Face aux multiples défis liés à la nutrition au Mali, dont les conséquences peuvent être la pneumonie, mais aussi à la couverture sanitaire universelle, Dr. Yacouba Koné, actuellement responsable du financement de la santé, de l’engagement du secteur privé et de la coordination des donateurs à l’USAID, a appelé l’Etat à « garantir la sécurité nutritionnelle » et « l’accès aux soins de santé pour tous les Maliens ».
Dr. Yacouba Koné est un médecin de formation. Sur le plan académique, ses qualifications sont nombreuses. Il est titulaire d’un doctorat en médecine, en Chine, d’un Master en Business administration, d’un DEU en développement de la petite enfance et d’un doctorat en nutrition.
Actuellement, Dr. Koné travaille à l’USAID où il est responsable du financement de la santé, de l’engagement du secteur privé et de la coordination des donateurs. Cependant, son engagement ne se limite pas à son travail. Il est très impliqué dans les mouvements de Siby. Il occupe le poste de président de l’Association de santé communautaire de Bagadadji (Bamako). De plus, il est le fondateur du Forum des ONG Internationales du Mali (FOGIM), une initiative locale pour l’emploi à Bagadadji. En tant que professionnel, Dr. Koné est membre de l’Ordre des médecins. Il a également été membre de l’Association des médecins de campagne et fait partie de l’Alliance du secteur privé pour la promotion de la campagne.
Personne aux multiples compétences, engagée tant sur le plan académique que dans son travail et ses initiatives communautaires, Dr. Yacouba Koné nous parle de ses parcours professionnels notamment dans le domaine de la nutrition et les défis à relever aussi bien dans ledit secteur que dans la couverture sanitaire universelle. Interview.
L’Observatoire : Vous avez débuté votre carrière en tant que médecin de campagne. Pourquoi ce choix ?
Dr Yacouba Koné : J’ai commencé à Bagadadji, à l’école publique de Bagadadji. Je suis fier de le dire. J’ai fait le collège Mahamane à Bagadadji et ensuite nous sommes allés à l’Opam, puis à Koulouba. J’ai obtenu mon DEF à Koulouba. J’ai fréquenté le Lycée Askia. Et lorsque nous avons obtenu le baccalauréat, j’ai été parmi les boursiers qui sont allés en Chine. J’y suis resté huit ans. Dieu merci, j’ai obtenu un diplôme d’aptitude comparée en sciences humaines, un doctorat d’État, ainsi qu’un diplôme. Ce qui m’a beaucoup marqué lors d’une discussion, c’était lorsque j’étais avec un ami qui est né dans le village de Niono, où nous parlions de la famine. Moi, je suis né à Bagadadji, mon père est de Bagadadji, ma mère est de Niaréla.
Je ne connaissais pas vraiment le milieu rural. Mais c’est à partir de ce moment-là que le docteur Tangara nous a décrit la situation des femmes et des enfants qui souffrent dans les villages. Ce qu’il nous a dit m’a profondément marqué. Au fond de moi, j’ai décidé que cette bourse, dont bénéficient la majorité des Maliens grâce aux impôts des paysans, je travaillerai au moins 5 ans en milieu rural pour essayer de rembourser aux paysans ce qu’ils ont investi dans ma formation. C’est ainsi que j’ai décidé de devenir médecin de campagne. Je suis le 13e médecin de campagne au Mali et le premier médecin à travailler dans un CSCOM dans le cercle de Sikasso.
Mais dans ce cercle, il y avait un médecin privé, Dr Mariko, et un autre, Dr Bruno, qui travaillaient dans un centre de santé conventionnel, mais j’étais le premier médecin à travailler dans un centre de santé communautaire. J’y suis resté pendant sept ans. Nous avons obtenu de nombreux résultats. Et quand j’ai quitté, nous avons créé la première mutuelle de santé en milieu rural, basée sur une contribution de 5 F CFA par kilo de coton. Après Sikasso, je suis venu à Bamako. L’ONG “Santé sur Mali”, qui nous a soutenus, compte tenu de mes résultats, m’a demandé de partager mon expérience avec d’autres médecins. Je suis venu à Bamako en tant que coordinateur de cette ONG, avec pour mission d’installer 100 médecins dans chaque commune rurale en 5 ans, objectif que nous avons dépassé en 3 ans. Nous avons accompli ce travail et ensuite j’ai décidé de partir pour poursuivre mes études.
