Sur le plan économique, l’année 2024 était partie pour marquer un tournant décisif pour le Sénégal. Mais du fait d’une profonde crise politique qui dure depuis le 3 février dernier, les incertitudes persistent, même si elles laissent entrevoir des défis majeurs pour le prochain régime, après le départ de Macky Sall.
Depuis la décision inédite du président sortant Macky Sall de reporter le scrutin présidentiel initialement prévu le 25 février 2024, le Sénégal fait la une des médias du monde. Le chef de l’Etat, qui dit être prêt à partir au soir du 2 avril, le réaffirmait lors du dialogue national : « Doyal na seuk (j’en ai assez). » Mais il ne semble pas encore convaincre les Sénégalais sur ses véritables intentions.
En attendant la décision du Conseil constitutionnel considéré comme le dernier rempart, le Sénégal fait face à des défis économiques majeurs, dont l’exploitation du pétrole et du gaz. « La mise en œuvre du troisième Plan d’actions prioritaires (PAP3) devra coïncider avec l’entrée du Sénégal dans une ère nouvelle, avec l’exploitation de ses ressources pétrolières et gazières. Ce tournant stratégique marque notre progression vers un développement hors de la catégorie des pays les moins avancés (PMA) », a rappelé Doudou Ka, interpellé par « Jeune Afrique ».
En tout état de cause, Dakar place résolument ses espoirs dans le lancement de deux champs offshores majeurs. D’abord, Grand-Tortue Ahmeyim, partagé avec la Mauritanie et sous la direction des groupes BP et Kosmos, est dédié à la production de gaz.
Retardée à plusieurs reprises en raison de complications dans les travaux sous-marins et de l’indisponibilité de la barge flottante de production, de stockage et de déchargement, sa mise en service est prévue pour le troisième trimestre de 2024. La phase initiale ambitionne de produire chaque année environ 2,5 millions de tonnes de gaz naturel liquéfié (GNL), principalement destinées à l’Europe. La seconde phase vise à augmenter cette production à 5 millions de tonnes.
Le second projet majeur est celui de Sangomar, dont Woodside Energy détient 82 % du gisement et Petrosen 18 %. Des désaccords entre les autorités sénégalaises et Woodside sur les conditions contractuelles et les intérêts financiers n’encouragent pas à rattraper le retard pris sur le planning de mise en production. Initialement programmé pour 2021, puis repoussé successivement à 2022 et à 2023, le lancement du gisement pétrogazier a finalement été reporté au premier semestre de 2024. L’objectif de production quotidienne est de 100 000 barils de pétrole.
En parallèle, en janvier dernier, la société turque Aksa Energy a initié le développement d’une centrale électrique à gaz d’une capacité de 255 MW et d’un gazoduc à Saint-Louis, situé dans le nord-ouest du pays. Ces installations, estimées à 475 millions de dollars, devraient être opérationnelles en 2026.
Le défi sera donc de respecter le calendrier de ces projets censés avoir un impact positif sur la production nationale, les exportations, les investissements et les recettes fiscales. Papa Amadou Sarr, ancien ministre au Sénégal et actuel directeur exécutif Mobilisation, partenariats et communication de l’Agence française de développement (AFD), a toutefois prévenu dans les colonnes de « Jeune Afrique » qu’« il faut à tout prix éviter d’entraver la diversification économique en raison de la manne financière liée aux revenus des hydrocarbures ».
Le journal panafricain cite quatre autres défis, à savoir : la création d’emplois, la consolidation des infrastructures, la discipline budgétaire et le changement climatique.