L’affaire pourrait le faire tomber: le président sud-africain Cyril Ramaphosa, embourbé dans une sombre histoire de cambriolage, fait face au possible lancement d’une procédure de destitution. Voici ce que l’on sait du “scandale de Phala Phala”.
Un cambriolage
Homme d’affaires richissime avant de devenir chef d’Etat, M. Ramaphosa est notamment propriétaire d’un somptueux domaine appelé “Phala Phala” (nord-est) qui compte une maison de maître, un élevage de bétail et une réserve de gibier.
En février 2020, débarquent des cambrioleurs, vraisemblablement de mèche avec un employé de maison. Le président est à l’étranger. Les intrus dérobent des liasses de dollars cachées dans un canapé.
Aucune plainte n’est retrouvée auprès de la police, M. Ramaphosa affirme avoir informé les services de protection présidentielle.
Soudain, une plainte
L’affaire reste inconnue du public pendant plus de deux ans. Le scandale éclate en juin avec une plainte déposée par Arthur Fraser, ex-patron du renseignement et opposant notoire du président.
Une enquête de police est alors ouverte, six mois avant une réunion cruciale de l’ANC au pouvoir qui doit décider en fin de semaine de reconduire ou non Ramaphosa à la tête du parti et potentiellement du pays. Le président n’a pas été inculpé à ce stade.
Selon la plainte, “plus de quatre millions de dollars” ont été volés. De l’argent sale, selon elle, introduit “illégalement” dans le pays par un conseiller pour le compte de Cyril Ramaphosa.
“Le président a dissimulé le crime à la police et aux impôts”, poursuit la plainte, en accusant le chef d’Etat d’avoir ensuite organisé par le biais de son service de protection la traque des voleurs et leur “séquestration”, pour finir par acheter leur silence.
Un petit parti, le Mouvement pour la transformation de l’Afrique (ATM), dépose une motion de censure.
Passion présidentielle
Cyril Ramaphosa n’a jamais nié détenir chez lui d’importantes sommes en liquide.
Dans une déclaration officielle soumise à la commission parlementaire chargée de l’affaire, il explique que l’argent provient de la vente de vingt buffles: 580.000 dollars, selon lui.
Deux mois avant le cambriolage, un homme d’affaires soudanais “est venu à la ferme (…) Il a choisi les buffles qui lui plaisaient et payé en liquide”.
L’employé chargé de la vente, à la veille de ses vacances de fin d’année, “ne se sentait pas à l’aise à l’idée de laisser l’argent dans le coffre-fort” auquel plusieurs salariés ont accès, et a jugé plus sûr de le dissimuler sous les coussins d’un canapé.
“Je n’ai jamais volé d’argent et je ne le ferai jamais”, a juré M. Ramaphosa. Il nie aussi avoir “traqué les voleurs”.
De sérieux doutes
“Le président a pu commettre (…) des violations et des fautes” dans le cadre de l’affaire, a conclu fin novembre un rapport parlementaire. Le Parlement doit se prononcer mardi sur l’opportunité de lancer une procédure de destitution.
“Il est difficile d’admettre qu’un étranger transportant 580.000 dollars vienne par hasard à Noël”, souligne le rapport. Et le fait que l’argent ait été gardé pendant des mois dans un canapé, au lieu d’être déposé à la banque, reste un “élément troublant”.
L’acheteur des buffles cité par M. Ramaphosa, Hazim Mustafa, a récemment confirmé à plusieurs médias britanniques la transaction et son montant. Il s’est dit prêt à “aider la justice”.
Achetés au début de la pandémie de Covid, les bovins n’ont jamais été livrés à Dubaï chez M. Mustafa, qui a avoué ne pas avoir réalisé être en transaction avec le chef d’Etat sud-africain.