Le week-end dernier s’est tenu en Afrique de l’Ouest deux sommets importants. Samedi a eu lieu à Niamey, au Niger, le premier sommet de l’Alliance des Etats du Sahel.
Le lendemain, le 65e sommet des chefs d’Etat et de gouvernement de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest s’est ouvert ce à Abuja, au Nigeria, sous la présidence du président nigérian, Bola Tinubu.
Au cours de leur premier sommet à Niamey, samedi, les chefs des juntes militaires du Niger, du Mali et du Burkina Faso ont cherché à officialiser l’Alliance des Etats du Sahel, créée le 16 septembre 2023 et présentée comme une alternative à la Communauté économique des États de l’Afrique de l’ouest (Cédéao) que ces trois pays ont annoncé vouloir quitter.
L’AES est devenue une confédération d’environ 72 millions d’habitants et les militaires à la tête des trois pays fondateurs disent vouloir « franchir une étape supplémentaire vers une intégration plus poussée entre les Etats membres ».
Divorce consommé avec la Cédéao
La formalisation de la création de l’Alliance des Etats du Sahel vient acter le divorce avec la Cédéao.
Après avoir annoncé, le 28 janvier dernier, le retrait de leur pays, les dirigeants du Burkina Faso, du Mali et du Niger ont réitéré leur démarche au cours de leur rencontre du samedi 07 juillet à Niamey.
Réunis en sommet dimanche (08 juillet) à Abuja, les chefs d’Etat de la Cédéao ont alerté sur les risques de « désintégration » de la sous-région après l’annonce faite par les militaires, la veille.
Selon Issaka Souaré, enseignant-chercheur à l’Université Lansana Conté de Conakry et conseiller au bureau régional de l’Institut d’études de sécurité (ISS), « pour la Cédéao, et au vu de l’article 91 de son traité, ces trois pays sont encore membres de la Cédéao. Donc, le président de la Commission de la Cédéao (Omar Alieu Touray, ndlr) s’exprimait au conditionnel. Pour prouver cela, ils ont désigné le président sénégalais (Bassirou Diomaye Faye) comme médiateur de la Cédéao auprès du Mali, du Burkina Faso et du Niger. Donc, ce n’est pas encore consommé au niveau de la Cédéao. Mais, c’est sûr que si le retrait devrait être effectif au 28 janvier 2025,il y aura les conséquences dont il parlait (Omar Touré) ».
Le président de la Commission de la Cédéao, Omar Alieu Touray, a prévenu que les trois pays risquaient l' »isolement diplomatique et politique » et la perte de millions d’euros en investissements.
Leurs ressortissants pourraient également devoir obtenir des visas pour voyager dans la région.
« Si nous devons demander des visas pour aller étudier dans un pays de la Cédéao, c’est un frein à la libre circulation de nous les étudiants. Donc, je pense que ce phénomène devrait d’abord être revu et analysé avant que ces trois pays respectifs se prononcent sur la rupture avec la Cédéao », affirme Mamba.
Les dirigeants de la Cédéao ont également désigné les présidents sénégalais Bassirou Diomaye Faye et togolais Faure Gnassingbé comme « facilitateurs » auprès des pays membres del’Alliance des Etats du Sahel (AES).
Mission de bon office
Niagalé Bagayoko, docteure en sciences politiques et présidente de l’African Security Sector Network (ASSN) estime pour sa part que « pour tout ce qui est question de sécurité, la rupture est véritablement consommée. Parce qu’il y a une défiance. En revanche, dans les domaines économiques, il ne me paraît pas envisageable que des voix de coopération soient trouvées ».
En plus de la coopération militaire, la nouvelle confédération – dont le Mali prend la présidence tournante pour un an – devrait permettre de mutualiser les moyens dans des secteurs considérés comme stratégiques à savoir l’agriculture, l’eau, l’énergie ou encore les transports, ainsi que la création d’une banque d’investissement del’AES.
En revanche, le communiqué final n’a pas évoqué la question de la monnaie commune et d’une éventuelle sortie du franc CFA.
Auteur: Eric Topona, Mahamadou Kane