Guindo a passé à la tête du ministère de l’Education nationale. Quatre mois d’éternité pour certains ou de clin d’œil pour d’autres, ne l’a empêché de laisser des traces indélébiles. Ce triste record de durabilité, il le doit particulièrement pour moi au dossier des enseignants et élèves fictifs qu’il a déniché sans le consentement des parrains.
À l’époque des faits, nous étions nombreux à croire que le compte à rebours avait commencé pour lui. Cela pour la simple raison que le département était la chasse gardée naturelle du RPM, de l’Adema et de l’ASMA. Presque de trop dans cette atmosphère, la nomination de Poulo pour gérer ce milieu fermé a été mal vécue par bon nombre de cadres bien protégés.
Non moins enseignant et promoteur d’école, en homme averti donc, Housseini Amion Guindo s’est très vite attaqué aux vrais problèmes de notre système éducatif avec la ferme conviction de changer les choses au plus vite. Il avait la forte conviction que l’argent que l’État injectait chaque année dans l’éducation devrait logiquement nous permettre de nous affranchir de l’aide extérieure contraignante.
Ce chantier gigantesque, non sans conséquence pour lui, a été son combat pendant les quatre mois qu’il a passés à la tête du département. Malheureusement, ses craintes et soupçons furent confirmés par un état des lieux sans complaisance qui a révélé une saignée financière hors du commun au préjudice de l’État.
Les découvertes ahurissantes sur la mafia organisée autour du juteux dossier des élèves ont été très mal vécues par les membres de l’alliance politico-mafieuse qui se servaient à la pelleteuse au vu et au su de tous.
Les élèves fictifs, des doublons, la perception par certains établissements des frais indus, le blocage systématique des réorientations au profit de certains établissements dans la grâce, les cantines scolaires fictives…, bref tous les ingrédients d’un scandale financier hors du commun qu’il n’avait pas hésité à porter à la connaissance des autorités et de l’opinion nationale avec en prime une économie de plusieurs milliards pour l’État.
À l’époque, en dehors de la haine et du mépris suscités à son encontre et qui a engendré le blocage de ses missions et de ses nominations régaliennes, cette découverte n’a pas servi à grand-chose pour le contribuable. Très enracinés politiquement au moment des faits, les cadres impliqués dont la plupart était des promoteurs déguisés en complicité avec certains ténors de l’association des promoteurs d’écoles privées n’ont jamais été inquiétés. Pis, certaines démissions ont été suscitées dans son Parti pour se venger de lui.
Fort heureusement des années après, le récent rapport du vérificateur réhabilite la posture de Poulo qui sacralise la chose publique avec une tolérance zéro pour les sangsues. Aujourd’hui réconforté, Poulo n’en demandait pas plus à l’époque pour sauver ce qui pouvait encore l’être et permettre à notre pays de s’affranchir de l’aide empoisonnée de certains partenaires qui font de notre école un perpétuel laboratoire d’expérimentation des politiques et programmes de colonisation et d’aliénation mentale et culturelle.
En tant qu’ancien acteur et observateur du secteur de notre éducation, il est de notre devoir de rendre au ministre Housseini Amion Guindo, qui n’avait pas hésité à démissionner à l’époque, tout le mérite de son combat pour une gouvernance vertueuse au profit de la patrie. Combien sont les politiques qui peuvent se vanter d’une telle posture surtout pour un secteur vital pour le pays ? Bravo Monsieur le Ministre !
Seydou Moussa DIARRA/Professeur d’enseignement secondaire à la retraite