L’Association Malienne des Expulsés (AME) n’est pas restée en marge de la déclaration raciste du président tunisien, Kaïs Saïed, le 21 février 2023, lors de la réunion du conseil national de sécurité contre les migrants subsahariens. Le mardi 7 mars 2023 à Djélibougou, lors d’une conférence de presse, Ousmane Diarra (président de l’AME), Mamadou Konaté, juriste à l’AME, et Amadou Coulibaly, chargé du volet filet social à l’AME, ont ouvertement fait savoir leur mécontentement à l’opinion nationale et internationale. Le président Ousmane Diarra a vigoureusement protesté contre le traitement inhumain infligé aux migrants en Tunisie, attiré l’attention de la communauté nationale et internationale sur la situation des migrants subsahariens en Tunisie ; et condamné fermement cet acte ignoble qui, de nos jours, doit remonter d’un autre siècle. «L’Ame condamne fermement le discours tenu par le président tunisien qui appelle au racisme, à la xénophobie et à la violence envers nos compatriotes vivant en Tunisie ; rappelons au gouvernement tunisien son adhésion à l’Union Africaine qui est une organisation régionale promouvant le panafricanisme et l’unité africaine», déclare-t-il. Il a, par ailleurs, invité le gouvernement tunisien à présenter des excuses solennelles aux migrants subsahariens et par extension aux pays de l’Afrique subsaharienne afin de calmer les esprits et de réaffirmer son attachement aux valeurs africaines ; exhorté le gouvernement malien à renforcer davantage les mesures de protection des Maliens établis en Tunisie et dans les autres pays du Maghreb; et interpelé la communauté internationale sur le traitement réservé aux migrants subsahariens partout où ils se trouvent et à veiller au respect des droits de l’Homme partout dans le monde afin d’être cohérente avec elle même.
La Tunisie n’avait aucun fondement juridique pour s’en prendre aux migrants subsahariens de la sorte. Selon Mamadou Konaté, juriste à l’AME, le président tunisien ne devait aucunement tenir de tels propos en raison de l’engagement de la Tunisie dans beaucoup de conventions et protocoles qui protègent les droits des migrants ou qui protègent les droits de l’Homme tout court. «En premier, vous avez la charte africaine des droits de l’Homme et des peuples qui protège tous les Africains sur le continent africain. Et la Tunisie est partie prenante de cette charte. A partir du moment qu’elle est partie prenante de cette charte, ces genres de propos du président Kaïs ne devraient pas avoir lieu. Ensuite, nous avons plusieurs conventions de protection des droits humains de façon générale. Il y a la convention contre la torture inhumaine, dégradant dont la Tunisie est membre. Il y a ensuite la convention internationale des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leurs familles. Il y a aussi le protocole en cours de libre circulation de l’Union Africaine au sein de l’espace africain», a énuméré Mamadou Konaté.
Amadou Coulibaly a fait le point des arrivées massives de nos compatriotes qui sont à l’étranger et qui sont programmés dans les jours et mois à venir. « Du 11 janvier 2023 au 5 mars 2023, on a constaté plus de 2139 migrants retournés. Parmi ces lots, il y avait 20 femmes, 16 filles mineurs et 28 garçons mineurs. Récemment, le 4 mars dernier, il y a eu 135 migrants venus de Tunisie. Parmi ce lot aussi, il y avait 25 femmes et 13 enfants. Le nombre de personnes enregistrées à l’ambassade du Mali en Tunisie à cause des propos déplacés du président tunisien s’élevait à 269 personnes. A partir du 3 mars 2023, on a eu au total 308 de nos compatriotes expulsés d’Algérie. C’est pour vous dire qu’actuellement, nos compatriotes souffrent à l’extérieur. On a constaté que depuis le mois de décembre 2022, il y a plus de 1000 personnes qui sont jetées en pâture dans le désert. Nous invitions les autorités à prendre des mesures pour protéger plus les Maliens de l’extérieur », a-t-il déclaré
A rappeler que le 21 février 2023, le président tunisien, Kaïs Saïed, s’est, lors de la réunion du Conseil de sécurité nationale, pris aux « hordes de migrants clandestins » qui perpétuent à son avis « des violences et des crimes » à travers la Tunisie. Il est allé jusqu’à accuser « les immigrés illégaux d’Afrique subsaharienne » de vouloir « modifier la composition démographique de la Tunisie » afin d’en faire « un pays africain ». Suite à cette déclaration du président tunisien, les migrants subsahariens de toutes catégories (réguliers, irréguliers, étudiants, malades, etc.) ont été pris pour cibles par une partie de la population tunisienne. Ils ont fait l’objet d’insultes, d’agressions physiques, d’arrestations, d’expulsions de leurs logements, de saccages de leurs biens, et de racismes. A noter aussi que la Tunisie est plutôt un pays de transit et non un pays de destination pour les migrants subsahariens. Ainsi, selon le Forum tunisien pour les droits économiques et sociaux (FTDES), si plus de 21000 ressortissants d’Afrique subsaharienne se trouvent sur le sol tunisien, la plupart d’entre eux ne resteront pas sur le territoire et continueront leur exile vers les pays du Nord. «Par son rôle de carrefour migratoire, la Tunisie est, depuis des années, un acteur déterminant dans l’externalisation des politiques européennes d’immigration. Elle joue un rôle de police des frontières pour l’Union Européenne (UE), a fait remarqué l’AME. Aux dernières nouvelles, dit l’AME, la Tunisie a pris des mesures d’apaisement « la carte de séjour des étudiants est d’une année, la carte de séjour de 3 mois à 6, les numéros verts sont laissés pour dénoncer toutes agressions. Mais il reste la mise en œuvre.