La situation dans nombre d’universités maliennes frôle la côte d’alerte. L’inquiétude et même le désarroi habitent aussi bien les étudiants que leurs parents.
Nos compatriotes qui ont le sens de la formule imagée et qui excellent dans l’art de l’autodérision n’hésitent pas à comparer la réalité dans nos universités à l’effet de la VAR (le sigle anglais de l’Assistance vidéo à l’arbitrage) qui contraint par exemple l’arbitre à annuler un but qu’il avait préalablement validé pour un hors-jeu ou une faute commise sur un adversaire.
Ainsi, les supporters de l’équipe qui pensait avoir scoré passent en quelques secondes d’une sensation de jubilation, d’extase, d’exubérance à la désespérance. L’espoir de voir un enseignement supérieur de qualité en terre malienne est en train de céder la place au désenchantement.
Nos universités sont prises dans le tourbillon des grèves interminables des enseignants et des étudiants. Sans parler des violences au cours des renouvellements des bureaux de l’AEEM dans les facultés et autres instituts. Même si ces derniers temps, les remous ont baissé d’un cran, nos universités sont loin de sortir de cet engrenage.
Or il est plus qu’urgent de dégager les universités des turbulences qui empêchent l’exécution correcte des enseignements. Dans certaines universités, des étudiants mettent 5 voire 6 ans, pour obtenir une licence, au lieu de trois ans normalement dans le cadre du Système Licence-Master-Doctorat (LMD).
Il est vrai que les agitations ne sont pas les causes de la situation. La pléthore y est pour beaucoup. Des milliers d’étudiants qui se pressent dans des universités manquant d’infrastructures et de personnel enseignant. Forcément, la qualité de l’enseignement en pâtit. Et la progression normale des étudiants n’est pas non plus évidente.
Personne n’apprécie de voir les universités maliennes former des «étudiants de carrière». Surtout que l’idée est répandue – elle n’est pas loin de la réalité – que les enfants des pauvres sont majoritaires sur les bancs des universités publiques. Les plus nantis envoient leurs progénitures à l’étranger ou les inscrivent dans des établissements privés.
Il appartient à l’Etat de créer les conditions d’un enseignement supérieur de qualité. Les étudiants ont droit à des enseignants qualifiés, des salles de cours décents, des laboratoires équipés, des ressources pédagogiques leur permettant de mener des recherches. Aujourd’hui, ces conditions sont loin d’être réunies dans nombre de nos institutions d’enseignement supérieur. Une formation de qualité, c’est le minimum que la jeunesse puisse réclamer.
Tout le monde s’accorderait pour dire que nos universités doivent devenir des temples du savoir qui donnent une égalité de chance à tous les enfants du pays, pour peu qu’ils aient la capacité de suivre les études supérieures. Une université est essentielle dans la vie et le développement d’une nation comme l’huile dans le fonctionnement d’un moteur. Un pays a besoin d’une élite bien formée et capable de concevoir et de mettre en œuvre des programmes de développement. Un pays a besoin d’une main d’œuvre qualifiée pour produire de la richesse et favoriser l’émergence.
Un pays dépourvu de l’enseignement de qualité s’expose à l’obscurantisme et il ratera indéniablement le train du progrès. Il n’a aucune chance de figurer sur la liste des pays émergents. C’est ce logiciel que tous (enseignants, décideurs, étudiants et parents) doivent intégrer dans les réflexions sur l’école malienne en général et les universités en particulier.
Brehima DOUMBIA