Et c’est de là que vous êtes revenu…
Oui, c’est là que je suis revenu. Ma carrière a vraiment commencé avec mon travail. En tant que médecin de campagne, je me suis rendu compte que ce n’est pas seulement la clinique qui peut sauver la population. Il faut réellement une approche de santé publique. Cela m’a également permis de me spécialiser en santé publique. À mon retour, j’ai commencé à travailler en combinant la pratique clinique et la santé publique. Lorsqu’il s’agit de la couverture sanitaire universelle, il y a des aspects tels que les études économiques de la santé, qui m’ont poussé à obtenir un Master en gestion de la santé…
En tant que nutritionniste, parlez-nous un peu de votre parcours dans le domaine de la nutrition.
Je ne peux pas dissocier mon parcours personnel du domaine de la nutrition, car la nutrition est directement ou indirectement liée à 40 % des décès d’enfants de moins de 5 ans. Imaginez, aujourd’hui, nous sommes dans la période d’hivernage, mais la situation est difficile à Bamako. Dans de nombreux foyers, les enfants ne mangent pas suffisamment. Pourquoi ? C’est à cause de l’impact du dérèglement climatique qui entraîne un manque de pluie, ce qui constitue un risque pour les agriculteurs. S’il n’y a pas suffisamment de pluie, les agriculteurs sont touchés. De plus, le marché des denrées alimentaires tient compte du fait que les agriculteurs sont victimes de cette situation, car c’est pendant cette période qu’ils s’endettent pour acheter précocement et pratiquement toute leur production, soit environ la moitié de leur production. À la récolte, la moitié de leur production ne leur appartient plus, alors que toute leur famille compte sur cette récolte. Souvent, à un certain moment, il n’y a pas assez de nourriture disponible, et les enfants en souffrent en premier. Donc, dès le premier jour où j’ai commencé à travailler en tant que médecin de campagne, j’ai été confronté à la malnutrition et à ses problématiques. Comme on dit au Mali, la faim est elle-même une maladie, et une personne affamée est constamment malade. J’ai donc été confronté à la malnutrition et à ses problématiques dès le début de ma carrière. Lorsque l’on veut lutter contre un problème, je pense qu’il est essentiel de comprendre d’abord les causes du problème pour pouvoir s’impliquer. Cependant, une seule personne ne peut pas y arriver. Cela relève de la politique et de la vision. J’ai fait de mon mieux et heureusement, j’ai eu un mentor, le professeur Akory, avec qui nous avons beaucoup travaillé sur cette question. Nous avons élaboré le plan stratégique de la nutrition en Afrique de l’Ouest en tant que consultants. Nous avons apporté notre contribution. Le professeur Akory et moi, ainsi que les partenaires techniques et financiers, avons poussé l’agenda. À ma manière, mais il est également important de comprendre que d’autres facteurs, tels que les ressources financières, jouent un rôle. Cependant, je plaide toujours en disant à tous mes interlocuteurs que la question fondamentale en matière de santé ici est la malnutrition.
Alors, que fait le gouvernement, quel est son apport ?
Eh bien, le gouvernement fait beaucoup en fonction de ses moyens. Il élabore la politique et le plan stratégique, qui sont tous deux multisectoriels car la nutrition ne concerne pas uniquement les médecins, mais aussi l’agriculture, l’eau, l’hygiène et l’assainissement. Environ plus d’un tiers des Objectifs de développement durable (ODD) sont liés à la nutrition. Si l’on examine l’architecture du gouvernement actuel, on constate que plus des deux tiers des ministères ont un lien direct avec la nutrition. Le premier problème réside donc dans la nécessité d’une approche multisectorielle. Le gouvernement se bat réellement pour cela. Cependant, le problème actuel réside dans l’ancrage institutionnel. Actuellement, la nutrition relève du ministère de la Santé. Selon moi, la nutrition devrait relever de la primature. Je vais vous expliquer pourquoi. On ne peut pas parler de nutrition sans évoquer la sécurité alimentaire, l’environnement, car les perturbations climatiques ont un impact sur l’agriculture, l’eau, l’hygiène et l’assainissement. On ne peut pas parler de nutrition sans évoquer le ministère du Commerce qui régule le marché, ni sans parler de la sécurité des aliments et de la sécurité alimentaire, qui relèvent des affaires économiques, des finances et de l’intérieur. Il incombe également à la décentralisation de réglementer la vente de produits périmés. Tout cela relève de différents ministères. La communication joue également un rôle essentiel. Savez-vous quel est le problème actuel au Mali ? Lorsque vous vous rendez au marché, vous constatez des mouches partout, mais vous ne les voyez pas se poser sur la viande. Savez-vous pourquoi ? Parce qu’on met de la terre sur la viande. Or, cela n’est pas sain pour notre santé. Il existe de nombreux autres exemples, tels que l’utilisation de carburants et de produits chimiques sur les fruits. Tout cela concerne la sécurité des aliments, la sécurité alimentaire et la sécurité nutritionnelle. Mais l’objectif ultime est d’atteindre la sécurité nutritionnelle. Lorsque l’on parvient à garantir la sécurité nutritionnelle, toutes ces étapes sont incluses.
