Avec l’entrée en scène de l’Autorité Indépendante de Gestion des Élections et l’accélération du processus d’installation de ses démembrements, le scrutin du 18 juin est parti comme sur un chapeau de roue et la convocation du collège électoral aura fini d’évacuer les ultimes doutes sur le respect de la nouvelle date fixée par les autorités de Transition ainsi que sur leur intention de franchir un pas décisif vers l’ordre constitutionnel. S’y ajoute un déploiement de la machine électorale entré de plain-pied dans la phase d’acheminement du matériel électoral dans les différentes localités, grâce au coup de pouce salvateur de l’administration territoriale à l’AIGE, à coups de dérogations et de simplifications du processus par des normes minimalistes.
Au nom des contraintes de temps et d’un besoin de simplification du processus, il est ainsi dérogé à l’application du nouveau découpage administratif pour le rendez-vous référendaire du 18 juin. En effet, au lieu des 159 nouveaux cercles, le nombre des circonscriptions électorales est réduite à une soixantaine seulement, à savoir : les 49 cercles traditionnels auxquels s’ajoutent les communes de la capitale et la dizaine de cercles précédemment créés depuis 2012, dans le sillage de l’érection de Taoudenit et de Menaka en régions.
Pour ce qui du fichier électoral, les enjeux électoraux n’atteignent certainement pas les proportions qui exigent une examen de sa fiabilité par un audit généralement réclamé à toutes consultations. Sans révision des listes électorales dans le cadre des commissions administratives, acteurs politiques et observateurs du processus électoral s’accordent sur l’augmentation du nombre d’électeurs de 500 000 nouveaux inscrits. Aucune indication, en revanche, sur le nombre de décès et autres cas à déduire des 8 463 084 électeurs recensés dans ledit fichier, lequel dégage par ailleurs 4 391 576 électeurs et 4 071 508 électrices dont les suffrages sont fortement convoités par les tendances que polarise la nouvelle constitution. Ces inscrits se répartissent entre des bureaux de vote affectés à 13 240 centres dans différentes localités que leur degré de stabilité rend différemment propices au libre exercice du droit de vote. Avec un accès inégalitaire aux protagonistes du scrutin, l’enjeu réside manifestement moins dans la victoire de l’un des camps que dans le taux de participation. En tant test grandeur nature du processus de retour à l’ordre constitutionnel, il tient d’une gageure que les tenants de la nouvelle constitution sont déterminés à remporter. En vue d’en relever le défi, les soutiens du pouvoir sont à pied d’œuvre dans la mobilisation des leurs troupes aux urnes, tandis que la dernière trouvaille de l’administration parmi tant d’autres mesures pourrait consister à ajouter le vote de pèlerins par procuration aux nombreuses dérogations à la loi électorale. En atteste le contenu d’une correspondance adressée par le ministre en charge des élections à son collègue des Affaires religieuses. Au risque d’entacher davantage la crédibilité d’un scrutin déjà compromise par un excès de complaisance et de légèreté avec les normes, la mesure en gestation vise à conforter la participation au même titre que la foultitude d’ouvertures concédées dans l’identification des électeurs faute de disponibilité des cartes biométriques – mais elle pourra difficilement suffire pour compenser les déperditions de suffrages imputables à l’insécurité rampante et son corollaire de déplacement massif des électeurs, ainsi que les abstentions massives induites au déficit de consensus autour du projet.
A KEÏTA