Laxisme et complaisance dans la gestion de la chose publique, effritement de l’autorité de l’Etat, dérives dans la gestion des finances publiques, arrangements politiciens au sommet, influences extérieures excessives … Les tares des régimes démocratiques inquiètent et poussent à une tendance plus totalitariste.
Dans de nombreux pays de la planète et en particulier en Afrique, l’opinion publique semble, depuis plusieurs années, dérouler le tapis rouge à des régimes militaires, pourtant peu protecteur des libertés démocratiques.
En effet, depuis le discours de La Baule, par lequel le président français d’alors, François Mitterrand encensait la démocratie comme « meilleur système politique », l’intelligentsia mondiale avait pensé avoir définitivement établi un cliché universel. Il s’agit de proclamer que tout système politique qui n’était pas basé sur la démocratie n’était pas défendable. Il doit subir des coups de boutoir des peuples pour s’enduire du parfum étiquette « régime démocratique ». C’est ainsi que la France, chantre de cette pensée, avait décidé, en 1990, de conditionner ses aides aux Etats qu’elle dominait, à « l’ouverture démocratique ».
Mais, ces changements n’ont pas enregistré les succès escomptés, puisque de nombreux pays ont simplement enregistré une euphorie plutôt déstabilisatrice. Ce qui a conduit à de mauvaises compréhensions des conquêtes comme le pluralisme politique, les libertés fondamentales, la promotion et la défense des droits de l’homme avec comme conséquence l’affaiblissement de l’autorité de l’Etat. Toutes ces jubilations et exagérations vont entrainer des revers, dont la mauvaise gouvernance avec la propension à la corruption, au laisser aller, au démantèlement des outils de défense, etc.
Et, ce sont les années 2000-2010 qui vont sonner le réveil brutal comme pour un retour à la case départ. D’où des insurrections, des mutineries militaires ayant renversé certains régimes dits démocratiques, des troubles politiques divers, etc. Ces changements de retour de la manivelle sont marqués au Rwanda par l’arrivée de Paul Kagamé au pouvoir, le retour de Dénis Sassou N’Guesso au Congo-Brazzaville, etc. Ce vent de l’Est se poursuivra avec les coups d’Etat d’Assimi Goïta au Mali, Damiba, puis Ibrahim Traoré au Burkina Faso, Mamadi Doumbouya en Guinée.
Tous ces régimes prônent la rupture avec le système démocratique précédent fondé sur une sorte de clientélisme politique, la soumission outrancière à la politique française, la faiblesse des moyens de défense de l’Etat, l’impunité, etc. Ce qui fait poser la question de savoir si les insuffisances du système démocratique doivent incliner à préférer le totalitarisme militaire. Les régimes d’exception ou régimes militaires au Mali et dans les pays voisins sont-ils à soutenir pour des lendemains meilleurs de la gouvernance ? Les observateurs semblent opter pour une réponse affirmative, du fait des signaux plutôt porteurs.
A priori, les régimes militaires s’inscrivent dans une réduction des espaces de libertés démocratiques. Ce qui contraint les populations à plus de retenues dans les prises de positions publiques et politiques. Cela dope les réflexes régaliens de l’Etat, puissance publique dans son rôle de protecteur et défenseur de l’intérêt général. Et tout le monde s’accorde à reconnaître que nos jeunes Etats doivent être plus forts à travers des « institutions fortes ». C’est cette option qui a fait le succès de la gouvernance d’un certain Paul Kagamé au Rwanda, pays classé parmi les meilleurs (au plan du progrès socio-économique), malgré son penchant vers la dictature. Idem pour des pays comme l’Egypte, le Nigéria, l’Afrique du Sud, l’Algérie, le Maroc, la Tunisie, qui ont tous, vaille que vaille, mis en place des système politiques innovants donnant la primauté de l’autorité à la puissance publique.
C’est pourquoi, pour des raisons d’Etat ou dans le but de garantir l’intérêt général, les libertés démocratiques peuvent être réduites ou limitées, afin de hisser l’Etat sur des bases du succès collectif. S’y ajoute que les systèmes démocratiques ont péché par leur négligence à l’égard des forces armées. Or, le contexte de crise sécuritaire est venu rappeler cette défaillance gravissime.
Et c’est cela qui poussent certains observateurs à jeter des fleurs aux pouvoirs militaires ou à appeler au règne de la dictature pure et dure pour assainir la gouvernance de nos pays. Car, assurent-ils, nos pays ont plus besoin de se développer à travers une mise au pas des populations, plus préoccupées par leur bien-être collectif (santé, école, logements, emplois, etc) que par autre chose.