En tant que spécialiste dans ce domaine, que pouvez-vous conseiller aux autorités qui gèrent les affaires de l’État ?
Je suis là pour soutenir les autorités, vous comprenez. Tout d’abord, nous avons des plans d’action qui doivent être mis en œuvre. Cela ne relève pas seulement des autorités. Si vous observez la situation actuelle au Mali, c’est une combinaison d’efforts entre les autorités, les partenaires techniques et financiers, ainsi que nous-mêmes et nos comportements à cet égard. Comme je l’ai dit, c’est le marché qui régule tout cela. Donc, même si nous subventionnons, la loi de l’offre et de la demande prévaut. Cependant, certaines dispositions politiques et institutionnelles sont nécessaires. Par exemple, en ce qui concerne l’ancrage politique, cela peut être déterminant, car toute décision prise par le Premier ministre devient exécutoire. Si une décision est prise par le ministre de la Santé, mais n’est pas approuvée par la primature, cela ne mènera pas à grand-chose. Ainsi, le ministre de la Santé peut s’exprimer, mais si l’agriculture ne garantit pas la disponibilité alimentaire, cela pose problème. C’est pourquoi, selon moi, le principal problème de la nutrition au Mali réside dans l’ancrage institutionnel. Je me souviens qu’en élaborant le plan stratégique en Afrique de l’Ouest, le programme de nutrition dans certains pays était directement rattaché au président (ou à la présidence) et la responsabilité de la question de la nutrition était confiée au vice-président, par exemple, en Sierra Leone. Dans d’autres pays, cela relevait directement de la primature. Ainsi, ces deux facteurs sont importants pour la prise de décision chez nous. Cependant, je constate que l’accent est principalement mis sur la sécurité alimentaire, qui fait partie intégrante de la sécurité nutritionnelle. Il faut donc d’abord renforcer l’ancrage institutionnel pour assurer le suivi des décisions. C’est mon avis.
Qu’en est-il des partenaires ? Où se situe précisément le problème avec eux ?
Je parle en mon nom personnel, pas au nom de l’institution. Les partenaires aident les pays à mettre en œuvre un plan. Ils n’ont pas de problème à cet égard. Ils apportent leur contribution et plaident en faveur de la cohérence des politiques et de l’ancrage institutionnel, qui est encore précaire. Ils apportent un soutien technique au pays. Par exemple, lorsqu’il y a des problèmes de nutrition, ce sont les partenaires qui achètent les aliments thérapeutiques, et c’est principalement grâce à eux que nous bénéficions de l’aide humanitaire. Ils font de leur mieux. Ils aident le pays à formuler ses plans, ses politiques, et participent souvent à l’élaboration des plans opérationnels et des budgets. Cependant, la thématique est si vaste, comme je l’ai déjà mentionné, que chaque centaine d’enfants qui meurent au Mali est liée à la question de la nutrition. C’est l’ampleur du problème.
Est-ce que l’aide des partenaires parvient à destination ?
