Le Secrétaire général de l’ONU, António Guterres, a estimé dimanche que la situation à Gaza était « de plus en plus désespérée au fil des heures », alors que l’armée israélienne poursuit ses bombardements et ses opérations terrestres dans l’enclave palestinienne assiégée.
« Je regrette qu’au lieu d’une pause humanitaire indispensable et soutenue par la communauté internationale, Israël ait intensifié ses opérations militaires. Le nombre de civils tués et blessés est totalement inacceptable », a déclaré le chef de l’ONU lors d’un point de presse conjoint avec le Premier ministre du Népal, Pushpa Kamal Dahal ‘Prachanda’, à Katmandou, où il a entamé une visite.
Libération de tous les otages
Le Secrétaire général a souligné qu’il continuerait « d’insister sur la libération immédiate et inconditionnelle de tous les otages de Gaza » et a réitéré sa « condamnation totale des attaques effroyables perpétrées par le Hamas », ajoutant que « rien ne peut jamais justifier les meurtres, les blessures et les enlèvements de civils ».
Il a adressé ses plus sincères condoléances aux familles des dix étudiants népalais tués dans « les attaques terroristes du Hamas en Israël le 7 octobre », et a souhaité « le retour sain et sauf de Bipin Joshi, porté disparu ».
Droit international humanitaire
Le Secrétaire général a déclaré que « toutes les parties doivent respecter leurs obligations en vertu du droit international humanitaire », rappelant que ce droit est né « de la tragédie et des terribles expériences de la guerre ».
« La protection des civils est primordiale. Les lois de la guerre établissent des règles claires pour protéger la vie humaine et respecter les préoccupations humanitaires. Ces lois ne peuvent pas être déformées par opportunisme », a souligné M. Guterres.
Selon le Secrétaire général, le monde est « témoin d’une catastrophe humanitaire qui se déroule sous nos yeux » à Gaza, notant que plus de deux millions de personnes, « sans nulle part où aller en sécurité, se voient refuser les éléments essentiels à la vie – nourriture, eau, abri et soins médicaux – et sont soumises à des bombardements incessants ».
Il a exhorté « tous ceux qui ont des responsabilités à prendre du recul » et a réitéré son appel à un « cessez-le-feu humanitaire immédiat, à la libération inconditionnelle de tous les otages et à l’acheminement d’une aide humanitaire soutenue et d’une ampleur répondant aux besoins de la population de Gaza ».
« Nous devons unir nos forces pour mettre fin à ce cauchemar pour la population de Gaza, la population d’Israël et toutes les personnes affectées dans le monde, y compris ici au Népal », a-t-il ajouté.
Crainte d’un « écroulement de l’ordre civil »
De son côté, l’agence des Nations Unies chargée des réfugiés palestiniens, l’UNRWA, a déclaré dimanche qu’il y avait des signes inquiétants d’un « écroulement de l’ordre civil » à Gaza alors que des milliers de personnes ont envahi plusieurs entrepôts de l’UNRWA pour s’emparer notamment de farine.
« Des milliers de personnes ont fait irruption dans plusieurs entrepôts et centres de distribution de l’UNRWA dans les zones centrale et méridionale de la bande de Gaza, emportant de la farine de blé et d’autres articles de survie de base comme des produits d’hygiène. L’un de ces entrepôts, à Deir al-Balah, est l’endroit où l’UNRWA stocke les fournitures des convois humanitaires en provenance d’Égypte », a indiqué l’agence onusienne dans un communiqué de presse.
« C’est un signe inquiétant que l’ordre civil commence à s’effondrer après trois semaines de guerre et un siège strict de Gaza. Les gens sont effrayés, frustrés et désespérés. Les tensions et la peur sont aggravées par les coupures de lignes téléphoniques et Internet. Ils se sentent seuls, coupés de leurs familles à Gaza et du reste du monde », a estimé Thomas White, Directeur des affaires de l’UNRWA dans la bande de Gaza.
Le déplacement massif de personnes du nord de la bande de Gaza vers le sud a exercé une pression énorme sur ces communautés, alourdissant encore le fardeau des services publics en ruine. Certaines familles ont accueilli jusqu’à 50 membres de leur famille hébergés dans un seul logement.
« Les stocks sur le marché s’épuisent tandis que l’aide humanitaire arrivant dans la bande de Gaza par camions en provenance d’Égypte est insuffisante. Les besoins des communautés sont immenses, ne serait-ce que pour la survie de base, alors que l’aide que nous recevons est maigre et incohérente », a ajouté M. White.
À ce jour, un peu plus de 80 camions d’aide sont entrés à Gaza en une semaine. Le samedi 28 octobre, il n’y a pas eu de convoi en raison de l’interruption des communications. L’UNRWA – principal acteur pour la réception et le stockage de l’aide dans la bande de Gaza – n’a pas pu communiquer avec les différentes parties pour coordonner le passage du convoi. Depuis, les équipes de l’UNRWA à Gaza ont signalé que les services et connexions Internet ont été rétablis.
« Le système actuel de convois est voué à l’échec. Très peu de camions, des processus lents, des inspections strictes, des fournitures qui ne correspondent pas aux exigences de l’UNRWA et des autres organisations humanitaires, et surtout l’interdiction persistante du carburant, sont autant de recettes pour un système défaillant. Nous appelons à un flux régulier et constant de fournitures humanitaires vers la bande de Gaza pour répondre aux besoins, en particulier à mesure que les tensions et les frustrations augmentent », a conclu le responsable de l’UNRWA.
L’UNRWA compte des milliers d’employés à Gaza, qui sont aussi durement affectés par les bombardements. Le chef de l’UNRWA, Philippe Lazzarini, a organisé dimanche une cérémonie à la mémoire des 59 employés de l’agence onusienne tués à Gaza depuis le 7 octobre. « Chaque jour devient un jour sombre pour l’ONU et l’UNRWA alors que le nombre de nos collègues tués augmente », a-t-il dit.
Signe inquiétant
Le Programme alimentaire mondial (PAM) a également estimé que l’assaut d’un entrepôt géré par l’ONU dans la zone centrale de Gaza par des milliers de civils dimanche « est le signe que les gens perdent espoir et deviennent de plus en plus désespérés de minute en minute ».
« Ils ont faim, sont isolés et subissent des violences et une immense détresse depuis trois semaines », a déclaré Samer Abdeljaber, Représentant du PAM en Palestine. « Nous avons besoin d’une pause humanitaire pour pouvoir fournir de la nourriture, de l’eau et des produits de première nécessité aux personnes dans le besoin, de manière sûre et efficace. Un accès beaucoup plus large est nécessaire de toute urgence ».
Les pénuries de carburant et la perte de connectivité menacent également de mettre un terme aux opérations humanitaires. Sans approvisionnement supplémentaire en carburant, les boulangeries travaillant avec le PAM à Gaza ne sont plus opérationnelles et les transporteurs ne peuvent pas livrer la nourriture là où elle est nécessaire.
Source: https://news.un.org/fr