Rien ne va plus au sein du Mouvement du 5 juin- Rassemblement des forces patriotiques (M5-RFP) ! Rien de surprenant puisque nous avons toujours misé sur une implosion de cette organisation hétéroclite, une alliance contre nature dépourvue de toute conviction politique. Ce n’était en réalité qu’une question de temps.
Des «démocrates sincères et convaincus» qui s’allient à un politicien revendiquant l’héritage du parti unique et qui est un farouche pourfendeur de l’héritage de la Révolution du 26 mars 1991 pour combattre l’un de leurs (Ibrahim Boubacar Kéita) juste parce qu’ils ne trouvent pas leurs intérêts dans sa gouvernance. Des politiciens en manque de réussite et en quête de popularité qui prennent un leader religieux à la conviction politique versatile comme «Autorité morale» !
Voilà des réalités qui faisaient du M5-Rfp une alliance contre-nature qui n’était fondée sur aucune idéologie ni conviction politique. Le seul point de convergence était cette volonté de faire partir feu IBK où vider son pouvoir de sa quintessence en faisant de lui un «roi nu». Le mouvement n’était donc bâti sur aucun projet concret pour le Mali. D’ailleurs, certains acteurs (acculés par les questions des journalistes) n’hésitaient pas à dire que le combat «c’est la démission d’IBK, on verra le reste après». Il fallait donc s’attendre à l’implosion du M5-Rfp à tout moment.
Il est clair que, comme l’a rappelé un confrère la semaine dernière, «il y a des valeurs, des sentiments et des acteurs qui ne peuvent pactiser. Tôt ou tard la nature prendra le dessus». Et c’est ce qui se passe aujourd’hui. Les premières brèches ont été ouvertes par la Coordination des mouvements, associations et sympathisants de l’Imam Mahmoud Dicko (avec Issa Kaou N’Djim à l’époque), dissoute mercredi dernier, et le Mouvement démocratique et populaire (MDP) du Dr Oumar Mariko (aujourd’hui en exil) qui ont été les premiers à manifester leur désaccord avec le Comité stratégique.
Suivront des ténors comme Mme Sy Kadiatou Sow, Modibo Sidibé, Cheick Oumar Sissoko, Mohamed Aly Bathily, Konimba Sidibé… Ceux-ci, lors d’un point de presse animé le 3 août 2022, ont annoncé la création du M5-Rfp Mali Kura qui ne reconnaissait plus le Comité stratégique du M5-RFP dirigé par Dr Choguel Kokalla Maïga. Pour ces «dissidents», l’ancien organe central a «trahi les idéaux du mouvement pour se transformer à la solde d’une minorité». En conséquence, «la rectification de la trajectoire de la transition» n’est restée qu’un slogan et le «M5-Rfp n’est plus que l’ombre de lui-même». Tout comme Dr Choguel Kokalla Maïga se retrouve finalement à la tête d’une «d’une simple caisse de résonance» en guise de gouvernement.
N’empêche que, jusque-là, Choguel avait réussi à maintenir à flot son navire entouré des cadres et militants qui avaient tout intérêt à ce qu’il reste PM car cela garantissait leurs intérêts… Les contestataires actuels sont ceux qui ont par la suite déchanté, notamment les associations et partis dont les représentants ont été éjectés du gouvernement lors du remaniement ministériel.
Naby
Éviter de se laisser distraire par des querelles de clochers
Après le 18 août 2020, les ténors du M5-Rfp ont crié sur tous les toits que les militaires ont parachevé leur combat. Une manière de revendiquer la part du lion dans la gestion de l’après-IBK. Mais, en réalité, le Conseil national pour le salut du peuple (CNSP) a sauvé le Mali d’une véritable tragédie. On se rappelle des décisions prises à l’issue d’un rassemblement de marcher sur la présidence de la République et d’autres institutions. Une volonté délibérée de sacrifier des innocents sur l’autel de leur mégalomanie.
Pensez-vous que ces mêmes personnes qui se disent responsables ou leaders auraient pu s’entendre sur la gestion du pouvoir si, à partir de la rue, elles avaient réussi à chasser feu de IBK du pouvoir ? Les clashes du moment donnent assez d’éléments de réponses à cette question. Sans compter que le camp présidentiel n’allait pas se laisser faire plus longtemps. Surtout pour qui sait qu’IBK n’avait plus le pouvoir que de nom depuis sa réélection. Il fallait donc s’attendre à ce que ceux dont les intérêts politiques et économiques étaient menacés par sa chute réagissent pour les protéger. Au finish, cela pouvait dégénérer à tout moment entre deux camps prêts à tout pour garder et ou prendre le contrôle du pays. Nous l’avons dit à l’époque, la prise du pouvoir par de jeunes officiers était le moindre mal pour notre pays.
Et ce serait une erreur pour les Maliens de croire que les clashes qui jaillissent ces dernières semaines des rangs du M5-Rfp ont pour objectifs de sauvegarder l’intérêt du pays. C’est juste à cause du mauvais partage du gâteau. Choguel s’est enfermé dans la guerre des clans (qu’il a aussi alimenté dans l’ombre) au lieu de rester au-dessus de la mêlée. Les protagonistes des deux camps ne se sont jamais battus pour le Mali et cela nous surprendrait qu’ils le fassent un jour. Ne nous laissons donc pas distraire par des querelles de clochers.
Restons concentrés sur la nécessité de refonder objectivement l’Etat malien afin que toutes les filles, tous les fils, toutes les couches socioprofessionnelles se retrouvent dans sa gouvernance ! C’est le seul combat qui vaille aujourd’hui pour amorcer le changement et l’émergence du Mali Kura !
Naby