Est-ce que la distribution à travers le pays est optimale ? Certains partenaires ne peuvent pas quitter Bamako. Je pense que cela relève du travail de la société civile. Il faut d’abord s’assurer du montant de l’aide fournie par les partenaires et vérifier si cette aide parvient effectivement à destination. En raison de l’insécurité actuelle, les partenaires ne peuvent pas se déplacer en dehors de Bamako. Regardez la carte, à part Bamako, presque tout le territoire est menacé. Donc, cela vaut ce que cela vaut. Nous ne pouvons pas confier le développement de notre pays aux seuls partenaires. Il faut que les citoyens se sentent concernés, qu’ils s’impliquent. Les partenaires peuvent apporter des financements, car il existe un soutien global et un soutien budgétaire, mais lorsque l’argent parvient au trésor public, ceux qui en bénéficient doivent être informés. Mais est-ce que les consommateurs et la société civile suivent le cheminement des choses ? Certains partenaires sont chargés de la mise en œuvre. Par exemple, Action contre la Faim est présente à Nioro ou dans les régions où sévit la famine. Il est essentiel que nous-mêmes soyons vigilants.
Vous avez parlé des associations dont vous êtes responsable. Qu’est-ce qu’elles font spécifiquement ?
Je suis le président de l’Association de Santé Communautaire de Bagadadji. Une association de santé communautaire a trois rôles essentiels : tout d’abord, elle aide la communauté à disposer d’un centre de santé communautaire. Ensuite, elle veille à ce que le centre de santé puisse fournir des soins de qualité de manière continue et permanente. Enfin, elle s’assure de la bonne gouvernance du centre de santé afin de garantir que les ressources financières nécessaires sont disponibles pour son bon fonctionnement. Cela inclut les salaires du personnel, la formation continue, ainsi que les médicaments et réactifs nécessaires. L’ASACO mobilise également les membres de la communauté pour soutenir ces efforts. Pour devenir membre de l’association, il est nécessaire de payer une cotisation. Les fonds provenant de ces cotisations servent également de levier pour organiser des élections démocratiques locales et mettre en place les différentes instances de l’association. Sans cela, nous pourrions rencontrer des difficultés.
Est-ce que cela évolue ?
À Bagadadji, lorsque nous avons commencé, il n’y avait pas de centre de santé communautaire. Je ne peux pas dire que l’association l’a créé, mais nous avons facilité sa mise en place. Il y a eu une synergie d’action où toutes les bonnes volontés de Bagadadji se sont réunies. Le dynamisme est venu de nous, mais que nous soyons là ou non, tous les habitants de Bagadadji se sont unis pour faire de l’acquisition d’un centre de santé communautaire une priorité. Cela faisait partie du plan de développement de la commune. Nous avons soumis cette demande au ministère de la Santé, qui l’a acceptée. Nous avons obtenu des financements de l’ANICT, ce qui nous a permis d’ouvrir le centre de santé. Aujourd’hui, nous disposons d’un personnel, même si tout n’est pas parfait à 100 %, nous pouvons fournir des soins.
Parlez-nous de la relation entre la nutrition et la pneumonie.
La pneumonie est la première cause de mortalité chez les enfants dans le monde, en général. Cependant, en Afrique, ce n’est pas la première cause en raison de la prévalence du paludisme, qui occupe cette place. Cependant, un enfant mal nourri qui contracte la pneumonie a-t-il une chance de survie ?
Cette chance de survie est malheureusement minime. L’état nutritionnel d’un enfant peut avoir un impact considérable sur sa capacité à combattre la maladie. J’ai participé à un atelier mondial sur la pneumonie où notre pays a pris des engagements. L’État s’est engagé, mais il reste à voir comment cela sera mis en œuvre. Cependant, les engagements ne suffisent pas, il est nécessaire de mettre en place des infrastructures adéquates, de former le personnel et de garantir la disponibilité des médicaments. C’est pourquoi nous avons besoin de vous pour relayer ces informations.
En pratique, la pneumonie est une maladie qui peut être prévenue. Il est important de bien nourrir les enfants et de les protéger du froid et de la chaleur. Les mères doivent éviter de dormir dans des endroits climatisés et veiller à l’aération des espaces de vie. Il est nécessaire de fournir beaucoup d’informations pour que les gens puissent adopter des comportements préventifs pour protéger les enfants de cette maladie.
Quelle lecture faites-vous l’avenir dans le secteur de la nutrition ?
