Le narratif occidental magnifie le Qatar, pays indépendant depuis 1971 de la Couronne britannique, comme une puissance mondiale financière et régionale géopolitique. Alors que cet Emirat de 11,437 km2 de superficie, situé dans le Golfe arabo-persique, n’est visiblement qu’un « nain » géographique. Encore que sur la population totale estimée à 1,7 millions d’habitants, les « nationaux » qataris ne représentent que 200 000 âmes. Alors, comment ce micro-Etat peut-il être qualifié de puissance géostratégique alors qu’il ne vaut pas grand-chose sur la carte de la planète terre ? Le questionnement en vaut la peine. Mais, une connaissance du potentiel économique de ce pays, frontalier de l’Arabie Saoudite et de l’Iran, s’avère nécessaire pour comprendre tout l’enjeu qu’il constitue sur le plan mondial aux yeux du monde occidental.
Le Qatar qui a obtenu de la Couronne britannique son indépendance le 3 septembre 1971, est un pays immensément riche en ressources d’hydrocarbure. Son PIB par tête est de 97 000 dollars, soit le plus élevé du monde, juste derrière celui du Luxembourg. Sa richesse insolente provient donc à la fois du pétrole et du gaz. Mais surtout du gaz dont on estime qu’il est assis sur 14% des réserves mondiales de gaz naturel. Il est à la fois le troisième détenteur (soit environ 26 milliards de m3) et le troisième producteur, après la Russie et l’Iran de l’autre côté du Golfe et avec lequel le Qatar partage un des plus grands gisements off-shore du monde, appelé North Dome du côté qatari et South Pars du côté iranien. Mais en dépit de sa richesse, le Qatar ne peut assumer son indépendance politique. Il demeure en réalité un protectorat, non plus britannique, mais américain.
A cet effet, ce pays est véritablement un pion du monde occidental dans le monde arabo-persique. Ses dirigeants ne font qu’appliquer les diktats américains. Le Qatar n’est en réalité qu’une entité gazière et un hub capitaliste dans le Golfe arabo-persique. D’un point de vue occidental, au-delà des aspects financiers dont on exagère la portée politique, l’émirat constitue une porte d’entrée et un intermédiaire utile avec certaines des forces et personnalités montantes dans le monde arabe sunnite ou dans des situations critiques.
Ainsi, ces dernières années, le Qatar fait montre d’une hyper-activité diplomatique. Ce pays est impliqué dans plusieurs conflits au Moyen et Proche-Orient. Il est avéré que Doha a directement participé dans l’assassinat du Guide Mouammar Kadhafi et la déstabilisation de son pays. Une affaire dans laquelle le Qatar a largement contribué financièrement. Le pays est pointé du doigt dans le financement des islamistes au Maghreb et au Sahel. A cet effet, l’Emir du Qatar aurait accordé une aide financière aux mouvements armés ayant pris le contrôle du nord du Mali (2011-2012).
Dans un article intitulé « Notre ami du Qatar finance les islamistes du Mali », Le Canard enchaîné expliquait que la Direction du renseignement militaire (DRM), qui relève du Chef d’Etat-major des armées françaises aurait recueilli des renseignements selon lesquels « les insurgés du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA), les mouvements salafistes Ansar Dine et même Al Qaida au Maghreb islamique (AQMI) et donc le MUJAO auraient bien reçu une aide en dollars du Qatar ». Le Canard enchaîné précisait encore que les autorités françaises sont informées des agissements des dirigeants de l’Emirat dans cette partie du nord du Mali qui partage 1 300 kilomètres de frontières avec l’Algérie. N’est-ce pas une évidence que le Qatar contribue à la déstabilisation des pays du Sahel ! Pourtant, c’est encore ce même pays qui prétend financer leur économie. Quel paradoxe !
Gaoussou Madani Traoré