Voici l’interview intégrale du président de l’Assemblée législative de la transition (AST) du Burkina Faso, Ousmane Bougouma, à Sputnik.
Sputnik: dans le thème du sommet “Russie-Afrique dans le monde multipolaire”, la Russie affirme œuvrer pour changer l’ordre mondial unipolaire. Comment appréciez-vous les changements actuels dans le monde que la Russie a provoqués?
Ousmane Bougouma: Ce thème vient à un moment capital parce que le monde subit actuellement beaucoup de changements, et c’est bien que la Russie participe à l’évolution pour un monde multipolaire, où le pouvoir n’est pas centralisé au niveau d’un État, mais réparti entre plusieurs États sur le continent. Donc, cela nous a invités à réfléchir ensemble à la construction de ce monde multipolaire pour l’avenir, pour plus de paix; et c’était avec un grand plaisir que le Burkina Faso a pris part à cette conférence, où nous en tant que parlementaires représentant le peuple, nous essayons de voir quelle peut être la contribution du parlement à ce débat-là.
Sputnik: À votre avis, dans quels domaines cette coopération doit être renforcée entre le Burkina Faso et la Russie?
Ousmane Bougouma: Je précise que c’est le gouvernement qui conduit la coopération au niveau international. Il y a bien sûr la diplomatie parlementaire, et en tant que parlementaires, nous accompagnons le gouvernement dans ce sens. Au regard de la transition au Burkina Faso, la priorité en termes de coopération est d’abord le domaine de la sécurité et de la défense pour aider le Burkina Faso. Il faut voir avec la Russie, comment elle peut apporter un soutien dans le cadre de la lutte contre le terrorisme. Autres domaines de coopération possibles: l’économie. Dans ce domaine-là, on peut citer notamment le transport, l’agriculture et tout ce qui concerne l’énergie et les hydrocarbures. Mais le domaine prioritaire en termes de coopération c’est celui de la défense pour le Burkina Faso.
Sputnik: Nos gouvernements ont exprimé vouloir une commission gouvernementale mixte. Y a-t-il des discussions en ce sens au niveau parlementaire?
Ousmane Bougouma: Nous avons été reçus par le président de la Douma d’État, Monsieur Volodine, et nous avons convenu de mettre en place un groupe d’amitié, ce qui est équivalent à une commission mixte. Ce groupe d’amitié parlementaire va voir le jour prochainement, et des parlementaires burkinabè et russes vont travailler ensemble et partager leurs expériences pour voir comment renforcer la coopération entre nos deux pays.
Sputnik : Avez-vous décidé de futures visites pour mettre en place ce groupe d’amitié? Quand?
Ousmane Bougouma : Exactement, M.Volodine nous a donné l’assurance d’une visite au Burkina Faso avant le mois de juillet.
Sputnik: Il va venir lui-même au Burkina ?
Ousmane Bougouma: Il souhaite venir au Burkina Faso avant le juillet. Durant ce mois se tient le sommet où nous sommes également invités. Entre-temps il a aussi demandé à ce qu’une délégation du Burkina Faso revienne en visite officielle en Russie. C’est-à-dire que les relations entre ces deux pays vont s’approfondir progressivement; des missions vont être menées de part et d’autre. Donc c’est un début et nous allons progressivement avancer ensemble.
Sputnik : Il y a une volonté exprimée alors ?
Ousmane Bougouma: Il y a une volonté exprimée de part et d’autre. Nous avons été très bien accueillis et il y a une volonté véritablement marquée au niveau de la Douma d’état de nous accompagner. De notre côté aussi il y a cette volonté d’améliorer et d’approfondir la coopération entre nos deux parlements.
Sputnik: Le Burkina a exigé le retrait de tout le personnel militaire français. Quel bilan faites-vous de cette présence militaire dans votre pays au cours des années passées ?
Ousmane Bougouma : Il y a eu cette présence de militaires français au niveau du Burkina Faso et justement c’est parce que le bilan n’était pas très satisfaisant au regard de la lutte contre le terrorisme que le gouvernement burkinabè a demandé le retrait des militaires français. Dans l’accord qu’il y avait avec la France, cette présence visait à apporter un appui à l’armée burkinabè dans le cadre de la lutte contre le terrorisme.
Le constat malheureusement, c’est que le terrorisme ne faisait qu’avancer, donc le gouvernement a décidé d’arrêter cet accord parce que les résultats n’étaient pas au rendez-vous. L’armée française s’est retirée du Burkina Faso actuellement, et l’armée burkinabè s’est réorganisée et monte progressivement en puissance en termes de lutte contre le terrorisme.
Sputnik: l’Iran a annoncé récemment créer une banque commune avec l’Afrique. Quels horizons cette banque peut ouvrir pour l’Afrique? Est-ce que vous pensez que la Russie doit peut-être créer une telle banque aussi?
Ousmane Bougouma: Oui, pourquoi pas! Dès lors qu’on commence à approfondir la coopération avec un pays, elle est à la fois sur le plan diplomatique, mais aussi, et surtout, sur le plan économique. C’est-à-dire qu’il y a des flux en termes de marchandises entre les deux pays qui vont se faire et pour financer cela, il est bon qu’un système financier ou une banque puisse se mettre en place.
Vous venez de donner l’exemple de ce qui se met en place en Iran, je n’ai pas une idée d’horizon temporelle à laquelle cette banque peut s’installer au Burkina. Mais s’il y a un développement de la coopération aussi avec la Russie dans les secteurs clés de l’économie, il est bon de voir comment au plan financier on pourrait avoir une banque, pourquoi pas qui s’installe au Burkina Faso et qui peut être un vecteur à la fois pour financer les activités sur place, mais aussi dans les rapports entre le Burkina Faso et la Russie.
Cela faciliterait beaucoup les échanges parce qu’aujourd’hui au Burkina Faso on a la volonté d’importer beaucoup de choses de Russie, mais l’on peut avoir des difficultés par rapport aux transactions ; Si l’on a une institution financière qui connaît le commerce international avec ses contraintes, cela va beaucoup faciliter les activités de nos hommes d’affaires.