Je pense que le Mali doit accorder plus d’importance à la nutrition afin que les enfants atteignent leur plein potentiel de développement. Malheureusement, un enfant mal nourri ne se développe pas de manière optimale, ce qui peut avoir des conséquences sur sa santé et son développement à long terme. Par exemple, une mauvaise nutrition pendant l’enfance peut entraîner des complications à l’âge adulte, comme des bassins sous-développés chez les femmes qui peuvent nécessiter des césariennes lors de l’accouchement. Cela ajoute des couches supplémentaires aux défis de la vie. Dans l’ensemble, il s’agit d’un véritable problème de santé publique, voire de développement. C’est pourquoi je pense que la question de la nutrition devrait être abordée au niveau de la primature ou de la présidence.
Tout au long de votre parcours, avez-vous reçu des attestations de reconnaissances ou de félicitations ? Pouvez-vous nous en parler ?
Je suis chevalier de l’ordre national, une reconnaissance qui m’a été décernée par le ministère des Réformes, mais pas par le ministère de la Santé. Le ministre m’a vu travailler sur le terrain, il a entendu parler de mes actions et cela a suscité sa curiosité, il m’a appelé pour discuter. Dans le domaine de la santé, je ne suis pas un inconnu, mais n’ayant jamais travaillé dans la fonction publique, le ministère de la Santé ne m’a jamais contacté pour me féliciter ou me gratifier de quoi que ce soit. C’est tout ce que je peux dire à ce sujet.
Comment percevez-vous cela ?
En réalité, cela n’a pas d’importance pour moi. C’est la vie telle qu’elle est. Mon objectif est d’améliorer la vie des enfants et d’apporter ma contribution à la construction nationale, cela me suffit. Quand je vois des enfants sourire, des femmes enceintes accoucher dans des conditions adéquates et que les services de santé sont disponibles, cela me réconforte. Malheureusement, nous faisons face à des défis tels que la disparité dans l’accès aux soins de santé. Notre système de santé semble fonctionner sur deux niveaux. Nous, les travailleurs, sommes assurés, mais les paysans du secteur informel ont du mal à bénéficier des mêmes avantages. Cela interpelle chacun d’entre nous, et les autorités en sont conscientes. C’est l’une des priorités à aborder. Nous devons travailler ensemble pour trouver des solutions.
Dans le secteur privé, il est souvent difficile de prendre sa retraite. Comment vous préparez-vous à prendre votre retraite ?
Comment un médecin peut-il prendre sa retraite dans un environnement tel que le Mali ? Peu importe le statut, nous serons toujours sollicités. Nous avons fait le serment d’Hippocrate, et je ne refuserai jamais de soigner un enfant malade sous prétexte que je suis à la retraite. Je serai toujours prêt à donner le meilleur de moi-même. Maintenant, en ce qui concerne la préparation à la retraite, c’est une autre question. Lorsque vous êtes dans le secteur privé, il est important de développer des sources de revenus alternatives pour assurer sa retraite. C’est ainsi que je me bats.
Quel est votre mot de la fin ?
Si je devais m’attarder sur quelque chose, ce serait sur la nécessité pour le Mali de s’efforcer d’assurer une couverture sanitaire universelle. À l’heure actuelle, seulement 17 % de la population malienne est couverte par l’assurance maladie obligatoire (AMO), et seulement 5 % des indigents bénéficient du régime d’assistance médicale (ANAM). 78 % des Maliens vivant en milieu rural et dans le secteur informel n’ont pas d’assurance santé et doivent faire face à des difficultés pour accéder aux soins. Il est important de prendre des initiatives pour permettre à ces personnes d’y avoir accès. Une réflexion avait déjà commencé lors de la promulgation de la loi agricole, qui prévoyait la création d’une assurance maladie pour tous les ménages en milieu rural. Cette loi devait être suivie d’une autre loi sur les achats institutionnels, qui favoriserait l’approvisionnement des forces armées en produits agricoles locaux plutôt qu’en produits importés. Cela permettrait de soutenir les paysans et de prélever des fonds pour l’assurance maladie. Cependant, il faut trouver un équilibre pour ne pas mettre en péril les moyens de subsistance des agriculteurs. Si l’État peut compléter ces efforts pour garantir l’accès aux soins de santé pour tous les Maliens, en tant que droit fondamental, cela nécessitera une collaboration entre les différents acteurs. Nous devons tous faire des efforts, et les autorités sont conscientes de cette nécessité.
Cyril ADOHOUN