Pour renforcer son onction de soutien populaire, le pouvoir de Transition surfe sur la fibre patriotique du peuple malien : « la reconquête de notre souveraineté ».
Le pouvoir du Colonel Assimi Goïta a cru bon devoir instituer une journée de célébration de la souveraineté retrouvée de son pays, le Mali sur le 14 janvier. Mais la véritable question qui se pose et mérite une réponse objective est la suivante : Qu’est-ce que la politique de la « souveraineté retrouvée » a permis au Mali de réaliser en termes de progrès réel ? Les défenseurs de cette souveraineté au relent panafricaniste brandissent souvent un mot : « la fierté d’être Malien ou d’être respecté comme tel ». Une réponse qui, il faut le reconnaître, laisse plutôt perplexe tout observateur objectif. Car, aucun baromètre ne permet d’attester ou de mesurer cette fameuse fierté ou ce respect qu’on dit avoir retrouvé, alors même que chaque Malien continue de chercher le diable pour le tirer par la queue !
Quelle souveraineté avons-nous retrouvée si la plupart des Maliens ont encore faim ou du moins ne mangent pas les trois repas quotidiens ? De quelle souveraineté peut-on parler lorsque nos populations n’arrivent pas à se soigner, à se loger, à aller à une école performante et adaptée au marché de l’emploi ? De quelle fierté doit-on se glorifier quand, des milliers de jeunes Maliens continuent de se jeter sur les routes risquées de l’immigration clandestine, mourant en mers ou jetés en prisons pour être déportés dans certains pays africains ou européens ? Et dire que nos plus hautes autorités sont dans la diatribe permanente pour dire à qui veut les entendre « nous n’avons de leçons à recevoir de personne » ! Pas même de leçon de bonne gestion des affaires de l’Etat ?
Certes, les populations ont soif de l’affirmation leur souveraineté, face à un Occident dominant et néocolonialiste, mais quelle fierté avons-nous, quand nos défis sont encore existentiels ? Quand l’écrasante frange de la population malienne se bat pour simplement survivre, quelle fierté ou respect avons-nous ? Quelle fierté ou respect d’être malien, simplement parce que nos autorités entretiennent des relations plutôt exécrables avec plusieurs pays dans le concert des Nations ?
En outre, de nombreux projets de développement au Mali n’ont-ils pas bénéficié d’appuis financiers et même techniques d’expatriés occidentaux ? Ces pays n’ont-ils pas apporté une assistance ou une aide multiforme aux populations de diverses zones du vaste territoire national ? Il devient alors inconséquent de mordre ces mains nourricières sous prétexte que nous voulons reconquérir notre souveraineté. Et, comme Dr Hamed Sow le disait, c’est par un processus réfléchi et graduel que le Mali va prouver que sa souveraineté est une priorité à défendre. Non, sans se livrer à ce combat expéditif, alors que nos pharmacies sont encore inondées de médicaments subventionnés par les programmes de l’OMS, sans compter des opérations de soutiens de la Banque Mondiale, du FMI, de l’USAID, etc.
Cette gouvernance de rupture pour séduire les populations semble avoir simplement pour but de se donner une bonne conscience pour un dangereux blanc-seing, contraire à l’esprit d’une Transition. Car, les défenseurs de ce populisme n’hésitent même pas à dire qu’aller aux élections est un reflux de cette marche de la souveraineté retrouvée.
Boubou SIDIBE