Parti en grande pompe à Gao pour un périple régional, le Premier ministre Choguel Maïga est retourné rabroué de la Cité des Askia où son séjour a été écourté sur fond d’interrogations sans réponses. L’opinion n’a de cesse de s’interroger, en effet, sur les raisons qui ont prévalu à l’annulation des étapes d’Ansongo et de Bourem. Le facteur sécuritaire reste le plus plausible, même si le bouleversement du calendrier primatorial cache bien des non-dits sur fond de dissensus entre le chef du Gouvernement et ses mentors. Quoi qu’il en soit, le passage de Choguel Maiga, ainsi que le cinglant démenti qu’il a apporté aux assurances de sécurité, constitue un indicateur de plus sur le devenir du processus électoral. Il devrait commencer par le référendum constitutionnel annoncé pour mars 2024, mais sa faisabilité est remise en cause depuis la sortie tonitruante du président de la Cour constitutionnelle sur la disette financière qui l’empêche d’accompagner le processus référendaire. Ce facteur défavorable s’est greffé à d’autres facteurs déjà connus, en l’occurrence l’obstacle de Kidal et les écueils sécuritaires. Le flop de Choguel dans la région de Gao prouve s’il en était besoin que ça n’est pas demain la veille de la consultation électorale devant enclencher le processus électoral au Mali. Surtout lorsqu’on est convaincu que «la sécurité vient avant la démocratie».
La Primature a-t-il brisé la glace avec l’imam Mahmoud Dicko
Seules les montagnes ne se rencontrent pas, dit-on. La maxime traduite parfaitement l’évolution apparente des rapports entre le chef du gouvernement et l’imam Mahmoud Dicko. En rupture de ban avec le pouvoir depuis la nomination de Choguel Maiga, l’ancienne autorité morale du M5-RFP, selon nos sources, a pourtant reçu discrètement la visite de son ancien porte-parole et non moins président du Comité stratégique. De ce que les deux hommes ont échangé nos sources ne pipent mot, pas plus qu’elles ne précisent si leur rencontre nocturne a permis de briser la glace entre deux personnages qui se regardent en chiens de faïences. Toujours est-il que les mêmes sources affirment que les acteurs de l’ancien CNSP n’ont pas du tout apprécié ce rapprochement supposé du PM avec l’imam Mahmoud Dicko et que la nouvelle donne est scruté de près par les cinq (5) colonels pour suite à lui donner dans les jours à venir. D’aucuns estiment même que cette démarche du chef du Gouvernement pourrait être la bourrasque à laquelle il résistera difficilement après avoir échappé à un long congé de maladie ainsi qu’au coup de balai de la loi électorale.
Le Cherif de Nioro se démarque de la Transition
Aussi surprenant que cela puisse paraître, le Cherif de Nioro se démarque de la Transition dont il louait naguère encore les vertus à coups de dithyrambes à l’endroit des colonels. Celui qu’on appelle affectueusement Bouyé Haïdara l’a récemment confié à des proches collaborateurs dont la sincérité ne souffre d’aucun doute. La cause de la rupture ? Il semble que le vénérable leader religieux a pris pour prétexte les mêmes raisons qui ont prévalu à sa rupture d’avec le régime d’ATT en son temps : les contradictions entre la République et la confession musulmane. Cette fois également, à l’origine de la rupture se trouve l’élaboration de la nouvelle constitution et le malentendu des pouvoirs avec une partie du monde religieux malien sur la laïcité. Le cherif de Nioro, selon toute vraisemblance, s’est rangé du côté des tendances qui réclament à cor et à cri la suppression pure et simple de la notion de laïcité du projet de texte, alors que la commission de finalisation n’est vraisemblablement pas en train d’évoluer dans ce sens. C’est peut-être aussi l’une des raisons pour lesquelles Bouyé Haïdara a accueilli avec un rejet tacite la candidature du président de la Transition à la future présidentielle que lui a soumise une certaine délégation partie de Segou pour solliciter l’adhésion de Nioro.