Les Etats-Unis ont annoncé jeudi des exercices militaires aériens au Guyana en pleine crise au sujet de sa région de l’Essequibo, un territoire riche en pétrole revendiqué par le Venezuela et qui fera l’objet d’une réunion à huis clos vendredi du Conseil de sécurité de l’ONU.
L’ONU répond ainsi à une demande du ministre guyanien des Affaires étrangères Hugh Todd qui a sollicité une réunion d’urgence sur cette région sous administration guyanienne mais revendiquée par le Venezuela.
Le Conseil de sécurité de l’ONU se penchera vendredi sur cette crise, selon le programme actualisé publié jeudi par les Nations unies.
Les Etats-Unis ont annoncé de leur côté dans un communiqué mener « des opérations aériennes » au Guyana jeudi « en collaboration avec les forces de défense » du pays.
« Cet exercice s’inscrit dans le cadre d’engagements et d’opérations de routine visant à renforcer le partenariat en matière de sécurité entre les États-Unis et le Guyana », ajoute le document de l’ambassade américaine au Guyana.
Un peu plus tôt, le secrétaire d’Etat américain Antony Blinken a affirmé son « soutien inébranlable à la souveraineté du Guyana ».
Face à l’escalade de tensions dans la région, le président brésilien Luiz Inacio Lula da Silva a dit jeudi ne pas vouloir de « guerre en Amérique du Sud ». « Nous n’avons pas besoin d’un conflit, il faut construire la paix », a-t-il insisté.
Ajouant à la tension, un hélicoptere militaire guyanien avec sept personnes à bord a été porté disparu mercredi près de la frontière avec le Venezuela.
Jeudi, l’armée guyanienne a annoncé l’avoir retrouvé et détecté « des signes de vie » sur le lieu du crash. Des troupes ont été envoyés sur place à environ 50 km de la frontière avec le Venezuela dans une zone « montagneuse et de forêt dense ».
Le chef d’état-major guyanien Omar Khan avait précisé mercredi n’avoir « aucune information » sur le devenir de l’appareil, suggérant « une intervention vénézuélienne ». Il avait cependant précisé que les conditions météorologiques étaient « mauvaises ».
Les Etats-Unis sont un allié du Guyana, et le groupe américain ExxonMobil est un des principaux opérateurs pétroliers de ce petit pays appelé à devenir un eldorado de l’or noir avec les plus grandes réserves per capita de la planète, notamment grâce aux découvertes récentes dans l’Essequibo.
– Canaux de communication –
Caracas revendique depuis des décennies ce territoire de 160.000 km2 représentant plus des deux tiers du Guyana et où vivent 125.000 personnes, soit un cinquième de la population du pays. Caracas est devenu plus pressant depuis la découverte d’importantes réserves de pétrole par ExxonMobil en 2015.
Les deux pays avaient cependant renoué le contact mercredi avec un appel téléphonique entre les ministres des Affaires étrangères, Hugh Todd et le Vénézuélien Yvan Gil, « pour discuter de la question du différend territorial », selon un communiqué vénézuélien.
Les deux pays « ont convenu de garder les canaux de communication ouverts », selon le texte. Ce rapprochement était survenu après des échanges acerbes.
Caracas a accusé le président guyanien Irfaan Ali d’avoir donné « d’une manière irresponsable » le « feu vert » à l’installation de bases militaires américaines dans l’Essequibo.
En même temps, le président vénézuélien Nicolas Maduro a préconisé la création d’une zone militaire spéciale près de la frontière et ordonné au géant public PDVSA d’accorder des licences d’exploitation de pétrole dans l’Essequibo.
Le président Irfaan Ali a réagi en parlant « d’une menace directe pour l’intégrité territoriale, la souveraineté et l’indépendance politique du Guyana ». Il a souligné que son armée était en « alerte totale » et accusé le Venezuela d’être une « nation hors-la-loi » et « un risque important pour la paix et la sécurité ».
Pour Mariano de Alba de l’International Crisis Group, « la rhétorique de confrontation va se poursuivre » mais un « conflit armé est peu probable ».
Le Venezuela a organisé dimanche un réferendum sur l’Essequibo pour donner plus de poids et de crédibilité à ses revendications. Selon les chiffres officiels – contestés par de nombreux observateurs -, quelque 10,4 millions d’électeurs vénézuéliens ont participé à la consultation et 95% d’entre eux se sont dits favorables à l’intégration de l’Essequibo au pays.
Le Venezuela soutient que le fleuve Essequibo doit être la frontière naturelle, comme en 1777 à l’époque de l’empire espagnol. Le Guyana argue de son côté que la frontière date de l’époque coloniale anglaise et a été entérinée en 1899 par une cour d’arbitrage créée ex-nihilo pour l’affaire à Paris.