Le week-end dernier, le Premier ministre burkinabè Kyélem Apollinaire de Tambèla était en voyage à Moscou. Le Burkina Faso cherche un soutien militaire, et celui-ci pourrait être russe.
Le voyage est quasiment passé inaperçu. Le 9 décembre dernier, le Premier ministre burkinabè Kyélem Apollinaire de Tambèla était à Moscou. Un périple parti, selon la presse, de Ouagadougou deux jours plus tôt, en passant par le Mali. Désigné chef du gouvernement il y a un mois et demi par le capitaine Ibrahim Traoré, Kyélem de Tambèla semblait être, au premier abord, le fer de lance des négociations entre la France et le Burkina Faso. Avant de devenir Premier ministre, il assurait en effet qu’« il ne faut pas rompre avec la France pour la Russie ». Ajoutant que « les manifestants qui brandissaient le drapeau russe ne connaissent pas les affaires de l’État » et que « la Russie est plus exploiteuse que la France ; demandez des nouvelles à la Somalie, à l’Éthiopie et à l’Angola ».
Depuis, Kyélem de Tambèla a-t-il mis de l’eau dans son vin ? Alors qu’il devait gérer des affaires courantes le 9 décembre — une rencontre avec les syndicats était prévue —, le Premier ministre était en Russie. Le plus étonnant est le secret dans lequel s’est effectué le voyage. Jeune Afrique indique en effet que Tambèla est arrivé à Bamako dans un avion de l’armée de l’air… malienne. Avant de prendre un vol de ligne pour Moscou.
Le Mali comme intermédiaire
Accompagné d’une dizaine d’officiels, le Premier ministre burkinabè a donc négocié son voyage directement avec le régime malien, jugé très proche de la Russie. Selon toute vraisemblance, Assimi Goïta, le président malien de la Transition, tenterait donc de convaincre Ibrahim Traoré que la Russie est un allié plus fiable que l’Europe. Car Traoré le sait : s’il fait le choix de Moscou, il s’attirera forcément les foudres de Bruxelles, mais surtout de Paris.
Alors que le Premier ministre affirme qu’il s’agissait d’une simple « visite privée », tout porte à croire que, au vu de la taille de sa délégation, composée notamment de militaires et de ministres, Kyélem de Tambèla a en réalité été parler aux autorités russes au nom du Burkina Faso. La visite aurait duré plus de 48 heures.
La présence de militaires montre également que le Premier ministre burkinabè pourrait être à la recherche d’un partenaire pour le dossier sécuritaire. La précédente junte militaire a été putschée, notamment à cause de son manque de résultats en matière de lutte antiterroriste. Et Traoré est bien décidé à reprendre en main la sécurisation du Burkina Faso.
Déjà, des responsables français estiment que le Burkina Faso a fait un pas en direction du groupe paramilitaire Wagner. Les prochaines semaines seront certainement consacrées à des discussions intenses entre Paris et Ouagadougou. Mais si le Burkina contractualise avec la Russie, la France menacera certainement le régime en place de représailles.