– Le 19 février, l’Algérie a annoncé l’affectation d’un milliard de dollars à des projets de développement dans les pays africains
L’Algérie a alloué un milliard de dollars à des projets de développement dans les pays africains. Le pays veut retrouver sa position régionale qui a décliné pendant la maladie de l’ancien président Abdelaziz Bouteflika et avoir son mot à dire dans la région.
Le 19 février, l’Algérie a annoncé l’affectation d’un milliard de dollars à des projets de développement dans les pays africains.
Le Premier ministre Aymen Benabderrahmane a prononcé un discours lors du 36ème sommet des dirigeants de l’Union africaine dans la capitale éthiopienne Addis-Abeba, a rapporté l’agence officielle du pays APS.
“L’Algérie a décidé d’octroyer 1 milliard de dollars à l’Agence algérienne pour la coopération internationale pour financer des projets de développement dans les pays africains et assurer la solidarité”, avait-il déclaré, ajoutant que cette mesure était due à “la conviction de l’Algérie que la sécurité et la stabilité en Afrique sont liées au développement”.
Le financement de l’Algérie au profit de pays africains pour des projets de développement liés à la sécurité et à la stabilité ne se limite pas à la sécurité et à la stabilité. Au-delà de cette évidence, cette étape franchie par l’Algérie, intentionnellement ou non, sert aussi d’autres objectifs.
– Il ne s’agit pas de la première expérience
Ce soutien aux projets de développement n’est pas la première aide financière de l’Algérie à des pays africains. En 2013, le gouvernement algérien avait annulé environ un milliard de dollars de dettes de pays africains.
De même, l’Algérie a annoncé en 2018 avoir annulé la dette de 14 pays africains à hauteur de 3,5 milliards de dollars depuis 5 ans pour des raisons humanitaires.
Cette aide humanitaire, qui était associée à une augmentation des revenus du pétrole et du gaz, n’a pas duré longtemps.
Ainsi, au lieu de supprimer les dettes des pays africains, l’Algérie s’est tournée vers le soutien financier au continent avec la création de l’Agence algérienne pour la coopération internationale et le financement de projets de développement qui bénéficient directement aux populations les plus pauvres.
Le rôle de l’Agence algérienne pour la coopération internationale devrait être similaire à celui de l’Agence turque de coopération et de coordination (TIKA), qui entreprend la restauration de sites historiques et soutient des projets agricoles et éducatifs.
La sortie de l’Algérie de la crise économique et financière suite à l’augmentation des revenus pétroliers a également facilité le paiement de cette somme importante.
L’Algérie tient à diversifier son économie afin qu’elle ne repose pas uniquement sur le pétrole et le gaz et tente d’augmenter le volume des exportations non combustibles. Le volume des exportations non combustibles de l’Algérie, qui était inférieur à un milliard de dollars en 2019, a atteint 7 milliards de dollars en 2022. L’Algérie vise à augmenter ce taux à 10 milliards de dollars en 2023 et 15 milliards de dollars en 2024.
– Les projets de l’Algérie
L’Algérie donne la priorité aux projets de développement de type ” intégrateur “, ou aux projets qui contribuent aux efforts de développement du continent africain.
À cet égard, l’Algérie a entrepris plusieurs projets, tels que celui de l’autoroute transsaharienne qui va traverser la Tunisie, le Mali, le Niger, le Tchad, pour rejoindre le Nigeria, la plus grande économie du continent africain. L’autoroute est accompagnée d’un projet d’infrastructure internet en fibre optique.
Il existe également un projet de gazoduc pour le transport du gaz nigérien vers l’Algérie via le Niger, pour lequel l’Algérie s’est engagée à financer la section nigérienne.
Parmi ces projets figure également la construction d’un projet d’autoroute pour relier les régions de Tindouf en Algérie et de Zouerate en Mauritanie, pour un coût de 1 milliard de dollars. Ce projet permettra à l’Algérie d’atteindre les marchés d’Afrique de l’Ouest en passant par la Mauritanie.
