Nommé Premier ministre lundi, Gabriel Attal devient à 34 ans le plus jeune chef du gouvernement de l’histoire de la République française, une ascension spectaculaire pour l’une des figures les plus populaires du camp d’Emmanuel Macron.
« Sans-faute », « bon élève », « la meilleure incarnation de l’ADN macroniste »: le phénomène Attal, déjà benjamin du gouvernement en 2017, puis plus jeune ministre de l’Education nationale, s’est finalement imposé pour succéder à Elisabeth Borne à Matignon à la surprise générale.
Personnalité la plus populaire du gouvernement et de la majorité présidentielle pour un Français sur deux, Gabriel Attal devient également le premier chef de gouvernement français ouvertement gay.
Sa nomination intervient alors que le deuxième quinquennat Macron est englué dans les difficultés: sans majorité à l’Assemblée nationale, confronté à la montée de l’extrême droite, le président français peine à donner du souffle à son deuxième mandat. L’adoption dans la douleur de la très controversée réforme des retraites, et plus récemment d’une loi immigration soutenue par l’extrême droite et ayant fracturé la majorité présidentielle, ont laissé des traces.
Issu de la mouvance des jeunes soutiens de Dominique Strauss Kahn, ancien poids lourd de la gauche tombé en disgrâce après avoir été arrêté pour agression sexuelle en 2012 à New York, Gabriel Attal avait fait partie des premiers socialistes à suivre Emmanuel Macron lors de la création en 2016 de son parti En Marche!, tremplin vers l’Elysée.
« Un os à ronger pour Gabriel »
Après la victoire de M. Macron en 2017, ce fils d’un producteur de cinéma, qui a fréquenté les bancs de la très huppée Ecole alsacienne à Paris, s’était fait élire député dans un fief de droite des Hauts-de-Seine, en banlieue parisienne.
De quoi entrer au gouvernement par la petite porte: chargé du modeste secrétariat d’Etat à la Jeunesse, il se fait remarquer par sa « capacité de travail » et son « sens politique », autant que par une ambition assumée. « Si je m’étais interdit des choses, je ne serais probablement pas là où j’en suis aujourd’hui », admettait-il volontiers à l’époque.
En juillet 2020, le Premier ministre de l’époque Jean Castex s’interroge: « A-t-on trouvé un os à ronger supplémentaire pour le jeune Gabriel? »
Pour se faire les dents, le benjamin hérite finalement du poste de porte-parole du gouvernement.
De plateaux de télévision en conférences de presse, Gabriel Attal se révèle dans cet exercice de service après-vente, marqué par la crise du Covid, même si son aplomb le trahit parfois.
Reste qu’il s’impose comme l’un des rares membres du gouvernement à se faire un nom dans l’opinion publique.
Interdiction de l’abaya
Après sa réélection en 2022, Emmanuel Macron lui offre le Budget, où son aisance médiatique lui permet d’être l’un des rares ministres envoyés en première ligne pour défendre l’impopulaire réforme des retraites.
La nouvelle récompense ne tarde pas: le prestigieux ministère de l’Education nationale, à partir de juillet 2023.
« Choc des savoirs », « école des droits et des devoirs », prise de position en faveur de l’uniforme, interdiction de l’abaya à l’école, le jeune ministre, omniprésent, monte au front, sature l’espace médiatique et séduit les populations âgées qui constituent le coeur de l’électorat macroniste.
Une conseillère ministérielle s’étonnait il y a quelques semaines de l’emballement autour de cet « apparatchik » volontiers moqué, y compris par les siens, pour son « côté tête à claques du premier de la classe ».
Un « M. Macron junior, qui s’est spécialisé dans l’arrogance et le mépris », fustige pour sa part la cheffe des députés de la gauche radicale, Mathilde Panot.