Le 10 mai 2024, la clôture solennelle au CicB de sa phase nationale démarrée 5 jours plutôt, a bouclé ainsi la boucle du Dialogue national inter-malien. Le lundi 13 mai 2024, dans la salle de banquet du Palais de Koulouba, le Chef de l’État, initiateur du processus, en a reçu le rapport des mains du Président du Comité de Pilotage, au cours d’une cérémonie solennelle.
Pour rappel, c’est dans son discours du nouvel an 2024 que le Président de la Transition a annoncé avoir pris «l’option de privilégier l’appropriation nationale du processus de paix, en donnant toutes ses chances à un dialogue direct inter-maliens pour la paix et la réconciliation, afin d’éliminer les racines des conflits communautaires et intercommunautaires». Cette décision, a-t-il précisé, exige de nous que nous nous donnions la main, afin de réconcilier notre pays et assurer la cohésion. Nationale. «Il s’agit en effet de créer les conditions pour que chaque Malienne et chaque Malien puisse s’épanouir dans un environnement marqué par la confiance retrouvée entre les communautés sous la protection de l’État», a ajouté le Chef de l’Etat.
Deux idées forces émanent de la proposition présidentielle : l’inclusivité dans la participation et la pertinence des recommandations de cet énième rendez-vous initié afin que soit restaurée la stabilité du Mali et la cohésion entre ses fils, protagonistes de leur destin. Le Comité national du pilotage mis en place a-t-il délimité le champ du débat aux thématiques de paix et réconciliation, conformément à l’esprit de l’annonce du Président de la République?
Force est d’en douter. D’abord, parce que l’inclusivité du processus reste sujet à caution du fait de la polémique suscitée par l’absence des formations politiques et des associations à caractère politique récemment suspendues, celle de plusieurs acteurs politiques et de la société civile en ‘’’exil forcé’’ et celle des groupes armés rebelles et des groupes djihadistes qui continuent de faire parler les armes.
Pour le Premier ministre, Moussa Mara, le Dialogue omet des acteurs-clés, s’éloigne de son objet et évoque des sujets déjà discutés. «L’examen des termes de référence du dialogue permet de constater que les thématiques de discussions retenues sont fort éloignées de l’objectif général et des objectifs spécifiques pourtant clairement énoncés par les mêmes termes de références», a-t-il souligné dans une tribune largement diffusée par la presse et des plateformes digitales.
Quid des recommandations ? La corbeille proposée constitue-t-elle une alternative à l’accord pour la paix et la réconciliation issu du processus d’Alger?
Jugez-en : la prolongation de la transition, la candidature du Colonel Assimi Goïta à l’élection présidentielle, la promotion des 6 colonels au grade de général, la réduction du nombre des partis politiques, la relecture de la charte de la transition….
Ni plus ni moins que des recommandations jugées hors-sujets par plus d’un auxquelles s’ajoutent celles issues de précédentes rencontres, à l’instar du Dialogue national inclusif (Dni) ou des Assises nationales de la refondation (Anr) pour ne citer que ces fora.
Pour les parties signataires de la déclaration commune du 31 mars 2024, «le dialogue inter-maliens pour la paix et la réconciliation nationale, pour l’appropriation nationale du processus de paix” a été vidé de son contenu, détourné de ses objectifs initiaux». «L’exercice qui vient de se terminer n’a accouché d’aucune initiative malienne de paix et de réconciliation. Ses recommandations ne reflétant aucunement la volonté du Peuple, risquent d’exacerber la crise politique nationale et de plonger notre pays dans une instabilité sociale sans précédent. En quoi les recommandations relatives la prorogation de la durée de la transition, à la future candidature du colonel Assimi Goïta, à l’affaiblissement et au musellement des partis politiques concourent-elles au rétablissement de la paix ? Pourquoi annoncer l’ouverture d’un dialogue avec les groupes armés à la fin du “Dialogue inter-Maliens” et non durant ce “Dialogue” ?», s’interrogent les parties signataires de la déclaration commune du 31 mars 2024.
Tout ça pour ça ?
Chiaka Doumbia