À travers ces projets, l’Algérie entent donner la priorité aux pays du Maghreb arabe, notamment la Mauritanie, la Libye et la Tunisie, ainsi qu’aux pays du Sahel comme le Niger, le Mali et le Tchad, et aux pays d’Afrique de l’Ouest comme le Nigeria et le Sénégal.
En outre, elle offre une ouverture aux pays africains, notamment aux pays amis tels que le Soudan, l’Éthiopie, l’Ouganda, le Kenya, la Namibie et l’Afrique du Sud, qui souhaitent utiliser ce système pour financer des projets dans la région.
– Combattre le terrorisme par le développement
D’autre part, la vision antiterroriste de l’Algérie dans la région du Sahel est basée sur des aspects économiques plutôt que sécuritaires.
Le gouvernement algérien considère que la principale raison de la propagation des groupes armés, de la violence et de l’insubordination dans la région du Sahel et en Afrique est la pauvreté et le manque de produits de première nécessité.
Interrogé par le journal français Le Figaro sur “la présence des mercenaires de Wagner au Mali”, le président algérien Abdelmadjid Tebobune a indiqué que le Mali gagnerait à investir l’argent versé à la société de sécurité russe dans le développement.
L’Algérie a donc créé le 20 avril 2020 l’”Agence algérienne pour la coopération internationale” dans le but de soutenir les objectifs de développement de l’Afrique et ainsi mettre fin aux groupes armés.
– L’Algérie s’inquiète des avancées d’Israël sur le continent africain
L’Algérie n’est pas rassurée par les percées d’Israël sur le continent africain et tente donc d’accroître son influence dans la région en apportant un soutien financier aux projets.
La bataille diplomatique menée par l’Algérie, soutenue par l’Afrique du Sud et des pays amis sur le continent, pour empêcher Israël de bénéficier du statut d’observateur au sein de l’Union africaine a été un signal d’alarme contre le danger de l’expansion israélienne sur le continent.
Pendant la période de maladie de l’ancien président Abdelaziz Bouteflika (2013-2019), l’Algérie a connu un ralentissement sur le plan diplomatique. Une baisse des prix du pétrole a également été enregistrée entre 2015 et 2020. Israël, en revanche, a réalisé de nombreuses percées sur le continent africain au cours des dernières années et a établi des relations diplomatiques avec de nombreux pays du continent. Le Tchad a, par exemple, tout récemment ouvert une ambassade à Tel Aviv.
L’Algérie en allouant 1 milliard de dollars à des pays africains tente d’empêcher les efforts d’Israël d’établir une influence sur le continent et de compenser la période de déclin qu’elle a connue.
Le différend qui oppose l’Algérie au Maroc est également l’une des raisons pour lesquelles l’Algérie soutient des projets de développement dans des pays africains.
– L’Algérie veut montrer sa puissance financière et avoir son mot à dire en Afrique.
Bien qu’étant la quatrième économie d’Afrique, l’Algérie, seul pays africain à n’avoir pratiquement aucune dette extérieure, veut montrer sa force financière à un moment où les pays du continent connaissent des conditions économiques difficiles.
Cette démarche de l’Algérie, qui vise à combattre le terrorisme par l’économie, a d’autres objectifs, intentionnels ou non. Il apparaît que des questions telles que la migration irrégulière, l’expansion d’Israël en Afrique, le déclin du soutien africain à la question palestinienne et à celle du Sahara occidental, l’axe américano-franco-européen et le conflit Russie-Chine pour dominer l’Afrique et en faire une arène de guerre ont également incité l’Algérie à prendre une telle initiative.
L’Algérie s’efforce de faire entendre sa voix en Afrique, dont elle est membre, et de parvenir à un degré élevé de coopération avec les pays de la région.